Publié le 17 avril 2020
FINANCE DURABLE
Polémique autour du mandat de BlackRock, choisi comme expert environnement et social auprès de la Commission européenne
La Commission européenne vient d’engager BlackRock, le plus gros gestionnaire d’actifs du monde, pour l’aider à appliquer les critères Environnementaux, sociaux et de gouvernance dans l’activité des banques. Une décision qui a fait bondir l’ONG Finance Watch, qui estime que BlackRock est juge et partie dans l’opération, ainsi que plus de 80 eurodéputés de tous bords qui ont adressé une question écrite à la Commission.

@Wikicommons
La Commission européenne vient de confier une mission à BlackRock pour la mise en place de son plan sur la finance durable. La société de gestion américaine, qui gère plus de 7000 milliards de dollars d’actifs, a remporté un appel d’offre de la DG FISMA (direction générale à la stabilité financière, services financiers et union des marchés de capitaux) visant à mieux intégrer les risques environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) dans la gestion des banques.
Selon l’appel d’offres, le travail de recherche de BlackRock devra répondre à trois objectifs. Il devra étudier les moyens pour mieux intégrer la prise en compte des risques ESG dans les procédures de gestion des risques des banques européennes. Il devra également déterminer comment intégrer ces risques dans la supervision de ces établissements. Et enfin comment intégrer les critères environnementaux, sociaux et de gouvernance dans les décisions d’octroi de crédit ou d’investissement des banques.
Il s’agit donc d’une mission cruciale pour la Commission, qui veut justement renforcer sa stratégie finance durable. Elle ambitionne de transformer le modèle des banques, tant sur leur fonctionnement interne que sur leurs activités commerciales, afin de le rendre plus durable. C’est justement pour cela que le résultat de cet appel d’offres a suscité une vive polémique.
Une mission cruciale
L’organisation Finance Watch, qui lutte contre les dérives de la finance, a été la première à s'émouvoir de la décision de la Commission européenne. Elle déplore le fait que BlackRock ait critiqué la politique sur la finance durable de la Commission européenne. Notamment la taxonomie des activités vertes, mais aussi sur l’impact des entreprises sur le changement climatique. "BlackRock est clairement juge et partie dans ce débat. Il y a surement un moyen pour annuler cette décision", assène Benoît Lallemand, le secrétaire général de Finance Watch.
Les députés européens s'alarment également du choix de BlackRock. En tout, 85 d'entre eux issus de plusieurs groupes politiques différents (les centristes de Renew Europe, les verts, les sociaux démocrates) ont adressé une question écrite à la Commission. "Décider de procéder à des appels d'offres sans prendre en compte les enjeux politiques, la question des conflits d'intérêts, la nécessaire indépendance des consultants est une faute", estime Pascal Durand, le député Renew Europe à l'origine de l'initiative.
La Commission européenne se défend en disant que les règles des appels d'offres européens ont été respectées. Selon elle, le rapport que rendra BlackRock ne sera qu'une des consultations effectuées pour mettre en oeuvre son plan sur la finance durable.
Arnaud Dumas, @ADumas5