Publié le 04 décembre 2015

FINANCE DURABLE
Climat : Un projet pour financer la restauration des sols à grande échelle
Le premier fonds destiné à mettre fin à la dégradation des terres dans le monde a été créé. Il est né d'un partenariat signé entre les ministères français de l’Agriculture et du Développement, la Convention des Nations Unies pour la Lutte Contre la Désertification et la société de gestion Mirova. Une signature qui date du jeudi 3 décembre. L’objectif? Restaurer chaque année 12 milliards d’hectares de terre pour assurer la sécurité alimentaire, enraciner les agriculteurs dans des terres fertiles et capter du dioxyde de carbone.

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Le projet de fonds pour la neutralité de dégradation des terres (fonds LDN) est un projet sans équivalent. Fruit d’un travail commun entre la Convention des Nations Unies pour la Lutte Contre la Désertification, les ministères français du Développement et de l’Agriculture et la société de gestion Mirova, il a vocation à financer la réhabilitation des sols et la gestion durable des terres, à grande échelle. Et dans le monde entier.
Ce projet a été initialement porté par l’organisation onusienne en charge de la lutte contre la désertification. "Nous avons besoin de déployer rapidement et dans de nombreux pays des pratiques agricoles respectueuses du sol qui permettent de stocker du carbone à coût réduit avec de multiples bénéfices pour l’alimentation et la protection des populations vulnérables", explique Monique Barbut, secrétaire éxécutive de la Convention des Nations Unies sur la Lutte Contre la Désertification (CNULCD).
Capter 1 milliard de tonnes de CO2
Le projet est ambitieux : il s'agit de séquestrer dans les sols agricoles une gigatonne de CO2 par an. Une ambition qui demandera 2 milliards de dollars d’investissements chaque année pour financer la restauration de 12 milliards d’hectares par an.
Cela implique de mettre en place une stratégie de formation des populations locales aux techniques d'agro-foresterie, ce qui reste encore à organiser. Il existe déjà des exemples de réussite. C'est le cas de la reforestation menée au Pérou dans la région de San Martin pour reboiser des forêts dévastées par la culture de la coca dans les années 80. Malgré cette initiative, plus de 500 000 hectares de terres dégradées restent à réhabiliter dans la zone.
Attirer les bailleurs de fonds
Les besoins de financement, évalués via ce nouveau fonds LDN, sont d’1,7 milliard de dollars pour combiner plantations durables de cacao ou de café, introduction de plantes forestières durables et rénovation de parcelles improductives afin de limiter la déforestation et d’autonomiser les populations locales.
L’ambition du fonds est de multiplier les expériences de ce type. Des expériences menées notamment aujourd’hui à petite échelle dans des zones beaucoup plus limitées comme le fait le fonds Livelihoods.
Le fonds doit pour cela être en capacité d’attirer des bailleurs publics, des banques de développement et des investisseurs privés. Cette mission d’organisation et de structuration du financement a été confiée à la société de gestion Mirova."Notre mandat est de construire toute l’ingénierie financière qui transforme cette stratégie de réhabilitation de terre en produits financiers investissables", explique Philippe Zaouati, PDG de Mirova.
La société de gestion dédié à l’investissement responsable (ISR) du groupe Natixis a remporté un appel d’offre pour porter le projet. "Nous avons beaucoup de travail. Nous avons un an pour réaliser les études de faisabilité nécessaires, déployer des modèles adaptés de rentabilité puisqu’il est prévu que le fonds n’achète pas les terres qu’il va réhabiliter mais donne les moyens à ceux qui les détiennent de restaurer leurs terres. C’est forcément plus complexe".
Le calendrier est déjà fixé puisque les ministres français souhaitent annoncer, lors de la COP22 au Maroc, le nom des premiers investisseurs du fonds LDN. L’Union Européenne ne devrait pas en être puisque le ministre de l’Agriculture, Stéphane Le Foll, a regretté avec insistance lors de la signature du partenariat, la frilosité de la commission sur le financement de la lutte contre le changement climatique.