Publié le 08 juin 2017
FINANCE DURABLE
L'Europe va aligner la finance sur l'objectif 2°C
Le groupe d’experts européen sur la finance durable, lancé par la Commission européenne, travaille activement sur une première série de recommandations qui seront présentées dans un rapport intermédiaire mi-juillet. Quelques jours auparavant, la Task Force sur le reporting climatique, mise en place par le Conseil de stabilité financière, doit de son côté présenter son rapport final en amont du G20 des 7 et 8 juillet. Objectif commun des deux initiatives : transformer le système financier pour le rendre compatible avec un monde à +2°C.

ACHT
Jamais un groupe n’a été aussi actif au sein de la Commission européenne, assure-t-on à Bruxelles. Le groupe d’experts de haut niveau sur la finance durable (High Level Expert Group, HLEG)*, lancé par la Commission européenne en octobre dernier, s'est réuni pour la quatrième fois les 7 et 8 juin pour finaliser l'élaboration de ses premières recommandations. Un rapport intérimaire sera rendu public le 18 juillet. Et le rapport final est attendu à la fin de l’année.
L’objectif est de "Développer une place financière qui prenne en compte les critères de durabilité et qui contribue notamment à la lutte contre le changement climatique afin d’atteindre les objectifs environnementaux et sociaux de l’Union européenne", résume Philippe Zaouati, DG de Mirova et membre du HLEG.
15 propositions sur la table
Concrétement, la direction des marchés financiers de la Commission européenne a posé trois questions au groupe d’experts : qu’est-ce qu’un système financier soutenable ? Comment intégrer les critères de soutenabilité dans la régulation européenne ? Comment mobiliser plus de flux de capitaux pour aller vers une société bas-carbone ?
"Actuellement, une quinzaine de propositions sont sur la table", confie Pascal Canfin, directeur France du WWF et membre du groupe d’experts. "Le rapport intermédiaire reprendra les plus consensuelles, ensuite nous aurons peut-être recours au vote pour nous mettre d’accord. Un des sujets en débat porte par exemple sur l’obligation pour les indices de type CAC40 de mesurer leur empreinte carbone."
"Une fois le rapport publié, outre les recommandations qui seront reprises par les États membres, nous aurons surtout besoin d’un véritable engagement de tout le secteur", complète Christian Thimann, directeur de la régulation, responsabilité d’entreprise et prospective du groupe Axa finance, président du groupe d’experts européen et vice-président de la Task Force on Climate Disclosure (TCFD).
Avancer sans le régulateur américain
Cette Task force spécialisée sur le reporting climat a été lancée fin 2015 par le Conseil de stabilité financière du G20. Elle a fait 11 recommandations qui auraient dû être adoptées en mars par les ministres des Finances du G20 et qui devaient en principe l’être par les chefs d’État et de gouvernement lors du G20 des 7 et 8 juillet. Mais l’annonce par Donald Trump de la sortie des États-Unis de l’Accord de Paris change la donne.
"Nous n’attendons plus grand-chose du G20, affirme Christian Thimann. Nous pensons qu’il sera plus efficace de nous adresser directement aux entreprises, en contournant le régulateur, afin de continuer à avancer et ne pas perdre la dynamique". "Les recommandations de la TCFD pourraient être endossées par un G16 ou 17", espère tout de même Pascal Canfin.
Par ailleurs, le HLEG a tenu à saluer la publication ce 8 juin par l’Union européenne du Capital Markets Union (CMU) mid-term review. Cette initiative lancée en septembre 2015 va permettre de proposer aux entreprises une alternative aux prêts bancaires à travers les marchés boursiers et obligataires. "C'est une avancée significative pour créer un système financier plus durable, qui soutient une transition vers une économie bas carbone, plus efficace sur les ressources, et responsable", jugent les experts du HLEG.
Concepcion Alvarez @conce1
*Anne-Catherine Husson-Traore, directrice générale de Novethic, en est l'une des 20 membres