Publié le 21 août 2017
ENVIRONNEMENT
Reporting climat : la banque australienne poursuivie pour défaut d’information cède aux demandes de transparence
[Mis à jour le 21/09/201] Début août, une ONG australienne, Environmental Justice Network, portait plainte, au nom de deux actionnaires, contre la plus grosse banque australienne, Commonwealth Bank. Motif de la plainte : ne pas avoir correctement informé ses investisseurs des risques financiers liés au changement climatique. La banque a fini par se plier à l’exercice de transparence et de réflexion attendu.

En ne fournissant pas d’informations sur les risques liés au changement climatique dans son rapport annuel 2016, Commonwealth Bank of Australia, la plus grosse banque australienne ne donnait "pas une vision juste et véridique de sa position financière et de sa performance". Un manquement dénoncé par l’ONG Environnemtal Justice Australia, représentant deux actionnaires de la banque, qui a porté plainte devant la Cour fédérale.
Cette action judiciaire pour défaut d’information sur le risque climat était présentée comme une première au niveau mondial. Sa seule annonce a suffi à faire bouger les lignes. Quelques jours plus tard, la banque amorçait en effet un virage historique.
Un virage culturel de la banque
La banque a publié une “déclaration de position sur la politique climatique”. Elle a aussi intégré dans son rapport annuel plusieurs paragraphes témoignant d’un changement culturel important. La banque y déclare s’engager "à contribuer à l’atteinte de l’objectif de limiter le réchauffement à nettement moins de 2°C”, en ligne avec l’objectif de l’Accord de Paris. Elle s’engage également à adopter les recommandations du groupe de travail sur le reporting climat (TCFD), "à communiquer les informations pertinentes aux principaux indices boursiers et à rapporter sur l’intensité carbone de notre portefeuille de prêts."
De quoi amener les plaignants à retirer leur plainte. "Après s’être, depuis des années, opposés aux résolutions visant à améliorer le reporting climat et refusés à s’engager à ne pas financer le projet de mine de charbon de Carmichael du groupe Adani, les administrateurs de Commonwealth Bank ont enfin reconnu la matérialité du changement climatique dans son rapport annuel 2017", se félicite Guy Abrahams, l’un des deux actionnaires, représenté par l’ONG Environnemtal Justice Australia.
Une banque jusque-là pointée du doigt pour son financement des énergies fossiles
Les plaignants avaient appuyé leur plainte sur le Corporations Act australien qui demande aux entreprises de fournir une "représentation véridique et honnête", et sur les prises de position des régulateurs financiers du pays. Or, en février 2017, l'Australian Prudential Regulation Authority (APRA) avait déclaré que le changement climatique était un risque financier à prendre en compte "ici et maintenant".
L'argumentation se basait sur l’Accord de Paris, les travaux de la TCFD (Task Force on Climate-Related Financial Disclosures), l'avis juridique du Centre for Policy Development et du Future Business Council. Sa conclusion était claire : les membres de conseils d’administration ne prenant pas en compte l’impact des risques prévisibles liés au climat pouvaient être tenus personnellement responsables pour avoir manqué à leur obligation de vigilance et de diligence.
Rappelons que Commonwealth Bank n’est pas le seul acteur financier australien à ne pas jouer la carte de la transparence sur le sujet si l’on en croit un rapport publié en juillet par l’ONG Market Forces. Mais jusqu’ici la banque (par ailleurs récemment condamnée pour complicité de blanchiment) faisait partie des gros financeurs des énergies fossiles et comptait parmi les deux gros acteurs bancaires du pays (avec Westpac) à ne pas avoir adopté les recommandations de la TCFD sur la transparence financière des entreprises en matière de climat.
Lors d’une audition au Parlement en mars 2017, le patron de la banque s’était d’ailleurs montré incapable de dire si la « Commbank » avait des actifs dépréciés (stranded assets) dans son portefeuille et avait balayé les remarques de l’APRA sur l’urgence de prendre en compte le changement climatique.
Béatrice Héraud @beatriceheraud