Publié le 25 mars 2020
INFOGRAPHIES & VIDÉOS
[Infographie] La crise environnementale ne doit pas être effacée par le coronavirus
Le coronavirus occupe – non sans raison – les radars médiatiques et politiques depuis quelques semaines. Mais il est une autre crise, moins visible mais tout aussi grave, qui progresse très vite sans être suffisamment prise en compte, celle du climat et de l'environnement. Selon de nouvelles données révélées par l’Organisation météorologique mondiale (OMM), tous les indicateurs sont au rouge.

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"Malgré les réductions locales de la pollution et l'amélioration de la qualité de l'air (...), le moment est venu de réfléchir à la manière d'utiliser les plans de relance économique pour soutenir la transition à long terme vers des pratiques plus respectueuses de l'environnement et du climat." Cette fois, l'appel est lancé par le secrétaire général de l'Organisation météorologique mondiale (OMM), Petteri Taalas. "Le monde doit faire preuve de la même unité et de la même détermination à agir sur le climat et à réduire les émissions de gaz à effet de serre que pour contenir la pandémie de coronavirus", a-t-il ajouté.
Dans son "état du climat mondial", publié le 10 mars (1) en pleine crise du coronavirus, l’OMM revient sur les principaux indicateurs environnementaux. Ils battent allègrement des records que ce soit pour l'acidification des océans, le niveau de CO2 dans l’atmosphère ou la fonte des glaces. Pour 2020, deux stations d'observation ont déjà enregistré une hausse de la concentration de CO2 dans l'atmosphère par rapport à 2019. "Etant donné que les niveaux de gaz à effet de serre continuent d’augmenter, le réchauffement va se poursuivre. De récentes provisions décennales indiquent que la température mondiale annuelle battra probablement un record dans les cinq prochaines années. C’est une question de temps" a annoncé le secrétaire général de l’OMM.
Un message difficile à faire passer en ce moment
Alors que le coronavirus a entraîné la mise en place de mesures immédiates, drastiques et coûteuses, certains, à l'instar du secrétaire général de l'OMM, se demandent pourquoi le même élan ne se produit pas pour lutter contre un dérèglement climatique dont les effets ont été particulièrement visibles en 2019 (incendies en Australie, canicules en Europe, cyclones meurtriers notamment au Mozambique, inondations majeures, feux de forêts…). La climatologue Corinne Le Quéré, présidente du Haut conseil pour le climat, demande ainsi "une réponse équivalente au coronavirus pour le climat" alors que les mesures actuelles "ne sont pas au niveau de l’urgence".
"C’est un message difficile à faire passer en ce moment, concède Laurence Tubiana, la directrice de la Fondation européenne pour le climat, et cheville ouvrière de la COP21. Mais l’action climatique ne doit pas être retardée. Nous avons déjà commis cette erreur après la crise financière de 2008. Cette fois, la crise est bien plus profonde. A la différence de 2008, les technologies sont aujourd’hui matures, les prix des renouvelables sont compétitifs et la société civile est mobilisée. Il faut donc accélérer."
Une opportunité pour le climat ?
Pour l’eurodéputé Pascal Canfin, la crise du coronavirus constitue "un test pour la souveraineté et la solidarité européenne". "Après le pic de la crise, lorsqu’il faudra accélérer la reprise économique, nous serons à la croisée des chemins : tout investissement dans les infrastructures, dans le secteur du bâtiment ou de la construction automobile, devra être cohérent avec la question climatique. Nous avons la possibilité de faire de cette crise une opportunité pour le climat, saisissons-la" lance-t-il.
Seulement, si la crise du coronavirus constitue en effet une opportunité pour changer radicalement notre société et lutter efficacement contre le changement climatique, les remèdes à mettre en place sont loin d'être identiques, rappelle François Gemenne, chercheur en science politique. "Le changement climatique n'est pas une crise temporaire et implique des transformations en profondeur et irréversibles. En outre, alors que le coronavirus a entraîné un repli très fort, le changement climatique nécessite de déployer une solidarité à l'échelle planétaire."
Pour l'heure, l'environnement se trouve bien loin de l'agenda politique. La COP15 Biodiversité, qui devait permettre d'adopter un nouveau cadre mondial, vient d'être reportée tandis que la COP26 sur le climat, devrait vraisemblablement subir le même sort.
Concepcion Alvarez, @conce1
(1) Voir l'étude de l'OMM.