Publié le 26 octobre 2017
ENVIRONNEMENT
Depuis 20 ans, le taux de glyphosate a doublé dans l'organisme des Californiens
Depuis la commercialisation en 1994 des premiers OGM traités au Roundup, le taux de glyphosate dans les organismes a doublé en Californie passant de 0,20 microgramme par litre (µg/l) à 0,44 µg/l en 2016. Ces résultats sont publiés outre-Atlantique au moment où la Commission européenne est mise sous pression par les États membres pour interdire cette molécule.

C’est un constat inquiétant que dresse le Journal of the American Medical Association dans une nouvelle étude publiée le 24 octobre. Les chercheurs se sont intéressés à l'évolution du taux de glyphosate présent dans les organismes humains.
Ils ont passé au crible les urines de 100 personnes de plus de 50 ans vivant dans le sud Californie sur une période de 23 ans, à partir de 1993. Soit un an avant l’utilisation des premiers OGM traités avec du Roundup, le désherbant le plus vendu au monde, dont la molécule principale est le glyphosate. Résultats : non seulement les taux de glyphosate présent dans le corps ont doublé en presque un quart de siècle dans les organismes, mais le nombre de personnes touchées a explosé.
70 % des personnes étudiées présentent un taux détectable
"Nous avons constaté qu’avant l’introduction des aliments génétiquement modifiés, très peu de personnes avaient des taux détectables de glyphosate. En 2016, 70 % de la population de l’étude avait des taux détectables", affirme Paul Mills, professeur de médecine à l’université de Californie et principal auteur de l’étude.
Les taux sont ainsi passés de 0,20 µg/l pour la période 1993-1996 à 0,44 mg/l entre 2014 et 2016. Selon l’AFP, ces concentrations ne dépassent pas encore les limites fixées par l’agence américaine de protection de l’environnement (EPA) à savoir 1,75 µgramme.
En France, des taux importants dans les urines
Mais pour le professeur Paul Mills, la situation est inquiétante. "Notre exposition à ces produits chimiques a considérablement augmenté au fil des ans, mais la plupart des gens ne savent pas qu’ils les consomment par leur régime alimentaire", explique-t-il. C’est pourquoi, en juillet, l’Etat de Californie, suivant l’avis de 2015 du CIRC (Centre international de recherche sur le Cancer), a classé le glyphosate comme substance cancérigène.
En France, l’association Générations futures avait elle aussi lancé un test d’urine de 30 volontaires en avril. Elle avait découvert que 100 % des échantillons contenaient du glyphosate en grande quantité. En moyenne les taux étaient de 1,25 microgramme par litre, soit "12,5 fois la concentration maximale admissible pour un pesticide dans l’eau", précisait-elle.
La Commission européenne mise sous pression par les États membres
Bruxelles doit légiférer sur la question du glyphosate depuis plusieurs années mais n’arrive pas à accorder les États membres sur la question. Mercredi 24 octobre, la Commission européenne a une nouvelle fois repoussé le vote sur le renouvellement de la licence du glyphosate, faute de pouvoir dégager une majorité qualifiée.
Elle avait, dans un premier temps, proposer un renouvellement de la licence pour 10 ans (contre les 15 ans demandés par les industriels dont Monsanto), mais les États membres, dont la France, s’y était opposé. Pour le moment, le gouvernement d’Édouard Philippe n’a pas décidé d’une ligne commune. D’un côté, le ministère de la Transition écologique et solidaire, Nicolas Hulot, prône une sortie du glyphosate sous 3 ans, de l’autre, Stéphane Travert, ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation, plaide pour une sortie progressive de 5 à 7 ans.
C’est cette dernière option qu’a proposée la Commission européenne, mais voyant qu'elle n’était pas soutenue par une majorité de pays, elle a préféré repousser le vote dont la nouvelle date n’a pas encore été fixée. Il y a pourtant urgence à trancher : la licence expire le 15 décembre prochain.
Marina Fabre @fabre_marina