Publié le 21 août 2020
ENVIRONNEMENT
[Les monstres des abysses] Avec le Covid-19, plongeon dans un océan de masques et de gants
La pandémie de Covid-19 a signé un retour en force du tout jetable. En premier lieu concernant les masques chirurgicaux, dont certains jonchent les trottoirs et finissent au fond des océans. C'est ce que constatent de plus en plus de plongeurs, pêcheurs, marins... Une nouvelle pollution inquiétante pour la biodiversité alors que le plastique tapisse déjà les fonds marins. Toute la semaine, Novethic sillonne les abysses à la recherche de ces monstres créés par les humains.

Assciation Opération Mer Propre
C’est un nouveau genre de pollution. Après le plastique, qui constitue désormais un septième continent formé par une concentration de déchets dans les océans, les masques et les gants font leur apparition dans les eaux de la planète. Avec la crise du Covid-19, l’utilisation de ces protections sanitaires a en effet connu un vrai boom. En France, plusieurs villes obligent même les citoyens à porter des masques en extérieur, dans certains quartiers très fréquentés. Mais avec la généralisation du port du masque, c’est aussi une hausse des incivilités que constatent les autorités.
Plusieurs municipalités ont tiré la sonnette d’alarme quant à la recrudescence de masques jetables jonchant les rues de leur ville. Au-delà même du risque de contamination pour les travailleurs chargés de la propreté, c’est aussi un fort risque de pollution pour les milieux aquatiques. La Fondation Tara Océan a ainsi retrouvé des gants et des masques de manière "systématique" dans sept fleuves européens, dont la Seine. "C’est préoccupant pour la suite" car "on peut en déduire que d’autres sont déjà arrivés en mer", a fait valoir Romy Hentinger, porte-parole de l’ONG, sur France Inter. "Les masques de protection à usage unique en polypropylène sont très fins et vont se fragmenter rapidement", a expliqué la responsable de plaidoyer.
"Si rien ne change, ça va devenir un vrai désastre écologique"
Dès le mois de mai le plongeur cannois Laurent Lombard avait filmé des dizaines de masques et de gants échoués au fond de la Méditerranée. "Si rien ne change, ça va devenir un vrai désastre écologique et peut-être même sanitaire", prévenait-il alors. Depuis, les marins, plongeurs, pêcheurs… observent ces déchets partout à travers le monde. Dans le Financial Times Carmen Barrera, pêcheuse dans les îles Canaries depuis plusieurs décennies s’inquiète de la situation. "Dès l’instant où les gens ont commencé à porter des gants et des masques, nous avons commencé à les voir en mer. Le problème réside dans la manière dont les gens utilisent et éliminent les déchets", explique-t-elle.
Les masques jetables sont en effet très utilisés à travers le monde mais n’ont pas de filière de recyclage. Or, s’il est jeté sur la voie publique ou dans la nature, un masque chirurgical met de 400 à 450 ans à se dégrader. Pour limiter les dégâts dans les océans, l’association Zero Waste qui lutte contre la politique du tout jetable, appelle à utiliser des masques lavables en tissu rappelant que "jetable et propre ne sont pas synonymes". En attendant, le gouvernement doit augmenter le montant de l’amende pour jets de déchets sur la voie publique, passant de 68 à 135 euros.
Marina Fabre, @fabre_marina