Publié le 30 juillet 2014

SOCIAL

Allemagne : ONG, syndicalistes et industriels rejettent en bloc le nouveau label "textile équitable"

Le ministre allemand de la Coopération économique et du Développement (BMZ) veut introduire un nouveau label textile. Gerd Müller, un conservateur bavarois, cherche à réunir les représentants de l’industrie, des syndicats et des organisations non gouvernementales (ONG) à une table ronde. Une mission quasi impossible, tant la question sous-jacente de la responsabilité juridique des entreprises qui sous-traitent aux pays producteurs est sensible.

Rana Plaza
Dans le Rana Plaza, l'immeuble qui s'est effondré à Dacca le 25 avril 2013, des étiquettes de marques allemandes ont été retrouvées.
© Munir Uz Zaman / AFP

L’opposition entre industriels du textile et représentants de la société civile, syndicats et ONG, tourne à la bataille frontale. En cause : le projet du ministre Gerd Müller de créer un label textile équitable en Allemagne. De fait, tout l’enjeu réside dans la définition des responsabilités juridiques des entreprises allemandes du textile dans les pays producteurs.

 

Syndicats et ONG réclament la définition et l’application de normes juridiques sur toute la chaîne de production. Et rejettent l’idée d’un label, par définition volontaire et non contraignant, jugé très insuffisant par rapport à la réalité sur le terrain. A terme, il s’agit pour eux de pouvoir rendre les entreprises légalement responsables des mauvaises pratiques de leur fournisseur.

 

Déficit de crédibilité

  

"Un label se doit d’être crédible aux yeux des consommateurs. Et cela ne peut fonctionner que si des normes ambitieuses et obligatoires sont définies et appliquées sur toute la chaîne de production", résume Berndt Hinzmann, responsable de Kampagne für Saubere Kleidung, l’équivalent allemand du Collectif éthique sur l’étiquette.

 

L’industrie textile, elle, écarte toute idée de réglementation juridique. "Une contrainte légale irait dans le mauvais sens et apporterait des problèmes juridiques", fait savoir Jan Eggert, président de l’Association du commerce allemand (AVE). Et ajoute qu’"un label garantissant le respect des normes sur toute la chaîne de production est tout simplement impensable dans l’industrie textile".

 

Une "rustine" marketing, selon les Verts

 

Deux positions diamétralement opposées que le ministre tente tout de même de concilier. A ce jour, deux rencontres ont eu lieu. La dernière date du 28 mai. Veronika Ulbert, porte-parole du ministère, rapporte qu’environ 70 personnes se sont alors retrouvées à Berlin pour mettre en place un agenda de travail.

 

Les négociations s’annoncent ardues. Elles ont peu de chances d’aboutir avant la fin de l’année.

 

Pour le député vert Uwe Kekeritz, l’une des rares personnalités politiques allemandes à avoir visité les entreprises de sous-traitance au Bangladesh, le projet du ministre Gerd Müller n’est qu’une "stratégie de marketing". Le parlementaire critique ce label – "encore un" – parce qu’il occulte précisément toute notion de responsabilité juridique.

"Les tragédies dans l’industrie textile au Bangladesh montrent combien il est urgent que les entreprises occidentales soient tenues responsables de leurs sous-traitants. Nous avons besoin de normes juridiques obligatoires qui fassent l’objet de contrôles véritables. Pas d’un nouveau label." 

Claire Stam, correspondante en Allemagne
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