Publié le 16 mai 2023
SOCIAL
Eco-score textile : comment garantir une note sans greenwashing
C'est le sprint final de l'éco-score textile. Derrière cette simple note qui doit voir le jour en 2024 se trouvent de multiples décisions à prendre pour réussir à valoriser les pratiques les plus vertueuses. Le gouvernement français tente de dépasser les limites de la méthodologie européenne "Product Environmental Footprint", contestée car jugée incomplète et trop favorable à la fast-fashion.

@Lucas Hoang via Unsplash
Bientôt un éco-score officiel pour les vêtements. Les étiquettes devront arborer dès 2024 en France une note environnementale, par exemple de A et E comme elle existe pour l'alimentation avec le nutri-score, en plus de la composition et des conseils de lavage. Prévu par la loi "Climat et résilience", cet éco-score doit aider les consommateurs à faire des choix plus éclairés. Le gouvernement et l'Ademe planchent sur le sujet et visent une première version de la méthode de calcul à l'été 2023.
Le calendrier est serré. Il faut, en quelques mois, répondre à de nombreuses questions, à commencer par le choix des critères de notation et leur pondération. Emissions de CO2, impact sur la biodiversité, consommation d'eau... les impacts environnementaux du secteur textile sont vastes et difficiles à résumer en une note. Pour tenter de trouver un consensus, le gouvernement a étudié 11 méthodes de calcul et d'affichage provenant d'acteurs variés comme La belle empreinte, Clear Fashion ou encore l'Union des Industries Textiles.
Prendre en compte l'ensemble des impacts environnementaux
Les résultats ont été publiés en mars 2023. Bérangère Couillard a annoncé huit critères à étudier plus en détail pour combler les limites des analyses de cycle de vie, une méthodologie de calcul des impacts environnementaux des produits sur l'ensemble de leur durée de vie, qui servira de socle à l'éco-score. Parmi ces critères se trouvent la consommation d'eau, l'utilisation de pesticides et de produits chimiques ou encore les rejets de microplastiques. Un autre critère concerne aussi la durabilité des vêtements et plusieurs concernent les actions des entreprises pour limiter la surconsommation de vêtements et mieux recycler et revaloriser les habits.
Une fois les critères définis, encore faut-il pouvoir mesurer les impacts réels de chaque entreprise plutôt que des moyennes. "Nous craignons que des marques avec un fort impact environnemental préfèrent ne pas communiquer leurs informations", alerte l'Union des Industries textiles, interrogée par Novethic. Ce syndicat du textile français souhaite que l'absence de données soit clairement indiquée et baisse la note. "Le but est aussi d'améliorer la traçabilité de la filière", explique Rym Trabelsi, fondatrice de Clear Fashion, à Novethic, qui partage cette philosophie.
Et les impacts sociaux ?
Les progrès à réaliser sont importants pour certaines matières, comme le coton, dont les filatures mêlent souvent des fibres de multiples provenances. Selon l'index de transparence de Fashion Revolution, la moitié des grandes marques ne communique pas sur ses fournisseurs. Le gouvernement n'a pour le moment pas fait d'annonce à propos des moyens de contrôler les informations données par les entreprises.
Et les impacts sociaux ? Ceux-ci ne sont pas, pour le moment, prévus dans l'éco-score textile. Toutefois, ils pourraient avoir leur place à côté si des informations complémentaires sont autorisées pour les marques. "Il existe des sources d'information de qualité comme l'Organisation Internationale du Travail ou le label GOTS qui est exigeant du point de vue social" explique Rym Trabelsi, qui a développé un scoring social dans l'application Clear Fashion.
Dépasser les écueils du PEF
L'éco-score textile devra éviter les écueils du Product Environmental Footprint (PEF), une méthodologie européenne de mesure d'impact lancée en 2013, qui agrège 12 critères différents. Elle a été jugée incomplète par la Commission européenne en mars 2023 à cause de son manque de prise en compte de certains éléments comme les impacts des rejets de microplastiques. Cette méthode, construite avec de nombreux acteurs de la fast-fashion, est accusée de favoriser les matières synthétiques et les modes de production agricoles intensifs et de ne pas prendre en compte la durabilité des vêtements.
Le secteur textile est l'un des deux premiers secteurs, avec l'alimentaire, à mettre en œuvre l'affichage environnemental. Celui-ci s'ajoute à l'obligation, depuis le 1er janvier 2023 pour les plus grandes entreprises, d'inscrire certaines mentions comme le lieu de réalisation des différentes étapes de fabrication ou encore la mention "rejette des microfibres plastiques dans l'environnement lors du lavage" lorsque plus de 50% du produit est composé de fibres synthétiques.