Publié le 05 septembre 2016
ENTREPRISES RESPONSABLES
Comment sauver une démarche RSE ? En luttant contre le greenwhashing !
Le greenwashing est toujours d’actualité. Mais pour les entreprises, le retour de bâton est de plus en plus rapide et direct, internet oblige. Pour lutter efficacement contre ces abus publicitaires, La Fabrique écologique a publié une note intitulée "Comment dépasser le greenwashing" (1). Entretien avec Alexandre Pasche, président du groupe de travail qui l’a écrite et président de l’agence en communication responsable Eco&co.

Alain Jocard / AFP
Novethic : La Fabrique écologique vient de publier une note "Comment dépasser le greenwashing ?". Le sujet n’est pas nouveau ; pourquoi maintenant ?
Alexandre Pasche : Le greenwashing recule dans ses formes les plus visibles. Aujourd’hui, il est rare de voir les entreprises communiquer sur des mensonges caractérisés. L’internet 2.0, avec les réseaux sociaux, a libéré la parole et implique une communication responsable de la part des marques. L’arrivée d’émissions de télévision comme Cash Investigation a aussi changé la donne. Le retour de bâton est dévastateur pour l’entreprise.
Le greenwashing, cela peut mettre à mal tous les efforts, parfois réels, d’une entreprise en matière d’environnement et de RSE. Pour les marques responsables, c’est aussi une sorte de concurrence déloyale. C’est particulièrement vrai pour des PME qui n’ont pas les moyens des grands groupes. Or tout est basé sur l’autorégulation de la profession. Il n’y a pas de réglementation contraignante, pas de police d’inspection et quand la justice passe, c’est souvent trop tard. Seul l’avis défavorable de l’ARPP (l'autorité de régulation professionnelle de la publicité), qui entraîne une perte conséquente en termes d’achats d’espaces, a un effet dissuasif. Mais cela reste insuffisant.
Réformer la régulation de la publicité
Comment lutter efficacement ?
Il faut d’abord faire valider par un tiers de confiance les arguments écologiques avancés par les entreprises. Cela peut passer par des certifications, des labels (autres qu’auto-décernés) ou des associations indépendantes comme des ONG reconnues. Cela se fait pour les allégations sanitaires, pour la communication financière ou pour le reporting RSE... Pourquoi en serait-il autrement pour les arguments écologiques dans la publicité ?
Il faut aussi réformer l’ARPP. Son financement d’abord, puisqu’il provient des adhérents, donc des marques, ce qui l’expose à un conflit d’intérêts. Sa gouvernance ensuite, en intégrant davantage la société civile dans son conseil d’administration. Ses sujets d’études : non seulement la publicité, mais aussi les emballages, promotions… Et puis faire confiance aux agences de communication qui se placent dans une optique responsable et qui connaissent bien ces sujets. Nous sommes de plus en plus nombreux…
Des Khmers verts
Vous prêchez pour votre paroisse… Mais comment les acteurs du secteur reçoivent votre recommandation de renforcer la réglementation ?
Il y a 5 ans, quand nous proposions ce genre de chose, on nous traitait de "Khmers verts". Maintenant, je vois les acteurs évoluer. Lors de la présentation de l’étude, cela semblait assez partagé. Mais nous n’avons pas proposé de faire intervenir le politique pour établir une loi contraignante. Nous n’en attendons rien.
Les directeurs RSE / développement durable n’ont-ils pas aussi un rôle à jouer, en amont, au moment de la conception des campagnes ?
En théorie, oui. Mais quand on travaille en entreprise on connaît la difficulté à faire travailler ensemble différents services... Et s’ils s’immiscent dans la conception, les directeurs développement durable (DD) ou RSE risquent aussi d’apparaître comme des censeurs. Il faut faire preuve de pédagogie bien en amont.
(1) La note est disponible et ouverte à consultation jusqu’en août sur la www.lafabriqueecologique.fr. Sa version définitive sera publiée en septembre.
Article publié initialement dans L'essentiel de la RSE N°114 (juillet 2016)