Publié le 04 août 2020
ENVIRONNEMENT
[Vive la biodiversité] La nature, source d’une alimentation de qualité
La nature est à la base de notre alimentation. Plus celle-ci est variée et plus elle permet de résilience à la fois pour la santé mais aussi pour la pérennité du système alimentaire et agricole dans son ensemble. Or, face à l'uniformisation de notre alimentation et l'intensification de nos modèles agricoles, la diversité végétale dans les champs cultivés se réduit considérablement. Toute la semaine Novethic se penche sur les bienfaits d’une biodiversité pourtant en déclin et qu’il est vital de préserver.

@marilyna
Marre du riz et du poulet ? Pas étonnant, ces deux ingrédients constituent le top 15 de l’alimentation mondiale. Aujourd’hui, selon l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), 75% de la nourriture dans le monde provient de douze plantes et de cinq espèces animales. Et alors même qu’il existe entre 250 000 et 300 000 espèces de plantes, seulement 150 à 200 espèces sont utilisées pour l’alimentation humaine selon le GCRAI (Groupe Consultatif pour la Recherche Agricole Internationale).
Depuis 1900, 75% de la diversité génétique des plantes agricoles a été perdue. En Asie, le nombre de types de riz cultivés a rapidement diminué, passant de milliers à une douzaine. Même tendance aux États-Unis, qui ont perdu 80% de leurs variétés de chou, de pois et de tomate au cours du XXe siècle. Une uniformisation générée par l’agriculture intensive qui valorise les espèces à haut rendement. Or, la diversité génétique des plantes cultivées est essentielle pour le bon fonctionnement des écosystèmes et pour entretenir la résistance aux ravageurs, aux maladies ou aux aléas naturels comme la sécheresse…Une diversité garante de notre sécurité alimentaire déjà fragile, rappelle la FAO. Et pour nos papilles, atout loin d’être négligeable, la diversité des cultures permet aussi de multiplier les saveurs !
C’est ainsi que le mouvement alternatif Slow food, né dans les années 80 en réaction à la diffusion de la fast et junk food (alimentation rapide et "malbouffe"), a mis la défense des aliments en danger au cœur de son action. L’"Arche du Goût" qu’il a monté pour les recenser, répertorie aujourd’hui plus de 5 000 aliments en voie d’extinction, dans plus de 150 pays. Des aliments que Slow Food essaye de promouvoir via son réseau de distributeurs et de restaurateurs mais aussi en éduquant et en incitant les consommateurs à diversifier leur alimentation notamment par le biais de programmes pédagogiques dans les écoles et cantines.
Une mobilisation autour des semences paysannes
Des associations agissent, elles, directement sur les semences, comme Kokopelli qui conserve près de 2 200 variétés de semences libres et reproductibles pour les diffuser à des jardiniers amateurs ou de pays en développement. Carrefour a aussi créé la surprise en 2017 avec une nouvelle offre de fruits et de légumes issus des semences paysannes (1) agrémenté d’une campagne presque politique pour la défense de ces graines "interdites". Non intégrées au catalogue officiel des semences, celles-ci sont en effet interdites à la commercialisation pour les professionnels. Elles sont donc de plus en plus rares, tant les semences hybrides, (c’est à dire sélectionnées, croisées et standardisées) des géants de l'agrochimie -Bayer, Syngenta et Corteva, exercent un monopole.
Le 11 juin 2020, la France a cependant adopté une loi permettant enfin de vendre officiellement des semences paysannes aux jardiniers amateurs. Un "grand pas pour la biodiversité," selon l’actuelle ministre de l’Ecologie, Barbara Pompili mais qui contrevient à la politique européenne, a rappelé la Commission. Cette dernière estime que la commercialisation des semences doit être soumise aux directives européennes.
Béatrice Héraud, @beatriceheraud
(1) Les semences paysannes sont prélevées dans la récolte des agriculteurs en vue d'un semis ultérieur. Contrairement aux semences de ferme, elles ne sont pas préalablement issues de semences certifiées achetées à un semencier.