Publié le 19 mai 2015
FINANCE DURABLE
Risque climatique : les 500 plus grands investisseurs mondiaux sous pression
Dans le cadre de la Climate Week, l'ONG AODP (Asset Owner Disclosure Project) présente son "Global Climate 500", un classement annuel des 500 plus gros investisseurs institutionnels mondiaux, portant sur leur gestion du risque climatique. Près de la moitié de ces investisseurs ont reçu, fin avril, un carton rouge dans ce domaine et pourraient être poursuivis en justice pour manquement à leur obligations fiduciaires. Explications.

AODP
Julian Poulter, créateur de l’Asset Owner Disclosure Project, est à Paris cette semaine pour la Climate week. Il vient défendre son indice "Global Climate 500", un classement des 500 plus grandes institutions financières mondiales sur l’intégration des conséquences économiques et financières de changement climatique dans leur gestion.
Amener les investisseurs à prendre en compte le risque climatique
Ces fonds de pensions, assureurs, etc. pèsent ensemble 40 000 milliards de dollars. Pour Julian Poulter, ils détiennent une clef essentielle dans la lutte contre le changement climatique. "L’urgence est telle qu’il est impossible de continuer à avoir une économie financière intrinsèquement liée aux énergies fossiles. Nous savons que si les 500 investisseurs institutionnels que nous notons mettaient en œuvre des programmes ambitieux de prévention des risques climatiques, nous serions à un point de basculement. Cela permettrait d’espérer rester à deux degrés de réchauffement climatique en 2050."
On est encore très loin de cette ambition. Seule une quinzaine d’acteurs (fonds de pensions américain, norvégien, britannique ou néerlandais et un assureur, Aviva) obtiennent la meilleure note, un AAA. Près de la moitié des 500 institutions financières ne reçoivent qu’un carton rouge, signe de leur indifférence au sujet.
Et pourtant ils seront peut-être bientôt obligés de s’emparer du sujet. L’AODP s’est associée à une autre ONG, Client Earth, pour étudier la possibilité d’entamer des poursuites judiciaires. "Il faut trouver les bases juridiques permettant de démontrer que l’inaction sur le climat de ces institutions financières met en risque leurs bénéficiaires" explique Julian Poulter. "C’est un travail de longue haleine, pour lequel nous avons lancé ensemble la 'Climate and Pensions Legal Initiative' (CPLI) qui nous permettra, si tout va bien, de passer à l’action à l’automne 2015".
Le projet de loi sur la transition énergétique, clé du débat en France
En France, le débat prend une autre tournure, et se focalise sur les obligations prévues dans le projet de loi sur la transition énergétique qui revient devant l’assemblée nationale à partir du 19 mai.
En l'état, le texte prévoit une disposition incitant les institutions financières à "évaluer les risques liés au changement climatique auxquelles elles sont exposées pour l’ensemble de leurs actifs". Une autre disposition prévoit de flécher les financements verts dans les rapports annuels à destination des bénéficiaires, cotisants ou souscripteurs. Ils devront se fixer un objectif de 5 % en 2016 et de 10 % en 2020 ou expliquer pourquoi ils ont été dans l’impossibilité de les atteindre.
À deux reprises dans les précédentes étapes législatives, ces dispositions ont été écartées du texte final, mais il est possible que le gouvernement veuille donner un signal à moins de 200 jours de la COP 21 et soutienne ces dispositions. Elles feraient de la France le premier pays à se doter d’une législation incitant fortement les investisseurs nationaux à financer la transition et lutter contre le changement climatique.