Publié le 19 octobre 2016
FINANCE DURABLE
Climat : le financement Nord-Sud au coeur des négociations
En amont de la COP22, qui se tiendra du 7 au 18 novembre prochain au Maroc, l’OCDE publie un rapport pointant le manque de financements du Nord vers le Sud. Malgré une nette augmentation, le compte n'y est toujours pas. Il fait état de 67 milliards de dollars mobilisés. Un montant qui reste inférieur aux 100 milliards de dollars annuels promis par les pays développés aux pays en développement pour lutter contre les effets du réchauffement global et accélérer leur transition énergétique. Décryptage.

Stringer / AFP
Un chiffre cristallise les négociations internationales sur le climat : la mobilisation, d’ici 2020, d’une enveloppe de 100 milliards de dollars annuels promis par les pays développés aux pays en développement. Une promesse exprimée une première fois en 2009 lors de la conférence de Copenhague et réitérée lors de la COP21.
Une promesse faite au nom de la justice climatique : la lutte contre le réchauffement de la planète doit reposer en premier lieu sur les épaules des pays du Nord, dont le développement économique a été assuré par les énergies fossiles. Et bénéficier aux pays du Sud, les premiers affectés par le dérèglement climatique, mais dont la vulnérabilité économique ne permet pas d’en compenser les impacts.
Quelle mobilisation du secteur privé ?
Le document de 40 pages publié par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) à l'occasion de la "pré-COP22" (la réunion ministérielle préparatoire à la prochaine conférence internationale sur le climat) montre qu’à trois semaines d’un sommet mondial sur le climat qui veut être celui de la concrétisation et de l’action, les flux agrégés de financements publics s’élèvent à 67 milliards de dollars. Un progrès par rapport aux 61,8 milliards de dollars (un mix de fonds publics et privés) répertoriés en 2015, mais une somme toujours insuffisante par rapport aux engagements pris par les pays développés.
Par ailleurs, l’OCDE n'avance aucun chiffre relatif aux financements du secteur privé, un scénario pourtant largement mis en avant dans les négociations sur le climat : l’argent public doit avoir pour principal objectif de servir de levier pour les financements privés. En fait de chiffres concrets, l’organisation établit plutôt plusieurs projections, qui vont de 77 à 133 milliards, avec une hypothèse médiane de 92 milliards. Les fonds privés pourraient ainsi dépasser au total les 100 milliards en 2020, note le rapport.
Une vision optimiste que relaie Ségolène Royal, ministre de l’Environnement et présidente de la COP21, à qui fut remis le rapport, ainsi qu’à Michel Sapin, ministre de l’Économie et des finances. Elle compte précisément sur cet effet de levier et déclare à l’AFP que "le privé va aller beaucoup plus vite et plus loin qu'on le pense".
300 milliards de dollars de coûts d’adaptation d’ici 2030
La présentation du rapport coïncide avec la publication par les pays du Nord d’une feuille de route par l’Australie et la Grande-Bretagne. "Nous sommes confiants et pensons que nous remplirons l'objectif des 100 milliards de dollars à travers une variété de sources et réaffirmons notre engagement à le faire", souligne le document, signé par 38 pays développés.
Une initiative saluée par Armelle Le Comte, chargée de plaidoyer climat et énergie à Oxfam France, pour qui "la publication de cette feuille de route – qui s’est longtemps fait attendre – est une avancée dans la lutte contre le changement climatique". Mais elle juge son contenu décevant : "Même si elle prévoit que le financement de l’adaptation devrait doubler d’ici 2020 (par rapport à 2013-2014), cela reste largement insuffisant au regard des besoins sur le terrain. L’adaptation n’atteindrait en 2020, malgré cette augmentation, que 20% des 100 milliards de dollars promis. L’ONU estime que les coûts de l’adaptation pourraient atteindre d’ici 2030 entre 140 et 300 milliards de dollars dans les pays en développement".
Un volet hautement sensible de la finance verte, dont les acteurs privés auront l’occasion de débattre lors du Climate Finance Day, qui se tiendra le 4 novembre à Casablanca.