Climat : le secteur privé, un rempart contre Donald Trump
365 investisseurs et entreprises ont réitéré ce mercredi à Marrakech leurs engagements en faveur d’une transition vers une économie bas carbone. Un message sous forme d’avertissement à peine voilé au futur 45ème président des États-Unis. Et puissamment relayé par le Secrétaire d’État américain John Kerry lors d’un discours aux allures de testament.

Claire Stam / Novethic
Ikea, Starbuck, Mars, Dupont, Nike, Schneider Electric... Près de 365 entreprises et investisseurs ont pris position en faveur de l’Accord de Paris et d’une nécessaire transition énergétique. Dans une lettre publiée ce mercredi et intitulée "Business backs low carbon USA" (le secteur privé soutient la transition bas carbone aux États-Unis), les signataires mettent Donald Trump en garde : suspendre la transition actuellement en cours de l’économie américaine vers une économie bas carbone mettrait en danger la prospérité du pays.
"La participation des États-Unis à l’Accord de Paris est essentielle pour être capable de faire face aux menaces du changement climatique. La transition vers un futur de l’énergie propre est irréversible et inévitable, mais la participation à l’Accord de Paris est cruciale afin de relever le défi dans les temps"
"L’énorme dynamisme généré par le secteur privé pour lutter contre le réchauffement climatique ne peut être inversé et ne peut être ignoré par l’administration Trump. Le train a quitté la gare. Se mettre en travers de la voie serait une folie", prévient Matt Patsky, PDG de Trillium Asset Management. "Cependant, nous savons que maintenant est le bon moment pour rappeler à la prochaine administration que pratiquement toutes les entreprises inclues dans le Fortune 500 (1) reconnaissent la réalité du réchauffement climatique et le besoin d’y répondre."
"Le train a quitté la gare"
Pourquoi une telle prise de position de la part du secteur privé ? À Marrakech, Kevin Rabinovitch, Directeur général pour le développement durable chez Mars, explique que les pertes liées au réchauffement climatique auraient un impact bien trop négatif sur les opérations de son groupe. "Nous sommes une multinationale qui opère dans le secteur alimentaire. Elle s’appuie sur un réseau de fermes qui lui fournissent les matières premières agricoles dont elle a besoin. Or, ces exploitations sont les premières exposées aux impacts du réchauffement climatique. Ce qui a une répercussion négative sur les prix des matières premières agricoles sur lesquels repose le groupe Mars."
Et il prévient : "Nous voulons agir, mais si nous le faisons seuls, cela ne changera pas grand chose. Il faut nous regrouper en coalitions ou en réseaux. C’est le meilleur moyen de préserver notre business."
Pour le Centre pour les solutions énergiques et climatiques, qui regroupe notamment onze grandes entreprises opérant d’importantes activités aux États-Unis (Berkshire Hathaway Energy, Calpine, HP Inc., Intel, LafargeHolcim, Microsoft, National Grid, PG & E, Rio Tinto, Schneider Electric et Shell), l’Accord de Paris facilite "une action plus forte du secteur privé en fournissant une direction à long terme, en mettant en avant la transparence, en ciblant la compétitivité et en favorisant un prix au carbone".
"Ces entreprises ne sont pas seulement dans les engagements volontaires. Elles ont soutenu le Clean power act aux États-Unis, poussé pour des standards plus exigeants pour les carburants et pour améliorer l’efficacité énergétique", souligne Ali Zaidi, du ministère de l’Énergie américain.
"Le marché va dicter la transition énergétique, pas le gouvernement américain"
Cet engagement du secteur privé est irréversible, prévient John Kerry. Le secrétaire d’État américain a vertement critiqué Donald Trump sur ses positions sur le climat. "Je vois les transformations actuellement en cours dans mon propre pays. Et ces transformations sont menées par le secteur privé et elles continueront à avoir lieu. Elles ne peuvent être inversées."
Pour John Kerry, "le marché va dicter" la transition énergétique, pas les gouvernements. Le chef de la diplomatie américaine est intervenu à la suite de la publication par les États-Unis de la stratégie climat du pays à l’horizon 2050. Un plan devant conduire à une réduction de 80% des émissions de gaz à effet de serre.
(1) Le Fortune 500 est le classement des 500 premières entreprises américaines classées selon l’importance de leur chiffre d’affaires.