Publié le 02 octobre 2019
ENVIRONNEMENT
Incendie de Lubrizol à Rouen : une liste de 5 253 tonnes de produits chimiques détruits à décrypter
Cinq jours après l'impressionnante explosion de l'usine Lubrizol de Rouen, la préfecture a dévoilé la liste des 5 253 tonnes de produits chimiques qui ont été détruits dans l'incendie. Pour les installations Seveso, le nom des produits stockés est en effet gardé secret en raison du risque terroriste. Si les associations saluent cette preuve de transparence, elles relèvent aussi la complexité des informations publiées et le long travail de décryptage qui débute pour estimer leur dangerosité.

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La préfecture de Seine-Maritime a publié dans la soirée la liste des 5 253 tonnes de produits chimiques qui ont brûlé dans l'incendie de l'usine Lubrizol de Rouen jeudi dernier. Le Premier ministre Édouard Philippe s’y était engagé plus tôt dans la jour devant l'Assemblée nationale."Tous les produits ne sont pas dangereux", a assuré la préfecture, écartant également tout risque lié à l’amiante. 160 fûts "en état délicat" attendent par ailleurs d'être évacués.
"La première chose que nous avons faite, c'est de vérifier la qualité de l'air et analyser les suies. Nous avons cherché les produits les plus communément trouvés suite à un tel incendie et potentiellement cancérigènes". Quant à la publication de la liste, "il fallait le temps de définir ceux qui étaient concernés par l’incendie. Nous nous engageons à publier au fur et à mesure tout ce dont nous disposons", a annoncé la ministre de la Santé, Agnès Buzin, au micro de France Inter le 2 octobre.
470 fiches de sécurité à décrypter
"La liste publiée par la préfecture de Seine-Maritime, se basant sur les informations communiquées par Lubrizol, est un numéro de strip-tease industriel réservé aux initiés" réagit l'association Robin des Bois. En effet, "pour avoir une vision précise de la situation il faudra dépouiller plus de 470 fiches de sécurité et cela prendra du temps !", ajoute Générations futures qui demande des analyses complètes et détaillées des suies et fumées.
"Si beaucoup de ces produits sont de l’huile minérale il y a aussi de nombreux produits contenant des substances suspectées d’être toxiques pour la reproduction, cancérogènes ou toxiques pour certains organes ou par inhalation", complète l'association. Quant à l'Andeva, l'Association nationale de défense des victimes de l'amiante, elle s'inquiète des conséquences de l'incendie du toit en amiante de l'usine: "l'important est ce qui s'est passé dans la colonne de fumée où une masse de fibres d'amiante a voyagé avec les suies."
Une mission d'information parlementaire
Les agences publiques chargées des risques industriels (Ineris) et de la santé (Anses) vont être consultées pour rechercher de nouveaux produits dans les retombées, a annoncé la ministre de la Transition écologique Elisabeth Borne. Une mission d'information sur l'incendie de l'usine Lubrizol à Rouen va être créée à l'Assemblée nationale, a-t-on appris mercredi de source parlementaire, après un accord en conférence des présidents sur ce format. Celle-ci, demandée par plusieurs députés et groupes politiques, surtout de gauche, doit faire toute la lumière sur cet incendie.
"Je trouve ça très bien parce que l'État n'a rien à cacher, les autorités n'ont rien à cacher, d'ailleurs je ne sais même pas quel serait l'intérêt des autorités, notamment des autorités sanitaires, de cacher des choses. [...] Ça permet de montrer ce qu'on a fait et je pense que le préfet a pris les très bonnes décisions dès le départ", a réagit la ministre de la Santé, Agnès Buzin.
Le parquet de Rouen, qui s'est dessaisi de l'enquête au profit du pôle de santé publique de Paris en raison du niveau de toxicité et du nombre de plainte pour "mise en danger d'autrui", a lui annoncé avoir recensé "plus d'une quarantaine de plaintes" à la suite de l'incendie.
Concepcion Alvarez avec AFP