Publié le 07 octobre 2019
GOUVERNANCE D'ENTREPRISE
Crise des opiacés : Purdue Pharma se déclare en faillite pour échapper à la justice
Purdue Pharma, fabricant d'un des principaux médicaments antidouleur aux opiacés, l'OxyContin, vient de se déclarer en faillite. Le groupe fait l'objet de plus de 2 000 plaintes aux États-Unis, un pays où ces médicaments sont accusés d’avoir provoqué la mort de 400 000 personnes sur les vingt dernières années.

@stevepb
Quelques semaines après l’amende record demandé au laboratoire Johnson & Johnson, nouveau rebondissement dans le monde pharmaceutique lié à la crise des opioïdes. Le groupe américain Purdue Pharma a annoncé le 16 septembre une série de mesures, dont sa mise en faillite et le retrait de ses propriétaires, la famille Sackler.
Objectif pour le groupe : solder l'avalanche de litiges qui le menacent. Purdue Pharma, fabricant d'un des principaux médicaments antidouleur aux opiacés, l'OxyContin, fait l'objet de plus de 2 000 plaintes. Si le montage annoncé lundi était accepté, toutes les plaintes seraient "résolues", y compris celles émanant de municipalités ou d'États, et Purdue se verrait "déchargé de manière pleine et permanente" de tout litige, explique le groupe sur son site.
En vertu d'un accord passé avec notamment 24 procureurs d'État, mais qui reste soumis à l'approbation d'un tribunal, les Sackler vont donc transférer « la totalité de (leurs) actifs à un trust ou à une autre entité établie au bénéfice des plaignants et de la population américaine », selon le communiqué du groupe. Ce montage doit permettre de dégager quelque 10 milliards de dollars que le laboratoire s'engage à consacrer à la lutte contre la crise des opiacés.
Débloquer les ressources nécessaires au traitement des addicts
Le laboratoire est accusé d'avoir poussé le corps médical à surprescrire son médicament phare, alors qu'il connaissait ses effets addictifs, et ainsi d'avoir participé à la dépendance croissante des Américains aux opiacés, poussant ces consommateurs vers des drogues plus fortes comme le fentanyl et l'héroïne.
Le président de Purdue, Steve Miller, a précisé dans le communiqué que cet accord permettrait de débloquer "des ressources essentielles aux collectivités de tout le pays qui tentent de faire face à la crise des opiacés". Le groupe a déclaré être contraint, pour tourner la page de cette crise, de se placer sous la protection de la loi américaine sur les faillites, dit "Chapitre 11". Il a précisé que le conseil d'administration d'une nouvelle entreprise serait choisi par les plaignants avant d'être approuvé par le tribunal des faillites.
Cette nouvelle société s'engagerait à distribuer, gratuitement ou à très faible coût, des médicaments permettant de traiter les overdoses dues aux opiacés, ainsi que les addictions. Elle s'engagerait également à respecter des restrictions sur la vente et la publicité de traitements aux opiacés.
La famille Sackler met la main au portefeuille
La famille Sackler, propriétaire du laboratoire, a bâti sa fortune – estimée par le magazine Forbes à 13 milliards de dollars- sur l'OxyContin. Très influente dans le ghota new yorkais et mécène de plusieurs institutions dont le Louvre , elle a vu sa réputation ternie par la crise des opiacés, et plusieurs manifestations et actions dans le monde ont eu lieu pour dénoncer leur responsabilité dans cette crise.
En plus de l'abandon du contrôle de Purdue, la famille Sackler, a donc déclaré qu’elle versera, à titre privé, "au moins 3 milliards de dollars". Mais la famille reste dans le viseur de la procureure de l’État de New York. Lors d’une enquête sur Purdue Pharma, celle-ci a révélé des transferts d’argent de l’ordre d’un milliard de dollars vers la Suisse.
La rédaction avec AFP