Publié le 21 septembre 2020
POLITIQUE
Pourquoi la mort de Ruth Bader Ginsburg fait vaciller la démocratie américaine
La mort de l'icône progressiste américaine Ruth Bader Ginsburg fait trembler les institutions américaines. Donald Trump souhaite remplacer, avant l'élection présidentielle prévue dans quelques semaines, la juge de la Cour suprême. Le but étant d'asseoir la domination des républicains de la plus haute instance juridique américaine. Mais en passant en force, le président prend le risque d'affaiblir un des piliers de la démocratie américaine.

White House
Son nom, en France, n’est pas connu de tous. Aux États-Unis, Ruth Bader Ginsburg est pourtant une icône. Une héroïne progressiste morte à l’âge de 87 ans des suites d’un cancer du pancréas. La juge de la Cour suprême a défendu avec vigueur l’égalité entre femmes et hommes, les droits des immigrés, l’avortement. Deuxième femme à siéger au sommet du pouvoir judiciaire américain, nommée en 1993 par Bill Clinton, son décès plonge les démocrates dans l’effroi.
Donald Trump, en nommant un nouveau juge conservateur, pourrait reprendre la main sur la Cour suprême, quelques semaines seulement avant l’élection présidentielle. RBG, comme ses partisans la surnomment, a pourtant émis comme dernier vœu de ne pas "être remplacée tant qu’un nouveau Président n’aura pas été installé". Mais le président américain assure qu'il nommera sa remplaçante d'ici la fin de semaine, une fois les obsèques passées.
Une décision malvenue alors que les sénateurs républicains avaient refusé de nommer un juge sous la présidence Obama prétextant que l’élection présidentielle était trop proche. Cette fois, Mitch McConnell, le président des républicains au Sénat (qui doit donner son accord), a déclaré se tenir prêt, même si quelques sénateurs républicains assurent qu'ils ne voteront pas avant l'élection de novembre.
Un test pour la démocratie américaine
"Un principe de base de la loi - et de l’équité au quotidien - est que nous appliquons les règles avec cohérence et non en fonction de ce qui est pratique et avantageux pour le moment", a fait valoir l’ancien président Barack Obama dans un communiqué.
Justice Ruth Bader Ginsburg fought to the end, through her cancer, with unwavering faith in our democracy and its ideals. That’s how we remember her. But she also left instructions for how she wanted her legacy to be honored. My statement: https://t.co/Wa6YcT5gDi
— Barack Obama (@BarackObama) September 19, 2020
La Cour suprême a un rôle primordial aux États-Unis. C’est elle qui a le dernier mot quant à la conformité avec la Constitution des décisions prises par les États américains. En passant en force, Donald Trump fait vaciller un des piliers de la démocratie américaine. Comme l’écrit le Financial Times, "un contrôle conservateur bien ancré ne vaut que si une grande partie du pays le considère comme bien acquis. Aucune des deux parties ne tire profit d'un tribunal qui ne parvient pas à obtenir un large consentement. Un processus de nomination hâtif et naïvement partisan compromettrait l'institution".
La spécialiste Anne Deysine, voit ici un test pour la démocratie américaine, un moment pivot. "S’il n’y a pas de résistance", "si les acteurs ne résistent pas (…) les démocraties meurent", déclare-t-elle dans Libération. "Si les institutions, si l’opinion publique laissent faire cela, cela veut dire que tous les mécanismes que les pères fondateurs avaient essayé de mettre en place ont disparu", ajoute-t-elle.
Marina Fabre, @fabre_marina