Publié le 18 février 2020
ENVIRONNEMENT
Des eurodéputés et ONG veulent ajouter une taxe sur la viande dans le Green Deal européen
Après la taxe sur les carburants, voici la taxe sur la viande pour lutter contre le réchauffement climatique. Un rapport, porté par des ONG néerlandaises et soutenu par quelques eurodéputés, remis au Parlement européen, évalue les avantages économiques et écologiques d'une taxe sur la viande. Pour ne pas rejouer l'échec de la taxe carbone, elle n'oublie pas les plus pauvres et propose de reverser une partie des 32 milliards d'euros par an de recettes aux agriculteurs en transition et aux ménages les plus modestes.

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L’élevage serait responsable de près de 15 % des émissions de gaz à effet de serre d’origine anthropique dans le monde, estime l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO). D’où l’idée de taxer la viande pour lutter contre le réchauffement climatique. Cette proposition, revenant souvent dans le débat public, est cette fois portée par un groupe d’une trentaine d’ONG néerlandaises appelée True Animal Protein Price Coalition (TAPPC - Coalition pour un juste prix des protéines animales) qui a remis un rapport au Parlement européen en ce sens. Cette "redevance de durabilité" sera établie en fonction des externalités négatives de la viande en question.
Ainsi, d’ici 2030, la taxe serait de 47 centimes pour 100 grammes de bœuf, de 36 centimes pour le porc et 17 centimes pour le poulet. L’idée est d’introduire cette taxe, progressive, d’ici deux ans pour atteindre une baisse de 67 % de la consommation de bœuf dans l’Union européenne en 2030, de 57 % pour le porc et 30 % pour le poulet. Le prix d'un steak de boeuf augmenterait ainsi de 25 % en 10 ans. Au total, les ONG, qui se basent sur un rapport du cabinet CE Delft, estiment à 32 milliards d’euros la somme générée chaque année.
"Une taxe équitable"
La moitié serait reversée aux agriculteurs pour les aider à réaliser leur transition écologique. Et pour ne pas rejouer l’échec de la taxe sur les carburants qui a déclenché les manifestations des Gilets jaunes, la TAPP Coalition estime souhaitable "que la taxe soit équitable et n’entraîne pas une charge financière disproportionnée pour les ménages à faible revenu". Ces derniers bénéficieraient de 20 % de la redistribution de cette taxe. Un tiers serait dédié à une baisse de la TVA sur les fruits et légumes et le reste financera des programmes d’aides aux pays en développement.
Cette proposition a reçu le soutien de quelques eurodéputés au Parlement européen. "L'inclusion du coût environnemental des protéines animales dans le prix est un élément crucial pour atteindre les objectifs de l'UE en matière de climat, de biodiversité, de santé publique et de bien-être animal", a déclaré au Guardian le professeur Pier Vellinga de l'Université de Wageningen aux Pays-Bas et président de la Tapp Coalition. "Nous avons maintenant une dynamique unique avec le Green deal de l'UE", a réagi Oscar de Schutter, ancien rapporteur spécial des Nations Unies sur le droit à l'alimentation.
Cette proposition a été dénoncée par les premiers concernés, les éleveurs. "Une taxation sur la viande, c’est la mort de l’élevage", a prévenu sur LCI Jean-Pierre Fleury, président du groupe de travail "viande bovine" des organisations et coopératives agricoles de l’Union européenne (Copa-Cogeca). "Ce que les ONG proposent, dans une stratégie plus large, c’est de détruire l’élevage européen", croit-il.
Marina Fabre, @fabre_marina