Publié le 16 juillet 2019
POLITIQUE
[Edito] François de Rugy, l’erreur de casting qui a enflammé l’attente de la société sur l’urgence écologique
Le choix de François de Rugy pour remplacer Nicolas Hulot devait apaiser les tensions à l’intérieur du gouvernement entre les plus et les moins engagés sur l’écologie. Mais loin de ce résultat, le passage de dix mois de l’homme au ministère n’a fait qu’attiser un feu qui s’est répandu dans la société civile. La solution pourrait venir d’une des secrétaires d’État et ministres du ministère - Brune Poirson, Emmanuelle Wargon et Élisabeth Borne – bien plus en phase avec l’attente des Français.

@AlexisCornu/HansLucas
Le 4 septembre 2018, Emmanuel Macron et Édouard Philippe ont mis François de Rugy, député EELV et Président de l’Assemblée générale, à la tête du ministère de la Transition écologique et solidaire. Un choix par défaut pour remplacer un Nicolas Hulot qui avait quitté, non sans un certain dégoût, le gouvernement dénonçant un système dont il se sentait prisonnier. Le choix du député écologiste pour prendre la place de numéro 2 du gouvernement permettait d’avoir une personnalité plus "gérable", mais force est de constater que ce fut une erreur.
Il ne s’agit pas tant des révélations du journal Mediapart sur le train de vie dispendieux de l’homme et désormais des soupçons de fraudes concernant l’utilisation de son indemnité de député. Les enquêtes en cours diront si François de Rugy est coupable de quoi que ce soit. Mais le politique n’a jamais incarné l’attente écologique voulue par les Français. Aujourd’hui, le fait qu’il démissionne uniquement sur les allégations d’un journal prouve sa fragilité.
La première faute est que François de Rugy n’a pas été en mesure de répondre à l’attente de la population sur l’environnement, élan qui a fait suite au départ de Nicolas Hulot. Lorsque ce dernier expliquait qu’il fallait concilier "les fins du mois et la fin du monde", François de Rugy n’a pas entendu l’alerte sociale qui donnera naissance quelques mois plus tard à la crise des gilets jaunes.
Trois femmes qui montent
Dans la foulée, c’est sous son exercice que la France a connu la pétition la plus signée de l’histoire concernant l’inaction climatique du gouvernement. Elle a conduit à attaquer l’État en justice. François de Rugy n’est jamais parvenu à trouver les mots justes, saluant le projet et dénonçant la méthode. Il n’entendra pas non plus le cri venu de la jeunesse française qui viendra manifester à plusieurs reprises sous les fenêtres du ministère.
À toutes ces crises, les réponses viendront du Premier ministre mais aussi des Secrétaires d’État. Car c’est ce qui couvait depuis plusieurs mois aux yeux des observateurs : la montée en puissance des trois femmes qui semblent bien plus à leur affaire sur les sujets écologiques et environnementaux que le patron de l’Hôtel de Roquelaure. On a d’une part Brune Poirson qui est en front sur les sujets de l’économie circulaire et de la finance durable, d’autre part Emmanuelle Wargon très engagée sur la rénovation énergétique et la ministre des Transports Élisabeth Borne qui mène l’ambitieuse loi Mobilités.
En septembre dernier, en cherchant un remplaçant à Nicolas Hulot, le duo Macron-Philippe avait fait le tour de la société civile et politique pour trouver un profil adéquat en vain. A posteriori, nos deux chasseurs de têtes ont sans doute laissé passer l’opportunité de nommer Pascal Canfin, alors patron du WWF France. Médiatique, ayant un pied dans la politique et un autre dans la société civile, il aurait fait un pont entre ce gouvernement et l’élan écologiste de la population. Mais la fenêtre de tir est refermée. Celui-ci est désormais à la tête de la Commission Environnement du Parlement européen, après s’être engagé dans la calamiteuse campagne de Nathalie Loiseau (LREM).
Ludovic Dupin @LudovicDupin