Publié le 07 avril 2020
POLITIQUE
Coronavirus : les assureurs appelés à s'engager de plus en plus dans l'effort de solidarité nationale
Alors qu'ils viennent de verser 200 millions d'euros dans le fonds de solidarité dédié aux entreprises en difficulté et que les initiatives se multiplient comme la Maif qui va reverser 100 millions d'euros à ses abonnés, le gouvernement appelle le secteur à aller plus loin. Les entreprises et l'Éxécutif pressent les assureurs de proposer un nouveau dispositif pour couvrir, à l'avenir, les catastrophes sanitaires. Le patron d'Axa a d'ores et déjà proposé un "régime spécial pandémie" calqué sur le modèle des catastrophes naturelles.
@Palazoo
[Mise à jour le 7 avril] C’est une bonne nouvelle qui pourrait redorer le blason des assureurs, critiqués de toutes parts depuis le début de la crise du Coronavirus pour leur manque d’implication dans l’effort de solidarité nationale. La mutuelle d’assurance Maif vient en effet d’annoncer verser plus de 100 millions d’euros à 2,8 millions de ses assurés pour leur automobile. En cause : la chute exceptionnelle de 75 % des accidents de la route. Cette somme représente près d’une année de résultat net, note l’AFP puisque la Maif avait dégagé un bénéfice de 127 millions d’euros en 2018.
"Il s’agit avant tout d’un choix de solidarité cohérent avec notre modèle mutualiste", explique dans Ouest France Dominique Mahé, président du groupe Maif qui invite ses adhérents à "reverser cette somme sous forme de don" aux hôpitaux grâce à une plateforme créée pour l’occasion. Le 23 mars, la Fédération française de l’assurance (FFA) avait également fait un pas en ce sens. Elle avait annoncé verser 200 millions d’euros au fonds de solidarité mis en place par le gouvernement. Ce dernier dédié aux entreprises les plus impactées, représente deux milliards d’euros par mois de dépenses publiques.
"Il faut préserver la solvabilité du secteur"
Une mesure de soutien qui ne semble pas suffisante. Lors d’une audition au Sénat, la secrétaire d’État à l’Économie, Agnès Pannier-Runacher a de nouveau demandé, aux assureurs, le 2 avril, "d’aller plus loin" et d’augmenter leur contribution au fonds. Ce à quoi la présidente de la FFA rétorque que les initiatives de solidarité des assureurs se chiffrent en fait à des milliards d’euros. "Au total, si l’on prend toutes ces mesures (dons de centaines de milliers de masques, financement d’hôpitaux et de la recherche, plateforme d’entraide, assistance scolaire et soutien psychologique gratuits…) l’impact pour l’assurance se chiffre déjà à plus de trois milliards d’euros", note Florence Lustman dans une tribune.
D'autres patrons d'assurances grincent des dents sur les efforts supplémentaires qui leur sont demandés. Un patron d'une grande assurance française reconnaît volontiers que les assurances scolaires et les assurances voitures lui font gagner beaucoup d'argent en ce moment. Mais il précise que cela n'est rien au regard des pertes dues à la chute des marchés, près de 250 milliards pour l'ensemble de la profession selon ses sources.
Changement climatique et cyberattaques
Ce que demandent les entreprises et quelques députés, c’est que les assurances prennent en charge les pertes d’exploitation des entreprises. Or ces pertes représentent des sommes considérables. "Il faut préserver la solvabilité du secteur", prévient le patron de Generali France, Jean-Laurent Granier, dans BFM Business.
Pour éviter que cette situation ne se reproduise, le gouvernement a invité les assureurs à plancher sur un nouveau produit qui permettrait de couvrir les catastrophes sanitaires à l’avenir. Le patron d'Axa, Thomas Buberl, a déjà évoqué la création d'un "régime d'assurance pandémie", inspiré de celui sur les catastrophes naturelles, qui appartiendrait à moitié à l'État et à 50 % à un "pool d'assureurs privés".
"On encaisserait chaque année des primes qui seraient mises en réserve. En cas de crise, les assureurs paieront jusqu'à deux à trois fois le montant des primes, ll'État prenant le relais au-delà", a-t-il proposé dans le Journal du dimanche. "L'un des enseignements de cette pandémie est que le monde n'était pas assez préparé et ne s'est pas assez coordonné", a-t-il fait valoir. D'autant que les assureurs ne doivent pas seulement faire face au risque croissant de pandémie, ils doivent également se préparer massivement au changement climatique et à la hausse de la cybercriminalité.
Marina Fabre, @fabre_marina