Publié le 10 octobre 2017
ENVIRONNEMENT
Soutenus par Macron, les agriculteurs imposeront leurs prix aux industriels et aux distributeurs
L'Élysée a dressé un premier bilan d'étape des États généraux de l'Alimentation où industriels, distributeurs et producteurs ont pu trouver un terrain d'entente. Désormais, les prix de vente seront construits à partir des coûts de production des agriculteurs, et non l'inverse. Une mesure soutenue par Emmanuel Macron qui veut équilibrer le rapport de force en poussant les agriculteurs à se regrouper pour peser davantage dans les négociations. Le Président "veut en finir avec la guerre des prix", affirme son entourage.

C’est l’heure du bilan d’étape. Alors que le deuxième chantier des États généraux de l’Alimentation a commencé le 4 octobre, les ministères ont rassemblé les propositions du premier chantier, destiné à mieux redistribuer la valeur entre producteurs, transformateurs et distributeurs. Et quelques mesures concrètes, soutenues par l’État, ont été proposées. Elles seront présentées demain, mercredi 11 octobre par Emmanuel Macron en visite à Rungis (Val-de-Marne).
Tout d'abord, l’idée est d’aider les agriculteurs à se regrouper sous forme de coopératives agricolse afin qu’ils aient plus de poids face aux industriels et aux distributeurs. "On veut les professionnaliser", affirme le ministère de l’Agriculture. Ces producteurs devront définir leur coût de production sur une longue période, environ 5 ans, et proposer un contrat aux parties prenantes. "On inverse la contractualisation. Avant on définissait la rémunération du producteur en fonction du prix de vente. Aujourd’hui, on veut partir du coût de production pour construire le prix de vente", explique cette même source. Le but : renverser le rapport de force.
Emmanuel Macron veut "en finir avec la guerre des prix"
"Emmanuel Macron veut permettre aux agriculteurs de sortir de la dépendance aux aides grâce à un juste prix payé", affirme l'entourage du Président. De fait, en 2016, 30 % des agriculteurs vivaient avec moins de 350 euros par mois.
Pour sortir de cette situation, une autre solution a été présentée : l’encadrement des promotions et l’augmentation du seuil de vente à perte, seuil qui fixe un prix en dessous duquel un distributeur ne peut vendre un produit. L’idée est de réduire la pression qui pèse sur les prix pour permettre aux distributeurs de mieux rémunérer les agriculteurs.
Une mesure très décriée par le président de Leclerc. Selon lui, "sous prétexte d’aider les agriculteurs", on "augmenterait les prix de 5 à 15 % sur des milliers d’articles". Faux, répond le ministère, la hausse ne serait pas aussi importante et ne concernerait que les produits agricoles. "Emmanuel Macron veut en finir avec la guerre des prix bas. Les consommateurs n’ont même plus conscience du prix réel d’un produit", affirme l'Elysée.
Le gouvernement aura recours au name and shame si nécessaire
Mais pour instaurer ces deux mesures, Emmanuel Macron attend des garanties. Pas question de faire peser une hausse des prix sur les ménages sans gage. Le Président va ainsi conditionner le versement de l'enveloppe de 5 milliards dédiés au secteur agricole, à la création de filières interprofessionnelles. Ces filières devront réunir tous les acteurs de la chaîne et formuler des objectifs chiffrés et de réels engagements comme la création d'un label qualité ou les pourcentages de productions bio. Si les objectifs sont satisfaisants, l’État "prendra ses responsabilités" et proposera une réforme législative des relations commerciales.
Mais "il n’y a pas de baguette magique" reconnaît l’exécutif qui se laisse trois ans pour évaluer les effets de sa réforme. Et il n’hésitera pas à dégainer le name and shame s’il s’aperçoit que la hausse des prix ne se répercute pas sur la rémunération des agriculteurs. Une méthode qui consiste à dénoncer publiquement le nom des entreprises réfractaires pour ternir leur réputation.
Marina Fabre @fabre_marina