Publié le 05 septembre 2016

ENTREPRISES RESPONSABLES
Responsabilité des entreprises : les grandes références internationales
Les textes internationaux se sont multipliés au cours des dernières années pour affirmer que les entreprises doivent respecter les droits humains. La plupart de ces instruments ne sont pas contraignants mais les États et la société civile peuvent s’appuyer dessus pour inciter les entreprises à être responsables tout au long de leur chaîne d’approvisionnement. Passage en revue des textes et standards qui font références.

David Debray / iStock
Déclaration tripartite de l’OIT sur les entreprises multinationales (1977)
Les conventions de l’Organisation internationale du travail, élaborées par des représentants des États, des employeurs et des travailleurs, sont des traités internationaux juridiquement contraignants.
La Déclaration tripartite de l’OIT sur les entreprises multinationales et la politique sociale, a été adoptée en 1977 et amendée en 2000, 2006 et 2017. Elle fournit une orientation directe aux entreprises sur leur politique sociale et sur des pratiques inclusives, responsables et durables dans le milieu de travail (emploi, formation, conditions de travail et de vie, relations professionnelles). La dernière révision ajoute les principes du travail décent, de la sécurité sociale, de la lutte contre le travail forcé, de la transition de l'économie informelle vers l'économie formelle et sur l'accès des victimes à des voies de recours et d'indemnisation.
Ces principes s’adressent aux entreprises multinationales, aux gouvernements et aux organisations d’employeurs et de travailleurs.
Le Bureau international du travail fournit une assistance technique pour soutenir l'application des principes de la Déclaration. Ces services incluent le service d’assistance aux entreprises (Helpdesk du BIT), l’assistance au niveau national pour certains pays, le développement de matériels d’information et autres ressources, ainsi que l’organisation de sessions de formation.
Huit autres conventions de l’OIT qualifiées de "fondamentales" traitent de questions considérées comme des principes et des droits fondamentaux au travail. L’OIT vise une ratification universelle pour ces conventions, ce qui n’est pas le cas actuellement. Les États-Unis, notamment, n’en ont ratifié que deux.
- La Convention n°29 sur le travail forcé (1930)
- La Convention n°87 sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical (1948)
- La Convention n°98 sur le droit d’organisation et de négociation collective (1949)
- La Convention n°100 sur l’égalité de rémunération (1951)
- La Convention n°105 sur l’abolition du travail forcé (1957)
- La Convention n°111 sur la discrimination (emploi et profession) (1958)
- La Convention n°138 sur l’âge minium (1973)
- La Convention n°182 sur les pires formes de travail des enfants (1999)
Principes directeurs des Nations Unies relatifs aux entreprises et aux droits de l’Homme (2011)
Le Conseil des droits de l’Homme des Nations Unies a adopté, en juin 2011, les Principes directeurs relatifs aux entreprises et aux droits de l’Homme des Nations Unies. Ce texte complète et élargit le champ classique de la RSE (responsabilité sociale de l’entreprise), limité à l’environnement, au social et à la gouvernance économique, en y incluant les droits de l’Homme. Il pose que la référence en la matière est constituée par les conventions internationales relatives aux droits fondamentaux des Nations Unies et de l’OIT (Organisation internationale du travail).
Ces principes s’articulent autour de trois axes : les États doivent protéger les droits de l’Homme en mettant en œuvre les traités internationaux à vocation universelle avec tous les moyens de la puissance publique, dont la loi et la justice ; les entreprises doivent les respecter, c’est-à-dire essentiellement ne pas violer le droit national et le droit international, ni directement, ni par un défaut de surveillance de leur chaîne de fournisseurs ; États et entreprises doivent veiller à ce que les victimes de violations aient un accès aisé à des réparations justes.
Un mécanisme de suivi de l’application de ces principes a été mis en place à travers un comité de cinq experts indépendants, représentant les cinq continents. Celui-ci est chargé d’observer comment les principes sont respectés et de proposer des interprétations permettant de réduire les éventuelles incertitudes qu’ils pourraient susciter, en particulier la responsabilité à l’égard de la chaîne d’approvisionnement, les contours de la notion de "diligence raisonnable", la frontière entre ce qui relève de l’obligatoire et du facultatif, etc.
Principes directeurs de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) à l’intention des entreprises multinationales (1976)
Les Principes directeurs de l’OCDE à l’intention des entreprises multinationales fournissent un aperçu complet des principaux instruments et méthodes dont peuvent disposer les entreprises pour adopter un comportement responsable dans leurs activités. Plusieurs thématiques sont abordées : l’emploi et les relations professionnelles, les droits de l’Homme, la lutte contre la corruption, l’environnement, la science et la technologie, la concurrence et la fiscalité. La dernière révision des principes directeurs en 2011 consacre la "sphère d'influence des entreprises" et leur responsabilité vis-à-vis des droits humains.
