Publié le 10 septembre 2019
ENVIRONNEMENT
Manger trop, c'est gaspiller 100 fois plus de nourriture que de la jeter !
C'est un problème de santé publique indéniable... mais pas seulement. Alors que le nombre de personnes en surpoids ou obèses ne cesse d'augmenter, des chercheurs italiens viennent de montrer que l'excès de nourriture par rapport à ce dont notre corps a besoin engendre un impact considérable sur l'environnement. On provoque ainsi 100 fois plus de gaspillage en mangeant trop qu'en jetant la nourriture. Un gaspillage qui équivaut à 240 milliards de tonnes de CO2 soit l'équivalent des émissions des énergies fossiles sur sept ans.

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Selon une nouvelle étude publiée dans la revue Frontiers in nutrition, manger davantage que ce dont notre corps a besoin pour être en bonne santé conduit à un impact environnemental (pression sur l'eau et les sols) et climatique équivalent à un gaspillage de 140 milliards de tonnes de nourriture. À titre de comparaison, on évalue à 1,6 milliard de tonnes le poids de nourriture qui part à la poubelle chaque année. Manger trop provoque donc 100 fois plus de gâchis.
240 milliards de tonnes de CO2 générés
"Nous mangeons beaucoup plus que ce dont on a besoin pour la planète. C'est comme si nous jetions à la poubelle ce surplus et que nous gaspillions les ressources nécessaires à la production de cette nourriture", indique à Science et Avenir, Maura Serafini, co-auteur de l'étude, spécialiste en nutrition et technologies de l'alimentation à l'Université de Térame en Italie,"L'obésité est une condition insoutenable, non seulement pour la santé mais aussi pour l'environnement", estime-t-il.
La prise de poids n'est pas seulement dû à un excès de nourriture, elle peut être liée au stress, à la sédentarité, à une prédisposition génétique... Mais les chercheurs notent que depuis 1974, le contenu énergétique de notre régime alimentaire a augmenté en moyenne de 50 % pour atteindre plus de 1 400 kcal par personne et par jour. Au total, en 2016, selon l'Organisation mondiale de la santé, plus de 1,9 milliard d'adultes étaient en surpoids dont 650 millions de personnes obèses. Ce phénomène, qui tend à s'intensifier, renforce les risques de maladies cardiovasculaires, de diabète ou encore de certains cancers.
240 milliards de tonnes de CO2
La croissance de ce gaspillage génère 240 milliards de tonnes de CO2, l'équivalent des émissions des énergies fossiles de ces sept dernières années, indiquent les chercheurs. Pour calculer cette pollution, les auteurs ont d'abord évalué, en kilo, l'excès de gras moyen de chaque pays par rapport à l'indice de masse corporel (IMC) idéal. La deuxième étape a été d'évaluer les ressources nécessaires à la production de cette alimentation et son origine, viande, poissons, œufs, etc, par rapport aux données de la FAO. Celui-ci leur a permis de calculer le poids de la nourriture gaspillée et son impact carbone, sa pression sur l'eau et les sols.
Avec cette méthode, la pollution générée par cette suralimentation pourrait même être sous-évaluée. Car certaines personnes mangent trop mais éliminent les excès en pratiquant une activité physique et ont donc un IMC considéré comme normal. Or, elles exercent une pression environnementale en consommant plus que ce dont elles ont besoin.
Manger moins pour la planète
"Il est important d’étudier les moyens d’aborder les changements de comportement dans les régions développées, de sensibiliser l’opinion à l’importance de réduire le gaspillage alimentaire et de privilégier des régimes alimentaires adaptés aux besoins énergétiques individuels, afin d’éviter une augmentation supplémentaire des impacts sur l’environnement et la santé associés. avec des habitudes alimentaires occidentales déséquilibrées", écrivent les chercheurs.
Ce n'est pas la première fois qu'un lien entre obésité, surpoids et empreinte écologique est établi. En 2012 des chercheurs de la London of Hygiene and Tropical Medicine avaient estimé, dans une étude publiée dans la revue BMC Public Health, qu'il fallait calculer l'empreinte écologique des humains non pas en se basant sur le nombre d'individus mais sur leur masse totale. "Il s'agit moins de calculer le nombre de bouches à nourrir que la quantité de chair à entretenir. Si le monde entier évoluait comme les Etats-Unis, cela équivaudrait à un milliard d'humains supplémentaires en termes de masse", avait expliqué le directeur de l'étude, le Professeur Ian Roberts.
Marina Fabre, @fabre_marina