Publié le 15 décembre 2020
ENVIRONNEMENT
Le plan France relance est l'un des plus ambitieux au monde mais il pourrait aller plus loin, selon le Haut conseil pour le climat
Le Haut conseil pour le climat a passé au crible le plan de relance français. S'il apparaît comme l'un des mieux dotés au monde sur le volet environnemental, l'instance estime qu'on pourrait encore aller plus loin pour placer la France sur la voie de la neutralité carbone. Les secteurs de l'agriculture et des forêts notamment méritent d'être davantage appuyés.

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Le Haut conseil pour le climat (HCC) s’est penché sur le plan de relance français, doté de 100 milliards d’euros, dont 30 milliards dédiés à l'écologie sur deux ans. Selon l’organisme indépendant, qui a passé au crible la centaine de mesures prises par le gouvernement (1), 28 milliards d’euros sont effectivement favorables à la réduction des émissions de gaz à effet de serre, contre 70 milliards qui suivent la trajectoire actuelle et deux milliards qui sont jugés ambigüs. C'est un montant conséquent, même s'il est moins élevé que le seuil fixé à 37 milliards d’euros par l’Union européenne.
"Le plan de relance français est l’un des mieux dotés au monde sur le volet écologique et il est à noter qu’il ne soutient pas les énergies fossiles", admet Corinne Le Quéré, la présidente du HCC. "Il pourrait permettre de rattraper le retard pris par la France sur ses objectifs climatiques, mais il comporte également des risques de verrouiller le pays dans des politiques émettrices. Il est nécessaire qu'il s’inscrive dans une stratégie d’ensemble qui manque toujours."
Baisse des émissions annuelles de 0,6 %
Dans le détail, la moitié des dépenses favorables visent à soutenir la décarbonation des secteur du transport (9,4 milliards) et du bâtiment (4,6 milliards). À l’inverse, l’agriculture (157 millions d’euros) est l’un des moins bien dotés alors qu’il s’agit du deuxième secteur le plus émetteur en France. De même, le secteur forêt-bois (200 millions d’euros) est peu soutenu malgré l’importance du développement des puits de carbone dans l’atteinte de la neutralité carbone. Le HCC déplore également le manque de moyens dédiés aux mesures d’adaptation, à l'emploi et à la formation dans la transition bas-carbone.
Au total, le plan de relance permettrait d’éviter entre 55 et 60 millions de tonnes équivalentes CO2 par an sur la durée des investissements (jusqu’à 45 ans). Cela correspond à une baisse des émissions annuelles de 0,6 %, à comparer avec la baisse de 0,9 % entre 2019 et 2018. La trajectoire fixée par la Stratégie nationale bas-carbone (SNBC) vise quant à elle une réduction de 1,5 % par an entre 2019 et 2023. "Le plan de relance français permet de rattraper un peu la trajectoire bas-carbone mais on pourrait faire plus en alignant l’ensemble des 100 milliards vers des modes de production bas-carbone" estime Corinne Le Quéré. Le HCC appelle ainsi à maximiser les bénéfices du plan de relance, sans forcément déployer de nouveaux financements.
Parmi les six mesures jugées ambiguës, il y a par exemple l’aide à l’achat de véhicules propres dans le cadre du plan automobile de 900 millions d’euros. Or, la prime à la conversion finance des véhicules émetteurs jusqu'à 137 gCO2/km, ce qui est bien supérieur au seuil de 50 gCO2/km généralement retenu pour un véhicule bas-carbone. Les experts appellent à surveiller de près les aides à l'automobile et l'aérien, et la baisse des impôts de production, qui "pourraient avoir un effet significatif positif ou négatif sur la trajectoire des émissions de la France".
Concepcion Alvarez @conce1
(1) Voir le rapport du HCC