Publié le 07 novembre 2022
ENVIRONNEMENT
En pleine COP27, les élections américaines occupent l'agenda, sur fond de production record d'énergies fossiles
La schizophrénie mondiale est à son paroxysme. Pendant que près de 200 pays sont réunis à Sharm el-Sheikh, en Égypte, pour tenter de trouver les moyens de respecter l’Accord de Paris, les États Unis annoncent avoir augmenté leur production d’énergies fossiles. Ce gage donné aux Républicains, qui menacent de gagner les élections de mi-mandat organisées le 8 novembre, montre l’absence de leadership climatique de la première puissance économique mondiale et mine déjà les négociations.

EVA MARIE UZCATEGUI / AFP
Il y a sept ans, les chefs d’État du monde entier sont venus à Paris, ville traumatisée par les attentats de 2015, pour la COP21. Leur présence a aidé à conclure un accord historique visant à limiter le réchauffement climatique à 2°C d'ici à la fin du siècle, ce qui suppose notamment de réduire drastiquement le recours aux énergies fossiles. L’ambiance sera très différente à Sharm el-Sheikh où l’Egypte accueille la COP27. 120 chefs d’État seront présents pour l’ouverture des négociations, ceux des pays les plus impactés par le changement climatique, les îles et les pays africains, les principaux dirigeants européens dont Emmanuel Macron, Olaf Sholtz et Ursula von der Leyen, mais les présidents chinois et américains ne seront pas là !
Xi Jinping ne viendra pas et Joe Biden a prévu une visite express le 11 novembre. Or les deux pays sont les puissances économiques les plus émettrices de la planète. La Chine devance même les d’États-Unis, et a joué un rôle clef avec l’Inde, troisième émetteur mondial, à la COP 26 pour réduire les ambitions de la déclaration finale sur la sortie programmée du charbon. Les États-Unis avaient déjà renoncé l’an dernier à un leadership mondial sur le climat, mais la stratégie liée à la guerre en Ukraine qui consiste à intensifier leur production d’énergies fossiles, hypothèque toute ambition nationale.
"Pic de production de gaz et pétrole historique"
La bataille pour les élections de mi-mandat est rude et l’électorat de Trump, celui qui défend envers et contre tout les énergies fossiles, doit être ménagé. La déclaration de la porte-parole de Joe Biden, Karine Jean-Pierre, le 5 novembre dernier en est l’illustration. Elle commence par un hommage à tous les travailleurs du charbon qui ont construit le pays et à qui on promet une baisse du chômage. Si elle évoque la transition énergétique et rappelle que "l’objectif du pays est de combattre le changement climatique", elle se félicite que "sous le mandat du président Biden, la production de pétrole et de gaz ait augmenté suffisamment pour que le pays soit en passe d’atteindre un pic de production historique !"
Cette déclaration a plongé Peter Kalmus, scientifique de la NASA et l’un des animateurs du mouvement Scientist Rebellion, dans le plus profond désespoir. "Horrible tragédie pour la terre et notre avenir. Les mots ont échoué", écrit-il sur Twitter.
No viable path left to 1.5C.
From today’s White House briefing: “Under President Biden, oil and natural gas production has increased, and we are on track to hit the highest production in our country’s history next year.”
Utterly tragic for the Earth and our future. Words fail.— Peter Kalmus ClimateHuman@climatejustice.social (@ClimateHuman) November 6, 2022
La COP 27 court effectivement le risque de montrer que les négociations climatiques échouent. Année après année, chaque pays vient y défendre ses propres intérêts alors que la bataille pour le climat est un objectif global, très difficile à partager à l’heure de la montée des nationalismes dans de très nombreux pays.
Anne-Catherine Husson-Traore @AC_HT