Publié le 15 juillet 2016
FINANCE DURABLE
Climate Finance Day : attirer la finance verte vers l’Afrique
L'Afrique reste le parent pauvre de la lutte contre le changement climatique. Un paradoxe, puisque le continent sera le plus impacté par ses conséquences. De nombreuses initiatives voient le jours ou sont en train d'être mises en place afin que les financements affluent vers les projets d'adaptation au réchauffement global et permettent de financer la transition énergétique.

Paris Europlace
"Alors que L’Afrique est la plus vulnérable au changement climatique, elle ne reçoit que 4% des financements liés au climat. Elle n’est pas sur les radars de ceux qui investissent 15 à 20 milliards de dollars par an dans des projets verts." Saïd Ibrahimi, qui dirige la place financière de Casablanca, s’exprimait dans le cadre des Rencontres financières de Paris Europlace.
Organisées début juillet, elles ont, en partie, mis l’accent d’une part sur la finance verte et d’autre part sur l’Afrique. L’idée est d’utiliser le fait que la COP22 se tient au Maroc en fin d’année, pour "sensibiliser davantage les acteurs internationaux de la finance climatique sur les enjeux et les opportunités climatiques du continent". Saïd Ibrahimi ajoute : "Les besoins de financement sont particulièrement importants pour les énergies renouvelables et l’efficacité énergétique, mais l’usage des terres et l’adaptation des sols sont tout aussi cruciaux alors que 7 Africains sur 10 sont des agriculteurs."
Au-delà du Climate finance Day, organisé le 4 novembre prochain à Casablanca en partenariat avec I4CE et Paris Europlace, la place financière de Casablanca espère jouer un rôle majeur dans le développement de la "finance climat africaine". Elle mise sur plusieurs leviers pour attirer des financements verts sur le continent. Le premier est de contribuer au développement de recherches, d’expertises et de savoir-faire "finance climat", qui permettent de rendre "bancables" les projets africains.
9 think tanks sur... 300 localisés en Afrique
Aujourd’hui sur les 300 think tanks mondiaux dédiés au climat, 9 seulement sont dédiés et localisés en Afrique. Le second levier consiste à étendre des initiatives favorisant une économie plus durable adoptées par le Maroc comme le programme Adaptation for African Agriculture (AAA). Centré sur la fertilité des sols, la maîtrise durable de l’eau dans l’agriculture et l’amélioration de la gestion des risques climatiques, il offre des solutions de préservation du climat.
Enfin la place financière de Casablanca mise sur l’investissement responsable. Elle veut lancer, pendant la COP22, un Forum de l’investissement responsable africain réunissant les acteurs du continent qui veulent encourager la prise en compte de critères environnementaux et sociaux dans la gestion financière.
L’African SIF aura pour mission de développer les bonnes pratiques au sein des entreprises et des acteurs financiers qui sont de plus en plus nombreux en Afrique.
Faire mieux dialoguer Afrique anglophone et Afrique francophone
Le continent n’est pas une terre vierge pour l’investissement responsable. L’Afrique du Sud a été pionnière. Sa place boursière demande aux entreprises cotées un reporting sur des critères ESG depuis une dizaine d’années. Aujourd’hui, l’initiative Sustainable Stock Exchanges, qui rassemble les bourses ayant ce type d’exigences auprès des entreprises cotées, compte une dizaine de signataires africains, dont la bourse de la Tunisie ou du Nigéria. "C’est très utile pour nous aider à pousser les bonnes pratiques au sein des entreprises", explique Edoh Kossi Amenouve, le directeur général de BRVM, bourse régionale basée à Abidjan qui rassemble 8 pays de l’Afrique de l’Ouest. Il souligne la nécessité d’encourager les entreprises à développer la mesure de leurs émissions de gaz à effet de serre, ce qui reste très rare.
Le ton est à l’optimisme même si le plus grand obstacle pour que l’Afrique puisse asseoir son développement actuel sur de bonnes bases, en lien avec les Objectifs du Développement Durable (ODD), reste la perception du continent. Pour Lionel Zinsou, ancien premier ministre du Benin et ancien dirigeant de la société de private equity PAI Partners, "il y a toujours un grand décalage entre la perception du risque africain et le risque réel. Aujourd’hui la dynamique économique est là. Des secteurs entiers se développent à la vitesse de la lumière et sans passer par les vieux modèles. Il faudrait savoir investir sur cette dynamique formidable, faisant mieux dialoguer les deux Afriques : la francophone et l’anglophone."