"Avec 1,3 % pour 2019 et pour 2020, la croissance est plus élevée que pour la moyenne de la zone euro", se félicitait Bruno Le Maire lors de la présentation de ses vœux aux acteurs économiques. La grève contre la réforme du régime des retraites, malgré sa durée inédite, ne semble pas avoir de prise sur les chiffres macroéconomiques qui demeurent largement positifs.

Sur le terrain, en revanche, la réalité est plus dure pour les commerçants. Ceux situés dans les métropoles françaises enregistrent de sévères baisses de chiffre d’affaires, allant jusqu’à 30 % de moins sur le mois de décembre 2019, estime l’Alliance du commerce qui représente notamment les commerces de centre-ville. Même chose pour les hôteliers qui voient baisser leurs chiffres de fréquentation. Fait surprenant, les consommateurs ne semblent pas avoir compensé par des achats en ligne, les membres de la Fédération du e-commerce et de la vente à distance (Fevad) n’ayant pas enregistré d’amélioration significative de leurs ventes en décembre.

L’inquiétude des commerçants est d’autant plus grande en période de soldes, notamment pour le secteur de l’habillement qui écoule jusqu’à 30 % de ses volumes annuels pendant les soldes. Le ministère a mis en place des mesures d’accompagnement (étalement de cotisations sociales, paiement accéléré de crédits d’impôts, etc.) pour éviter toute faillite. "Je suis prêt à étudier des dispositifs de dégrèvement au cas par cas pour tous les commerçants parisiens dont la survie serait menacée par les grèves", assure Bruno Le Maire.

Une déconsommation choisie

L’impact des grèves sur les chiffres d’affaires est sans doute d’autant plus durement ressenti qu’il se conjugue avec une tendance de fond émergente à la réduction de la consommation par les Français. Par souci du climat, de réduction des déchets ou encore de meilleure qualité des produits alimentaires, une partie des Français préfère acheter un peu moins, mais mieux.

Le cabinet de conseil Wavestone, dans son baromètre 2019 des nouvelles tendances de consommation, parle d’une "déconsommation choisie" de la part des Français, par opposition à la baisse de la consommation post-2008, subie en raison de la hausse des prix. La tendance demeure toutefois encore balbutiante. Si les consommateurs se révèlent plus responsables dans leurs intentions, ils ne sont au final que 20 % à traduire dans les faits leur intention de consommer mieux, selon Wavestone.

Selon la Fédération du commerce et de la distribution, la consommation alimentaire et non alimentaire des ménages a baissé de 0,4 % sur les neuf premiers mois de 2019, et de 1,5 % pour la seule consommation alimentaire. Reste donc à savoir si la fin de la grève sur les retraites se traduira par un retour en boutique des consommateurs et donc un rattrapage de chiffre d’affaires. Ou si la tendance à la déconsommation continuera de s’installer.

Arnaud Dumas, @ADumas5