Publié le 03 décembre 2019
SOCIAL
Urgence climatique, inégalités sociales et fiscales : "il est trop tard pour procrastiner", alerte Jacques Attali
Alors que la COP25 vient de démarrer, des études montrent la forte attente des citoyens du monde envers les acteurs économiques et politiques pour agir à la fois contre le changement climatique mais aussi les inégalités sociales et fiscales. Si des mesures sont prises par ces dirigeants, elles restent cependant insuffisantes pour l’urgence et l’ampleur des défis. La France n’est pas épargnée. Pour l’essayiste Jacques Attali, qui organise le Global Positive Forum à Paris ce 3 décembre, il s’agit désormais de changer d’échelle.

@GlobalPositiveForum
Environnement, évasion fiscale, pauvreté, inégalités salariales, corruption… La pression monte sur les dirigeants économiques et politiques. "Face aux différentes dérégulations, climatiques, sociales et fiscales qui se font jour, on note une prise de conscience collective de l’interdépendance de ces questions par les citoyens". Et ce, quelles que soient les générations et l’avancée économique des pays, souligne ainsi Jacques Attali qui s’appuie sur une étude commandée par l’Institut de l’économie positive à l’occasion du Global Positive forum organisé ce 3 décembre à Paris.
Selon celle-ci, qui interroge 21 000 citoyens des pays du G20, cinq priorités se dégagent : respect des droits des travailleurs, éducation, lutte contre la corruption et transparence fiscale, lutte contre la pauvreté et protection de l’environnement. L’ordre varie selon les pays, mais la tendance est là et suscite des attentes fortes envers les dirigeants politiques et économiques.
Les attentes des 21 000 citoyens, contactés pour l'étude du Global Positive Forum
L'état des lieux de la planète sur ces différentes thématiques montre "une situation mondiale extrêmement précaire", note l’étude. Certes, certains indicateurs s’améliorent comme la collecte des déchets, le développement des énergies renouvelables, le niveau et l’espérance de vie ou l’accès à l’éducation. Mais plusieurs autres se dégradent de façon inquiétante.
Depuis 2015, la situation alimentaire mondiale se détériore, plus particulièrement dans les régions touchées par des conflits internes ou les aléas climatiques ; les inégalités de revenus persistent et suscitent un sentiment d’injustice ; la corruption des dirigeants de moins en moins acceptée et l’injustice fiscale de plus en plus ressentie... Quand l’écart des droits des travailleurs reste considérable entre les pays développés et ceux en développement.
"Nous avons besoin de changer d’échelle"
Ce grand écart entre les attentes des citoyens et la réalité de la situation risque d’augmenter les tensions dans le monde, comme le montrent déjà les différents de mouvements de contestation, de Hong Kong au Chili, en passant par le Liban ou la France avec les Gilets jaunes.
Face à cela, quelles actions ? "La prise de conscience s’est particulièrement transcrite dans le comportement des consommateurs ou de producteurs, moins dans le comportement citoyen (à travers le vote) ou d’épargnant", note Jacque Attali. Or "il est trop tard pour procrastiner", alerte-t-il, appelant à "s’engager pour une économie positive". "Nous avons besoin de la participation de tous – entreprises, nations, territoire, citoyens…- pour sortir du cercle des convaincus et changer d’échelle, très vite. C’est le sens de notre Manifeste pour accélérer la révolution positive au service des générations futures", souligne-t-il.
La dynamique est en cours si on en croit les indices de positivité développés par l’Institut pour les États, les territoires et les entreprises. Au niveau des États, ils montrent un meilleur accès à l’éducation et au financement des générations futures, un travail en cours sur une meilleure inclusion des populations en difficulté dans l’emploi. Mais l’effort doit être bien plus important, notamment sur la préparation des infrastructures pour les générations futures.
La France doit accélérer le changement
La France n’est pas épargnée et doit accélérer sa transformation. Le pays "est mal placé sur notre indice (18e sur 32), avec une baisse marquée sur la plupart des dimensions, souligne Jacques Attali. Il est notamment nécessaire d’avancer sur la question de la mobilité sociale, la place des femmes ou l’indépendance des medias", assure-t-il. Les entreprises ont leur part à faire. Certes, l’indice de positivité du CAC40 s’améliore sur la plupart des dimensions : conditions de travail, vision stratégique de long terme, empreinte environnementale. Mais les grandes entreprises françaises doivent encore donner un coup d’accélérateur et travailler sur le partage de la valeur, la place des femmes dans l’entreprise, la formation et la recherche ou encore la lutte contre la corruption.
Béatrice Héraud @beatriceheraud