Publié le 17 mai 2019
GOUVERNANCE D'ENTREPRISE
Le 18 mai, une marche mondiale contre Bayer-Monsanto, revigorée par les déboires de la firme
Monsanto, entreprise la plus détestée au monde ? La firme, qui a perdu son nom de marque après avoir été rachetée par Bayer, symbolise pour beaucoup les dérives des multinationales de l'agro-industrie. Pour la septième année consécutive, une marche mondiale la ciblant va se dérouler le 18 mai. Les organisateurs comptent s'appuyer sur la mobilisation climat de ces derniers mois pour lui donner un nouveau souffle. D'autant que le contexte leur est favorable, Monsanto perdant ses procès l'un après l'autre.

En 2016 des manifestations avaient éclaté pour dénoncer le "mariage des affreux" entre Bayer, géant de l'agrochimie", et Monsanto, pilier de l'agroindustrie.
Même disparu, Monsanto continue de cristalliser les tensions. Ce 18 mai, une marche mondiale est organisée contre le géant des OGM, récemment racheté par Bayer. C’est la septième marche du genre. Mais cette année, elle prend une tournure particulière. La firme, qui a perdu son nom dans le mariage avec l'entreprise allemande, est au cœur de l'actualité. Elle vient d'être condamnée à payer deux milliards de dollars à un couple d'Américains atteint de cancers qu'ils imputent au Roundup, l'herbicide phare de l'entreprise. C'est le troisième procès qu'elle perd à ce sujet aux États-Unis et 13 400 procédures similaires sont en attente.
"Le contexte de la marche n'a jamais été aussi favorable", se réjouit Tom Baquerre, coordinateur de l'évènement et membre du collectif Combat contre Monsanto. Certes, la mobilisation ne sera peut-être pas aussi intense que la première marche, organisée en 2013. Celle-ci avait réuni 2 millions de personnes dans le monde. Mais "il y a un regain de mobilisation", atteste Tom Baquerre. Cette année, Toronto, Bâle, Hambourg, Paris et 36 villes françaises ont répondu à l'appel...
S'appuyer sur la mobilisation climat des derniers mois
Les organisateurs comptent s'appuyer sur la mobilisation sur le climat qui a poussé des millions de personnes à défiler ces derniers mois. Les jeunes d'abord avec l'appel de Greta Thunberg à la grève scolaire mais aussi les partisans de l'Affaire du siècle, cette pétition qui vise à faire condamner l'État pour inaction climatique. Suivant cette tendance fédératrice, 89 associations environnementales ont signé une tribune publiée chez nos confrères de France TV Info pour appeler les citoyens à se déplacer contre Monsanto-Bayer ce 18 mai.
"La marche mondiale contre Monsanto-Bayer est l’occasion de dénoncer un modèle agricole qui va dans le mur", écrivent-elles, "L’agriculture intensive et industrialisée est dépendante à la fois des OGM et des produits de synthèse dont nous ne voulons pas : pesticides et engrais qui tuent la biodiversité. Elle est sous la coupe de multinationales (Monsanto-Bayer, Syngenta, BASF, Dow Chemical, DuPont, ChemChina, Limagrain…) qui s’approprient ou tuent le vivant", dénoncent le Réseau Action Climat, Greenpeace, WWF, Nous voulons des coquelicots, Générations futures…
Interdiction du glyphosate et révision de la PAC
Si Bayer-Monsanto est particulièrement visé, la portée est plus large. Les organisateurs ciblent trois objectifs. D'abord une réforme en profondeur de la prochaine Politique agricole commune (PAC) 2021-2027. Les associations souhaiteraient que les aides soient distribuées en priorité aux agriculteurs "écologiques, respectueux de la santé des personnes et de la biodiversité".
Ensuite, l'interdiction immédiate du glyphosate. "On a déjà gagné la bataille de l'opinion sur le glyphosate", croit Tom Baquerre, "maintenant il faut ça se traduise dans la loi". Pour rappel, les États membres ont renouvelé la licence du glyphosate, principal agent actif du Roundup, pour cinq ans, en novembre 2017. La France, elle, s'est engagée à en sortir d'ici 2021... mais avec des exceptions. Certains agriculteurs seront autorisés à utiliser l'herbicide tant qu'ils ne trouveront pas d'autres alternatives.
Enfin, "nous voulons un encadrement stricte du lobbying en France et en Europe", demande Tom Baquerre. Une demande qui fait écho à une nouvelle révélation. En 2016, lors du débat sur le renouvellement de la licence du glyphosate dans l'Union européenne, Monsanto aurait fiché des centaines de personnalités selon leur position sur l'herbicide, en utilisant des données personnelles. Un fichage illégal pour lequel plusieurs journalistes, associations et scientifiques visés ont décidé de porter plainte. Bayer a présenté ses excuses et admis que ce fichage a eu lieu dans toute l'Europe.
Marina Fabre, @fabre_marina