Publié le 11 juillet 2019
ENVIRONNEMENT
Changement climatique : 1 300 actions en justice contre les États et les entreprises
C'est une nouvelle arme citoyenne. De plus en plus de d'associations et de personnes poursuivent États et entreprises pour leur implication dans la crise climatique. Depuis 1990, la London School of Economics en compte plus de 1 300. Si cette démarche était concentrée jusqu'ici aux États-Unis, elle a tendance à s'exporter. En témoigne l'Affaire du siècle, le recours porté par quatre ONG contre l'État français pour inaction climatique, qui a rencontre un énorme succès dans l'Hexagone.

@Urgenda/Chantal Bekker
Est-ce la seule manière qu’ont désormais les citoyens de se faire entendre ? En France, l’Affaire du siècle a connu un succès retentissant. En décembre 2018, quatre ONG (Oxfam, Greenpeace, Notre affaire à tous et la Fondation Nicolas Hulot) ont publié une pétition dans laquelle elles dénonçaient l’inaction climatique du gouvernement. C'est la pétition la plus populaire de l’histoire, avec plus de deux millions de signatures. Mais plus rare, cette action est accompagnée d’un recours contre l’État.
"On fait un travail de plaidoyer depuis des années, il fallait trouver un moyen légal et suffisamment impactant de mobiliser en dehors de nos cercles militants habituels", explique Noélie Coudurier, responsable de campagne chez Oxfam. Une démarche inhabituelle en France, mais aux États-Unis, il s'agit d'une vraie tendance de fond.
Les litiges liés à la crise climatique, une arme courante aux USA
Selon un rapport du Grantham Research Institut de la London School of Economics, plus de 1 300 actions en justice concernant le changement climatique ont été lancées à travers le monde depuis 1990. Les litiges se concentrent aux États-Unis où les chercheurs comptabilisent 1 023 cas mais cette démarche s’exporte de plus en plus. "Les litiges liés au changement climatique continuent de connaître une expansion géographique", notent les chercheurs, énumérant des actions en Asie, au Pacifique et en Europe.
On se souvient ainsi qu’aux Pays Bas, en 2013, l’ONG Urgenda et 900 particuliers avaient saisi le tribunal de La Haye pour que l’État intensifie ses efforts dans la lutte contre le changement climatique. Ils avaient obtenu gain de cause et ouvert la voie à d’autres pays. Au Pakistan, Ashag Leghari, fils de paysan, a lui obtenu du gouvernement qu’il mette en place une politique environnementale alors qu’il n’avait jusqu’ici pas appliqué les textes relatifs à la lutte contre le changement climatique. En Colombie, c’est l’action de 25 citoyens âgés de 7 à 26 ans, soutenu par l’ONG De Justicia qui a poussé le gouvernement à mettre en place un programme d’arrêt de la déforestation pour sauver l’Amazonie.
Une démarche qui fédère
"Les litiges relatifs au changement climatique sont de plus en plus considérés comme un moyen d’influencer les résultats des politiques et le comportement des entreprises", soulignent les chercheurs. Plusieurs États ou collectivités américains demandent réparations à des entreprises suite à des problèmes liés au réchauffement climatique.
Au total, 43 % des 305 affaires lancées hors des États-Unis de 1994 à 2019 ont abouti à un jugement favorable. 27 % ont eu l’effet inverse et entravé les efforts de la lutte contre le changement climatique. Le reste n’a pas eu de conséquence sur la politique climatique des pays ou entreprises ciblés. Pour autant, même lorsque les jugements ne sont pas favorables aux associations ou aux citoyens, le succès médiatique participe à la prise de conscience de la crise climatique. C’est notamment le cas pour l’Affaire du siècle qui a agi comme un véritable catalyseur du réveil écologique des Français alors même que le jugement ne sera rendu que dans plusieurs années.
Marina Fabre, @fabre_marina