Publié le 12 août 2015
ENVIRONNEMENT
L'économie circulaire française en plein essor
Inconnu ou presque il y a une dizaine d’années, le concept d’économie circulaire est aujourd’hui au cœur de la stratégie de nombreuses entreprises. En France, il a même fait son entrée dans la législation, via la loi de programmation sur la transition énergétique pour la croissance verte. Gouvernement et entreprises y voient un potentiel d’emploi et de développement vraiment durables. Le point sur la situation hexagonale.

Institut de l'économie circulaire
Économie de matières premières, création d’emplois - le plus souvent locaux -, innovation, adaptation aux nouveaux besoins des consommateurs, etc. Les promesses de l’économie circulaire sont nombreuses. En France, État, collectivités locales, mais également petites et grandes entreprises y voient un relais de croissance attractif et soutenable.
Une stratégie nationale de long terme
Dans l’article 19 de la loi de programmation sur la transition énergétique, "la France se donne pour objectif de dépasser le modèle économique linéaire consistant à 'produire, consommer, jeter' en assurant une transition vers un modèle d'économie circulaire fondé sur le développement d'un système de production et d'échanges prenant en compte, dès leur conception, la durabilité et le recyclage des produits ou de leurs composants, de sorte qu'ils puissent être réutilisés ou redevenir des matières premières nouvelles, afin de réduire la consommation des ressources et d'améliorer l'efficacité de leur utilisation."
"Cette loi fournit désormais une définition assez complète et précise de ce qu’est l’économie circulaire, ce qui évitera que l’on accole ce vocable à tout et n’importe quoi. Surtout, la bonne nouvelle, c’est que la question de l’économie circulaire fait désormais consensus. L’Assemblée nationale et le Sénat sont d’accord sur ce volet du projet de loi. C’est une vraie progression. Il y a encore quelques années, envisager l’économie sous cet aspect était perçu comme une attitude de gauchiste", souligne Arnaud Gossement, avocat spécialiste du droit de l'environnement.
Autre bonne nouvelle : la loi utilise comme levier de développement la commande publique. Un levier "surpuissant", selon l’avocat : "Cela représente annuellement entre 70 et 90 milliards d’euros. C’est important en période de crise. Les entreprises vont pouvoir démarcher les élus avec de nouveaux arguments", souligne-t-il.
Les entreprises dans les starting blocks
"De plus en plus d’entreprises - on le voit notamment dans les rapports RSE des grands groupes - se lancent en effet dans l’économie circulaire. D’une part, le contexte économique est de plus en plus favorable à la sauvegarde et au réemploi des matières premières, du fait de la hausse et de la volatilité de leur prix. D’autre part, les consommateurs se tournent de plus en plus vers l’usage des biens qu'ils achètent. Et les pouvoirs publics exercent une pression croissante sur les entreprises, pour qu’elles prennent en compte l’ensemble du cycle de vie de leurs produits (via la responsabilité élargie du producteur). Pour beaucoup d’entreprises, c’est donc une question de survie", précise Mathieu Hestin, directeur au sein de la structure économie circulaire de BIO by Deloitte.
Pourtant, plusieurs freins restent à lever, estiment les différents acteurs. Culturels d'abord : la coopération entre entreprises, par exemple, au sein des sites d’écologie industrielle portée par les collectivités locales, n’est pas toujours aisée, notamment en raison du partage d’information qu’elle suppose.
Les freins sont également d'ordre réglementaire. La fiscalité reste en effet peu incitative pour le développement de l’économie circulaire : "Dans la majorité des cas, l’économie circulaire coûte au départ plus cher que l’économie linéaire, et ce malgré la hausse du prix des matières premières. Résultat : les investissements, les infrastructures… sont dirigés vers l’économie traditionnelle, qui bénéficie déjà d’économies d’échelles. Une façon de changer le cours des choses, c’est la fiscalité sur les ressources, les déchets ou les produits issus de l’économie circulaire", estime l’expert.
Chez Pocheco, une PMI du Nord-Pas-de-Calais, rien ne sert pourtant d’attendre l’État en la matière. Dans ses locaux, des panneaux indiquent fièrement : "Ne respectez pas la législation…Devancez-là !"
Les différentes facettes de l’économie circulaire
L’approvisionnement durable : changer le mode d’exploitation/extraction des ressources pour une exploitation efficace des ressources.
L’écoconception : prendre en compte l’ensemble du cycle de vie en minimisant les impacts environnementaux dès la conception d’un bien ou service.
L’écologie industrielle et territoriale : s’organiser entre entreprises pour échanger des flux (matières premières, déchets…) ou mutualiser des besoins.
L’économie de la fonctionnalité : privilégier l’usage à la possession et vendre des services liés aux produits plutôt que les produits eux-mêmes.
La consommation responsable : effectuer ses achats (pour une entreprise ou un consommateur) en prenant en compte les impacts environnementaux à toutes les étapes du cycle de vie du produit.
L'allongement de la durée d’usage : permettre une réparation du produit par le consommateur ou de lui en assurer une seconde vie par la vente ou le don.
Le recyclage : utiliser les matières premières issues de déchets.
Cet article a initialement été publié dans la lettre professionnelle de Novethic "L'essentiel de la RSE" n°109, avril-mai-juin 2015