Publié le 21 juillet 2023
ENVIRONNEMENT
Le gouvernement dévoile sa stratégie nationale biodiversité, sur fond de remaniement
Protection forte des espaces terrestres et marins, nouvelles aires protégées, un milliard d’arbres et 50 000 kilomètres de haies plantés, 50 000 hectares de zones humides restaurées et un budget supplémentaire de 264 millions d'euros. Le gouvernement a enfin publié sa nouvelle stratégie pour la biodiversité... Celle-ci doit permettre de mettre en action les objectifs adoptés à la COP15 de Kunming-Montréal.

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En plein remaniement ministériel, concernant notamment le secrétariat à la Biodiversité, le gouvernement a finalement publié son projet de "Stratégie nationale biodiversité" (SNB) attendu depuis 2020, selon un document que Novethic a pu consulter. Après l'échec des deux précédentes éditions, cette troisième SNB est la nouvelle feuille de route française à 2030 pour sauvegarder la nature. Elle se doit de mettre en œuvre les engagements pris en fin d’année dernière lors de la COP15, et notamment l'objectif phare de protéger 30% du territoire national, terrestre et marin, dont 10 % en protection forte.
Parmi les 39 mesures annoncées, il y a la mise sous protection forte de 100% des herbiers de posidonie de Méditerranée, le lancement de plus de 400 nouvelles aires protégées d'ici 2027, l’objectif de planter un milliard d’arbres et 50 000 kilomètres de haies sur la décennie ou encore de restaurer 50 000 hectares de zones humides d’ici à 2026. Plus de 500 "opérations coup de poing" contre les espèces envahissantes sont par ailleurs prévues d'ici 2025, en particulier dans les outre-mer, et le futur "parc national des zones humides", attendu depuis 2008, devrait être installé, son emplacement sera dévoilé à l’automne.
Concernant les entreprises, l'État promet aussi "un service" qui aura pour mission de les accompagner dans leurs obligations de lutte contre les trafics d’espèces menacées, la déforestation importée ou l’importation de minerais issus de conflits.
264 millions d'euros supplémentaires
Côté financements, dès 2024, le budget de l’État augmentera de 264 millions d’euros pour atteindre les objectifs de la SNB, conformément à ce qu’avait annoncé le 12 juillet, la Première ministre Elisabeth Borne. Ils devraient selon elle permettre de porter à "près d'un milliard d'euros" en 2024 les financements consacrés à la biodiversité.
Ces 264 millions d'euros permettront de renforcer "l’effectivité" des aires protégées (+114 millions d’euros), et financeront la protection des écosystèmes (+80 millions), des espèces (+18 millions), la biodiversité des milieux forestiers (+15 millions), des milieux marins (+6 millions d’euros), ou encore l’accompagnement de la restauration des sols (+6 millions d’euros), indique le document publié jeudi 20 juillet. Comme annoncé mi-2022, 500 millions d’euros seront aussi mobilisés sur 2022-2027 en faveur du retour de la nature en ville.
Les subventions néfastes à la biodiversité dans le flou
Le WWF salue "un réel effort" qui correspond au chiffrage des deux inspections (Finances, Écologie) sur le financement de la biodiversité. Mais l’ONG regrette qu’il n’y ait pas de "trajectoire financière établie jusqu’à 2027". En outre, elle déplore l’absence d’annonces concernant la réduction des subventions néfastes à la biodiversité. "La réduction des subventions dommageables reste dans le flou avec l’annonce d’un plan de réduction à venir pour celles qui peuvent être réformées", écrit Véronique Andrieux, directrice générale du WWF France dans un communiqué.
Autre regret, la révision du Plan Stratégique National qui décline la Politique Agricole Commune en France n’est pas mentionnée. Ce plan représente, toujours selon les Inspections, 63% des subventions dommageables à la biodiversité en France soit 6,5 milliards d’euros par an, explique l'ONG. La France s’est engagée avec les autres pays, lors de la COP15, à réduire ces subventions néfastes à hauteur de 500 milliards de dollars par an au niveau mondial.
Reste enfin la question du portage politique. Si Sarah El Haïry, jusque-là en charge du service national universel, remplace Bérengère Couillard à la tête du secrétariat à la biodiversité placé auprès du Ministère de la Transition Ecologique, le choix de répartir les portefeuilles et les sensibilités environnementales entre différents ministères est maintenu. La question devrait pourtant être transversale. "Le gros problème reste l’intégration de la biodiversité dans les politiques sectorielles (agriculture, forêt, pêche). C’est tout le sens de la planification écologique", souligne le WWF. L’ONG salue toutefois la mise en place d’une meilleure gouvernance avec une SNB placée sous la supervision du Secrétariat général à la planification écologique, dont le cap politique tant attendu ne devrait être donné qu’à la rentrée.
Concepcion Alvarez avec AFP