Publié le 11 juin 2015
ENVIRONNEMENT
Climat : les négociations de Bonn, entre timides avancées et manque de leadership politique
La deuxième session de négociations climatiques s’achève ce jeudi 11 juin sur de timides avancées. Son principal objectif, celui de transformer un premier texte de négociations de 86 pages en un document élagué capable d’ouvrir la voie à un accord à Paris, est à peine tenu. Mauvais présage pour la COP 21 ? Non, répondent les observateurs. Tout se jouera dans les prochains mois qui verront la tenue de rendez-vous internationaux majeurs.

UNFCCC / IISD
Pendant dix jours, les délégués de 196 pays ont tenté de réduire le texte de négociations issu de la session de Genève tenue en février dernier à un document d’une quinzaine de pages. Une véritable entreprise de clarification, qui devait produire un document destiné à servir de support aux négociations de Paris en décembre.
Un texte réduit de 5% ...
Or, d’après les organisations non-gouvernementales (ONG), ce texte a perdu seulement 5% de son volume. Pourquoi si peu ? "Il s’agit d’un texte très technique et chaque point est discuté. Les délégués se sont d’abord attachés à l’organiser, à le structurer, à le rendre cohérent. Et comme chacun sait, le diable est dans les détails" explique Alix Mazounie, du Réseau Action Climat. De fait, chaque formulation, chaque mot ont été méticuleusement pesés.
Quel est l’enjeu de ce texte si âprement négocié ? Aboutir au tout premier accord pour limiter à 2°C le réchauffement climatique à l’échelle mondiale. Passé ce seuil, les effets du réchauffement sont jugés irrémédiables par les scientifiques. Ce qui signifie une exposition croissante aux évènements météorologiques extrêmes (inondations, sécheresse, ouragans, tornades, etc.). Et des conséquences sociales, environnementales et économiques majeures.
"Il ne s’agit rien de moins que de passer à une économie fortement émettrice à une économie décarbonée" rappelle Christiana Figueres, secrétaire exécutive de la CCCNUCC (Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques), dans une conférence de presse tenue ce jeudi 11 juin.
... qui ouvre la voie à un pré-accord en octobre
En dépit des questions restées en suspens et de la lenteur des négociations, tous les acteurs et observateurs s’accordent pour dire que le processus est en route. Pourquoi ? Parce que les deux co-présidents, l’Algérien Ahmed Djoghlaf et l’Américain Daniel Reifsnyder, chargés de coordonner les débats onusiens, ont été mandatés par les délégués pour transformer le texte de 86 pages en un document négociable.
C’est ce qu’ils feront à Bonn le 24 juillet. Dans un entretien avec la presse, les deux médiateurs précisent que le document pourrait être scindé en deux : une partie dédiée au cadre juridique contraignant, et l’autre consacrée aux décisions d’application.
Cette annonce représente une avancée majeure par rapport à Copenhague, où les négociations ont buté sur la réduction d’un texte de quelque 190 pages. Pour Laurence Tubiana, représentante spéciale de Laurent Fabius pour la COP 21 qui se tiendra à Paris en décembre 2015, "Ce mandat est un mandat très fort. Le chemin est encore long, mais nous sommes en bonne voie pour que l’on puisse aboutir à un pré-accord en octobre".
Le leadership politique, pièce maitresse, pièce manquante
Pour Pascal Canfin, ancien ministre écologiste du développement et conseiller climat du think tank WRI, il ne faut pas se fixer uniquement sur les négociations onusiennes : "À Bonn, ce sont 196 délégations qui s’accordent sur le plus petit dénominateur commun. Ce n’est pas un endroit où les initiatives politiques sont prises, alors que nous avons besoin de leadership politique. Les vraies décisions sont prises ailleurs."
Par exemple lors de la tenue de la réunion interministérielle les 20 et 21 juillet à Paris. Ou encore au prochain sommet Chine-USA, ou la rencontre des chefs d’État dans l’enceinte des Nations unies à New-York ; les deux évènements auront lieu durant le mois de septembre, en parallèle avec la prochaine session de négociations à Bonn (du 31 aout au 4 septembre).
"Ces rencontres permettent de libérer l’initiative politique et d’envoyer des signaux forts à Bonn", poursuit Pascal Canfin. "On remarque une mobilisation croissante du monde économique, de la société civile, jusqu'à la sphère politique autour du climat. Et c’est l’ensemble de ces engagements qui fait avancer en fin de compte les négociations."