Publié le 07 mai 2014
ÉNERGIE
Erhard Renz, figure de proue des citoyens énergétiques en Allemagne
En Allemagne, le citoyen énergétique a vu le jour en 2001. L’apparition de cet "Energiebürger" correspond à l’engagement du gouvernement en faveur d’une transition écologique massive. Organisé en coopératives, ces citoyens engagés veulent atteindre un objectif : que l’électricité allemande soit produite à 100 % par des énergies renouvelables. Mais leur influence, qui n’a cessé de se renforcer depuis 13 ans, est aujourd’hui mis à mal par de récentes réformes. Alors qu’ils sont appelés à protester le 10 mai prochain à Berlin, Novethic est parti à la rencontre d’Erhard Renz, l’une des figures emblématiques de ce mouvement citoyen. Portrait.

© BSW / agenturfrey.de
"L’homme qui murmure au soleil". C’est le surnom d’Erhard Renz. Rendez-vous est pris à la gare de Bürstadt, une commune de 16,000 habitants du sud-est de l’Allemagne. L’homme au crâne dégarni et aux lunettes carrées attend devant son véhicule décoré d’un grand soleil rieur. Le ton est donné.
Une fois à bord, la visite peut commencer. Au programme? La traversée d’une zone pavillonnaire aux noms sans équivoques : voie solaire (Solarweg), la rue du soleil (Solarstrasse), le marais solaire (im Sonnenried). Notre guide nous fait ensuite découvrir une installation photovoltaïque, située sur les toits d’une usine et qui fut il y a dix ans la plus importante au monde.
Une fois repartis, nous découvrons des panneaux solaires incrustés dans la structure d'un rond-point. Ce dispositif est négligeable en termes de production d’énergie. Mais il a le mérite de rendre la transition énergétique visible auprès des individus.
Un homme de projets
"Je ne suis pas un homme politique et je ne suis pas un technicien", rappelle Erhard Renz. Cet ancien cadre de Daimler est aujourd’hui en pré-retraite. "Ce que j’offre, c’est mon enthousiasme pour les nouvelles énergies. Je suis un homme d’action. Je préfère monter des projets avec un nombre de personnes restreint mais très engagées. Je ne crois pas au travail politique, souvent long et rébarbatif".
Pour donner vie à la transition énergétique, et la rendre abordable financièrement auprès du plus grand nombre, il a créé plusieurs coopératives. "Chacun peut y participer à partir de 100 euros", précise-t-il. Il a également porté une grande association régionale, la MetropolSolar Rhein-Neckar sur les fonts baptismaux. Il multiplie aussi les conférence dans la région et fait partie du réseau des bloggeurs pour les énergies renouvelables.
Le 19 octobre 2013, Erhard Renz recevait le prix allemand solaire (deutscher Solarpreis) qui récompense l’engagement citoyen pour les énergies renouvelables. Un titre certes honorifiques mais qui signifie beaucoup. Car en Allemagne, chacun est conscient que le succès de la transition énergétique dépend in fine du soutien de la population puisque c’est elle qui en finance la majeure partie.
Or, "l’opinion publique est actuellement en train de basculer. On ne parle plus que du coût de la transition énergétique. C’est le fruit du lobbysme des grandes entreprises du secteur" . Derrière l’action de citoyens énergétiques comme Erhard Renz se cache une bataille d’opinion entre industriels et société civile. S’ils perdent cette bataille, les énergéticiens conventionnels pourraient voir leur survie menacée.
Les énergéticiens allemads luttent pour survivre
De fait, et alors que la saison des assemblées générales (AG) s’est ouverte, les géants de l’énergie se voient contraints d’avertir leurs actionnaires sur des baisses de dividendes. C’est le cas de E.on qui annonce une baisse de 1,60 euros à 60 centimes par action.
Certains envisagent même l’abandon des énergies conventionnelle pour une orientation...vers des énergies non carbonnées : Frank Mastiaux, PDG de EnBW, annonçait lors de l’AG du groupe, le 29 avril dernier, que la production d’énergies conventionnelles baissera d’ici 2020 de...80% au profit des énergies renouvelables, qu’il entend voir progresser de 250%.
Ces chiffres font sourire Erhard Renz: "la transition énergétique aura lieu, qu’on le veuille ou non. Le train est en marche et il est bien trop avancé pour qu’il puisse faire marche arrière. Mais les commandes doivent rester dans les mains des citoyens".