Publié le 29 janvier 2019
FINANCE DURABLE
Investissements verts non cotés, des opportunités mais peu de convictions
Près de 60 milliards d’euros sont investis dans les actifs verts non cotés en Europe par 223 fonds. C’est ce qui ressort de la nouvelle étude sur les fonds d'actifs verts non cotés réalisée par Novethic en partenariat avec l’Ademe. Une classe d’actifs qui intéresse les investisseurs plus pour sa rentabilité que pour son impact positif sur l’environnement. Le développement des obligations de reporting climat et de labels européens pourrait peut-être réveiller leur fibre verte.

@Novethic
Le non coté s’intéresse aussi aux actifs verts. La dernière étude du centre de recherche de Novethic et de l’Ademe a recensé quelque 223 fonds européens dédiés à l’environnement, avec 57,6 milliards d’euros d’actifs verts sous gestion. Un chiffre en progression constante particulièrement depuis l’année 2016, l’effet COP21 ayant donné un coup d’accélérateur aux levées de fonds.
Le thème des énergies renouvelables demeure le plus porteur auprès des sociétés de gestion, avec 122 véhicules financiers dédiés et près de 46 % des montants (27 milliards d’euros). En termes de typologie de classe d’actifs, les fonds infrastructures dominent largement le marché et emportent 76 % du total des fonds verts.
La somme des actifs verts sous gestion reste modeste, elle ne représente que 6,5 % du total des encours non cotés européens. Elle est pourtant bien plus élevée que celle des fonds verts cotés, qui atteignait 32,2 milliards d’euros en 2017, soit un peu moins de 1 % des encours européens.
Selon le plan sur la finance durable lancé par la Commission européenne, les besoins supplémentaires de financements verts nécessaires pour atteindre les objectifs de la transition écologique tournent autour de 180 milliards d’euros par an d’ici 2030. Même en additionnant le coté et le non coté, le compte n’y est pas…
Des retours attractifs
"C’est clairement l’attractivité financière qui attire les investisseurs, plutôt que la volonté d’investir dans une stratégie environnementale", estime Dominique Blanc, directeur du centre de recherche de Novethic. Les fonds infrastructures non cotés dans les énergies renouvelables offrent en effet des rendements attractifs et peu risqués pour les investisseurs, autour de 8,9 % pour les parcs en activité et jusqu’à 13,3 % pour un projet en développement.
Conséquence, les investisseurs plus attirés par leur retour financier, sont peu intéressés par le suivi des objectifs environnementaux de ces actifs. "Le thème de l’énergie verte est plus opportuniste qu’un véritable focus pour nos investisseurs, confirme Jean-Francis Dusch, directeur de la gestion de dette infrastructures chez Edmond de Rotschild asset management à Londres. Ils sont intéressés par notre label Transition énergétique et écologique pour le climat (TEEC - dont Novethic est auditeur, ndr), mais ils veulent avant tout s’assurer que nous sommes capables de diversifier nos investissements."
Le marché commence toutefois à évoluer. "De plus en plus d’investisseurs institutionnels créent une poche dédiée aux investissements verts", remarque Stéphanie Chrétien, associée chez Demeter, la société de gestion spécialisé dans l’investissement vert. Deux éléments expliquent cela, selon elle, la prise de conscience environnementale de la part du grand public, des pouvoirs publics et des grandes entreprises, mais aussi l'accélération des innovations technologiques. "Elles permettent des solutions qui combinent rentabilité et impact", souligne-t-elle.
Redynamiser les labels
Autre facteur de dynamisme : le regain d’intérêt que pourrait connaître le reporting climat. Des investisseurs institutionnels publics, comme la Banque européenne d’investissement (BEI), demandent déjà des informations détaillées aux fonds dans lesquels ils investissent. Le plan sur la finance durable de la Commission européenne prévoit par ailleurs de renforcer les exigences de transparence en matière de pratiques ESG de la part des investisseurs institutionnels, de quoi les pousser à s’intéresser plus activement aux fonds verts.
Pour boucler la boucle, la Commission européenne travaille sur un Ecolabel européen qui permettrait de flécher plus facilement les fonds vers des actifs environnementaux. "Cet Ecolabel s’inspirera-t-il du label TEEC français ? Nous l’espérons et nous faisons tout pour", confie Elise Calais, sous-directrice de la responsabilité environnementale des acteurs économiques au ministère de la Transition écologique et solidaire.
Le label TEEC, créé en 2015, a été attribué à 14 fonds non cotés représentant près de 3 milliards d’euros. Reste qu’il souffre encore d’un déficit de notoriété. "Nous aurons intérêt à être embarqués dans l’Ecolabel s’il ne demande pas trop d’adaptation", estime Elise Calais. En attendant, le ministère prévoit de revoir la communication autour du label TEEC courant 2019, en réfléchissant à un nouveau logo.
Arnaud Dumas @Adumas5