Publié le 20 juin 2019
ENVIRONNEMENT
La photo glaçante qui montre la fonte massive des glaces du Groenland
Avant même l’été, le Groenland est déjà en train de souffrir. Le climatologue Steffen Olsen a effrayé le monde en montrant son expédition bloquée par une mer de glace fondue, là où aurait dû se trouver un sol épais et gelé. Les scientifiques préviennent que 2019 risque d’être la pire année pour les zones polaires.

@SteffenOlsen/DMI
Les chaleurs de l’été ne sont pas encore arrivées et pourtant le Groenland est déjà en grande souffrance. Cette photo, prise le 13 juin par le climatologue danois Steffen M. Olsen glace le sang. Elle a fait le tour du monde. Lors d’une expédition au cœur du fjord d’Inglefield (Bredning), au nord-ouest du Groenland, les chiens de traîneau censés cavaler sur un sol gelé et solide se sont retrouvés sur un immense miroir de glace fondue, leurs pattes enfoncées de plusieurs centimètres dans l’eau.
@SteffenMalskaer got the difficult task of retrieving our oceanographic moorings and weather station on sea ice in North West Greenland this year. Rapid melt and sea ice with low permeability and few cracks leaves the melt water on top. pic.twitter.com/ytlBDTrVeD
— Rasmus Tonboe (@RasmusTonboe) 14 juin 2019
Cette photo serait magnifique si ce qu'elle montrait n'était pas si dramatique. Car c'est bien la très mauvaise santé de nos zones septentrionales que l'on observe. Dans ces zones, les anomalies se multiplient d’année en année. Pour les scientifiques, 2019 sera une nouvelle annus horribilis pour le continent blanc. "Il est possible que les records de 2012 soient battus, tant pour la surface de banquise en Arctique la plus basse (...) que pour la fonte de calotte glaciaire du Groenland la plus élevée", prévient Ruth Mottram, climatologue de l'Institut danois de météorologie (DMI).
"L'image (de Steffen Olsen) est frappante (...) parce qu'elle montre vraiment comment l'Arctique est en train de changer", analyse Ruth Mottram. "Les locaux (qui accompagnent l'expédition) ne s'attendaient pas à ce que la banquise commence à fondre si tôt. Ils prennent habituellement cette route parce que la glace est très épaisse, mais ils ont dû faire demi-tour car l'eau était de plus en plus profonde et ils ne pouvaient plus avancer", explique-t-elle.
Un mois d’avance pour la fonte des glaces
La veille, le 12 juin, la station météorologique la plus proche, à Qaanaaq, avait enregistré une température de 17,3 degrés, 0,3 point de moins que son record absolu du 30 juin 2012. "L'hiver a été sec et récemment il y a eu des courants d'air chaud, un ciel dégagé et du soleil, toutes les conditions pour une fonte précoce", explique Ruth Mottram.
Et le 17 juin, en une seule journée, le Groenland a perdu 3,7 milliards de tonnes de glace, d'après les estimations du DMI. Depuis début juin, la perte se monte à 37 milliards de tonnes, indique sur son compte Twitter Xavier Fettweis, climatologue de l'université de Liège. "Il devient de plus en plus probable qu'un record de perte de masse sera battu cette année pour un mois de juin", écrit-il. Cette année, les météorologues danois avaient annoncé le début de la période de fonte début mai, avec quasiment un mois d'avance sur les normales.
En 2017, le Groenland avait déjà marqué les esprits en étant en proie à l’un des plus importants incendies de son histoire dont le front s’étendait sur 15 kilomètres. Les scientifiques avaient alors émis l’hypothèse que le dégel du permafrost - ces sols en théorie en permanence gelé riches en matières organiques - avait donné tout le carburant nécessaire pour alimenter ce feu incontrôlable. Le dégel de ces terres est une grande source d’inquiétude, car elles renferment des quantités considérables de méthane.
Ludovic Dupin avec AFP