46 pays adhèrent aux principes directeurs de l’OCDE : les 34 pays membres de l’OCDE auxquels s’ajoutent 12 pays non membres (Argentine, Brésil, Colombie, Égypte, Lettonie, Lituanie, Maroc, Pérou, Roumanie, Tunisie, Costa Rica et Jordanie).
Différents mécanismes sont mis en place afin de faire respecter ces principes directeurs : les points de contact nationaux (PCN), le comité de l’investissement international et des multinationales, le comité consultatif économique et industriel, la commission syndicale consultative, etc. Ils peuvent être activés lorsque les sociétés ont leur siège ou leur filiale dans un pays membre de l’OCDE.
Les points de contacts nationaux ont été mis en place dans les années 2000. Chaque État adhérant aux Principes directeurs doit en établir un sur son territoire. Ils permettent à la société civile de soumettre des "circonstances spécifiques", soit des "plaintes" lorsqu’elles estiment que des entreprises violent les principes directeurs. Les PCN sont alors chargés d’un rôle de médiation et de conciliation.
Norme ISO 26000 (2010)
La norme ISO 26 000, publiée en 2010, constitue la première définition de la RSE issue d’un consensus international. Celle-ci désigne ainsi "la responsabilité d’une organisation vis-à-vis des impacts de ses décisions et de ses activités sur la société et sur l’environnement, se traduisant par un comportement transparent et éthique qui contribue au développement durable y compris à la santé et au bien-être de la société ; prend en compte les attentes des parties prenantes ; respecte les lois en vigueur et est compatible avec les normes internationales".
Une définition qui met en valeur l’importance d’une démarche proactive de la part de l’organisation dans l’identification de ses impacts en fonction de ses activités (devoir de vigilance) mais aussi l’étendue des responsabilités de l’entreprise par rapport à toutes les activités nécessaires à la réalisation de ses propres objectifs, tout au long de sa chaîne d’approvisionnement (sphère d’influence).
ISO 26 000 peut s'appliquer à tout type d'organisations, entreprises, collectivités locales ou encore ONG, quelles que soient leur activité, leur taille ou leur localisation. Sept domaines ont été définis : la gouvernance de l'organisation (la transparence, la responsabilité de rendre compte et le dialogue avec les parties prenantes) ; les droits de l'Homme ; les conditions et les relations de travail ; l'environnement ; les bonnes pratiques des affaires ; les questions relatives aux consommateurs ; l'engagement sociétal.
Cette norme est non contraignante et n’est pas certifiable, mais il existe des démarches d'évaluation par une tierce-partie.
Pacte mondial des Nations Unies (2000)
Lancé en juillet 2000, le Pacte mondial des Nations Unies est une initiative volontaire, par laquelle des entreprises, associations ou organisations non-gouvernementales sont invitées à respecter dix principes universellement acceptés, touchant les droits de l’Homme, les normes du travail, l’environnement et la lutte contre la corruption.
Les adhérents doivent attester chaque année de leur mise en œuvre effective de ces principes dans une "communication de progrès", rapport mis en ligne sur le site internet du Pacte. Ceux qui ne transmettent pas régulièrement leur communication de progrès sont radiés. A ce jour, 8 900 entreprises, dans 166 pays, adhèrent au Pacte mondial des Nations Unies.
Les Objectifs de Développement Durable
Adoptés en septembre 2015 par l’ONU, les Objectifs de Développement Durable (ODD) sont destinés à élaborer le cadre d’un nouvel agenda mondial pour un développement respectueux des Hommes et de la planète à horizon 2030.
Au nombre de 17, ils ont pour objectif d’éradiquer la pauvreté, de protéger la planète et de garantir la prospérité de tous.
Bien qu’ils s’adressent d’abord aux gouvernements, les ODD sont conçus pour mobiliser un large éventail d’organisations et à unifier les priorités et les aspirations en matière de développement durable. Ils reconnaissent notamment le rôle clé que les entreprises peuvent et doivent jouer dans leur réalisation, tout au long de leur chaîne d’approvisionnement. Parmi les ODD qui concernent plus spécifiquement les entreprises on trouve : celui de travail décent et de croissance économique ; la consommation et la production responsable ou encore l’énergie propre et d’un coût abordable.
A ce jour, plus de 1 500 entreprises ont d’ailleurs apporté leurs contributions et leurs orientations par l’intermédiaire du Global Compact (Pacte mondial) des Nations Unies.
Actualisé le 31 mars 2017