Publié le 23 octobre 2019
SOCIAL
[Brexit] Avec ou sans accord, le Brexit risque de peser durement sur les plus pauvres
Le revenu par tête des britanniques devrait chuter après le Brexit, prévient le think tank universitaire "The UK in a changing Europe". Alors que la pauvreté concerne un cinquième de la population, dont quatre millions de travailleurs, le Brexit devrait être ressenti encore plus durement par ces populations les plus vulnérables.

@CCO
Les populations les plus vulnérables risquent d’être les premières victimes du Brexit. Alors que le Premier ministre bataille pour faire voter l’accord de sortie obtenu avec Bruxelles, de nombreux observateurs alertent sur le niveau de pauvreté record au Royaume-Uni, qui risque de s’accentuer après la sortie de l’Union européenne.
Avec ou sans accord, le Brexit devrait réduire le niveau de vie général des britanniques. Le think-tank universitaire "The UK in a changing Europe" a modélisé l’impact des différents scénarios du Brexit sur le niveau de vie des anglais. Selon les calculs des auteurs, le revenu par tête baisserait de 6,4 % en cas d’accord suivant les propositions de Boris Johnson, soit un impact négatif d’environ 2000 livres par personne et par an, du fait des nouvelles règles commerciales avec l’Union européenne et de leur effet sur la productivité de l’économie. Sans accord, la baisse serait de 8,1 %, soit autour de 2500 livres par personne. Ces estimations sont des moyennes globales sur toute la population.
Accélération de la pauvreté
Philip Alston, le rapporteur des Nations-Unies sur l’extrême pauvreté et les droits de l’Homme, a publié un rapport au printemps 2019 sur le Royaume-Uni. Il estime qu’un cinquième de la population vit dans la pauvreté (environ 14 millions de personnes), notamment en raison des coupes budgétaires réalisées dans le filet de protection sociale. Les emplois peu payés et instables – notamment les contrats "zero hour" - expliquent en partie cela. Selon le rapport annuel de la Fondation Joseph Rowntree, 4 millions de personnes ayant un emploi, soit un travailleur sur huit, vivent sous le seuil de pauvreté, une augmentation de 500 000 personnes sur les cinq dernières années.
La perspective d’un no-deal, même si elle commence à s’éloigner, est celle qui effraie le plus les associations. Le plan B, intitulé "Operation Yellowhammer", commandé par le gouvernement britannique en cas de sortie sans accord l’écrivait noir sur blanc. Selon les auteurs, "les groupes à bas revenus seront affectés de manière disproportionnée par toute augmentation des prix de la nourriture et du carburant." Selon l’ONG Human Rights Watch, le gouvernement n’a cependant pas pris de mesures pour limiter l’impact social du Brexit.
L’Écosse prend les devants
"Le gouvernement du Royaume-Uni sait très bien que les prix alimentaires vont augmenter et que l’approvisionnement en nourriture pourrait se tendre. Mais au lieu de se préparer à aider les familles et leur dire à quoi s’attendre, il leur tourne le dos", déplore Kartik Raj, un chercheur de l’ONG Human Rights Watch.
En Écosse, nation dirigée le Scottish National Party (SNP), farouchement anti-Brexit, les préparations ont démarré. Fin septembre, une subvention additionnelle de 1 million de livres a été débloquée en direction des associations locales d’aides alimentaires, pour les aider à faire face au surcoût lié au Brexit. Le gouvernement écossais a également mis en place un plan d’actions en cas de sortie sans accord, prévoyant notamment la mise en place d’un Rapid Poverty Mitigation Fund (fonds d’atténuation rapide de la pauvreté) de 7 millions de livres.
Arnaud Dumas, @ADumas5