Publié le 04 décembre 2017
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Quand la cosmétique bio se parfume à la pétrochimie
Pour la première fois une norme internationale va définir la cosmétique "bio et naturelle". Or cette norme est fustigée par des spécialistes du secteur comme Cosmébio qui pointe des critères peu exigeants. "Un produit indiquant 20 % de bio et 80 % d'ingrédients issus d'OGM ou de la pétrochimie pourra se revendiquer comme bio", assure la directrice générale d'Ecocert Green, Valérie Lemaire.

Y aura-t-il bientôt des "cosmétiques naturelles" composées en partie de produits pétrochimiques comme du parabène et de la silicone ? C’est ce que craignent plusieurs organisations du secteur dont Cosmébio, une association internationale spécialisée dans la cosmétique naturelle et biologique, regroupant 350 entreprises et 450 marques.
Le coupable est l'ISO 16128. Un numéro qui secoue les entreprises du secteur. Cette norme internationale sera définitivement adoptée à la fin de l’année 2017. Or, "elle va tromper les consommateurs", alerte Nicolas Bertrand, directeur du développement de Cosmébio, interrogé par Novethic, "en particulier les non avertis qui découvrent la cosmétique bio car elle donne les clés pour apposer des allégations ambiguës sur le packaging", précise l'association.
Pas de minimum d'ingrédients bio ni de liste noire de produits pétrochimiques
Pour bien comprendre, il faut savoir que, jusqu’ici, aucune norme internationale ne définissait la cosmétique bio et naturelle. Les professionnels ont donc créé des labels permettant aux consommateurs de s’y retrouver. Cosmébio par exemple s’appuie sur le label Cosmos Organic pour labelliser ses produits. Une crème bio doit être composée au minimum de 95 % d’ingrédients végétaux bio, 95 % minimum d’ingrédients d’origine naturelle, 20 % d’ingrédients bio au total, et 5 % maximum d’ingrédients synthétiques parmi lesquels sont exclus les OGM, parabens, silicone ou encore phénoxyéthanol.
Or, la nouvelle norme européenne n’exige pas de minimum d’ingrédients bio dans le produit final et n’exclut pas les OGM ou autres produits pétrochimiques controversés. "Dans un contexte de confiance établie de longue haleine avec les consommateurs, il serait contre-productif et dommageable de laisser penser au consommateur qu’un produit indiquant 20 % de bio et 80 % d’ingrédients issus d’OGM ou de la pétrochimie, sans aucune garantie de respect de l’environnement, puisse se revendiquer comme étant bio", explique Valérie Lemaire, directrice générale d’Ecocert Greenlife, un des organismes fondateurs de COSMOS.
"Cette norme, c'est du greenwashing"
Reste que cette norme n’est pas un label. Et elle est saluée par la Fédération des entreprises de la beauté (FEBEA) qui se réjouit que "les acteurs internationaux de la cosmétique parlent enfin tous le même langage (...) Cette norme a le grand mérite d’aboutir à une harmonisation des positions des principaux pays concernés", estime-t-elle. Et de rétorquer : "Les labels, tels que COSMOS, peuvent toujours apporter des exigences complémentaires dans leur cahier des charges, faire certifier des produits et apposer un logo".
Des arguments qui ne convainquent pas les réfractaires. "Cette norme, c’est du greenwashing", fustige Nicolas Bertrand pour qui la cosmétique bio pourrait perdre en crédibilité. D’autant que les normes ISO ne sont pas des organismes de contrôle. Les pourcentages affichés par les marques ne seront pas vérifiés.
Marina Fabre @fabre_marina