Publié le 15 septembre 2022

ÉNERGIE

Sobriété et solidarité, les deux maîtres mot pour passer un hiver qui s’annonce rude

Les contours de l'hiver que nous nous apprêtons à vivre commencent à se dessiner. Face aux ruptures d'approvisionnement en gaz russe, contribuant à l'explosion des prix de l'énergie, le gouvernement a décidé de prolonger le bouclier tarifaire en 2023. De son côté, RTE, le gestionnaire du réseau électrique, a modélisé plusieurs scénarios. Pas de black out à l'horizon mais des risques de coupure. Pour y remédier, la sobriété est plus que jamais plébiscitée.

Electricite penurie approvisionnement hiver pixabay
Dans la très grande majorité, RTE n’envisage que quelques signaux EcoWatt rouges sur les six mois de l’hiver,
@CC0

Face à l'explosion des prix de l’énergie, exacerbée par la guerre en Ukraine et la décision russe de réduire les exportations de gaz vers l’Europe, la France va prolonger son bouclier tarifaire. Elle va plafonner les prix du gaz et l'électricité à 15 % en 2023. C’est ce qu’a annoncé mercredi après-midi la Première ministre Elisabeth Borne. Sans ce bouclier, les tarifs auraient augmenté de 120 % selon le gouvernement. Un chèque énergie exceptionnel sera également versé à la fin de l'année à 40 % des ménages, soit 12 millions de foyers.

"15 % au lieu de 120 %, c'est l’engagement que nous prenons. L’écart ne sera pas reporté sur les factures des consommateurs en 2024 ou plus tard. Il sera pris en charge par l’État. Très concrètement, ces augmentations vont conduire à une hausse moyenne des factures de l’ordre de 25 euros par mois pour les ménages qui se chauffent au gaz, au lieu d’environ 200 euros par mois sans bouclier tarifaire ; et à une augmentation moyenne de l’ordre de 20 euros par mois pour les ménages qui se chauffent à l’électricité, au lieu de 180 euros par mois, sans bouclier tarifaire", a expliqué Elisabeth Borne, lors d’une conférence de presse. En tout, l'exécutif prévoit une nouvelle enveloppe de 45 milliards d'euros pour financer le bouclier tarifaire.

La France en "vigilance renforcée", un niveau jamais utilisé jusqu’à présent

Quelques heures plus tôt, le gestionnaire français du réseau d'électricité (RTE) mettait en garde contre des risques de coupures. Dans le contexte d’incertitudes inédites liées à la crise énergétique actuelle, RTE fait démarrer de manière exceptionnelle la période de vigilance dès l’automne et celle-ci s’étendra sur plusieurs mois, alors qu’elle est généralement cantonnée au mois de janvier. Et il place le système électrique sous "vigilance renforcée" – un niveau jamais utilisé jusqu’à présent.

Les principales interrogations portent sur l’approvisionnement en gaz, la situation énergétique dans les pays européens voisins, l’évolution de la demande, et le rythme de redémarrage des réacteurs nucléaires français. Actuellement, 26 des 56 réacteurs nucléaires du parc français sont à l'arrêt en raison de travaux ou de problèmes de corrosion. EDF a redit mercredi que les réacteurs à l'arrêt rouvriraient au cours de l'hiver, une fois les opérations de maintenance terminées, mais tout retard dans ces redémarrages accentuerait les risques de coupure.

RTE a ainsi, testé et croisé plusieurs scénarios. Dans leur très grande majorité, il n’envisage que quelques signaux EcoWatt rouges - allant de zéro à cinq - sur les six mois de l’hiver, c’est-à-dire des jours où une baisse de la consommation est nécessaire pour éviter les coupures de courant. Dans le pire des cas, si la France connaissait un hiver très froid, à l’image de celui de 2010-2011, et que les pénuries de gaz étaient extrêmement fortes, entre 20 et 28 alertes rouges EcoWatt pourraient être émises. Mais même dans ce cas "improbable de cumul d’aléas défavorables", il n’y aurait pas de "black-out" c’est-à-dire de perte de contrôle totale du système électrique, assure RTE.

"Très volontaristes sur la sobriété"

Surtout RTE rappelle que lors des périodes de tension, le risque de coupure peut être évité par une baisse de la consommation de 1 à 5 % dans le scénario central et de 15 % maximum dans le scénario le plus extrême. La très grande majorité des situations à risque se situeraient le matin entre 8h et 13h et le soir entre 18h et 20h. Elles ne concerneraient pas des journées entières ni les week-ends. "Nous pouvons écarter une large partie des risques si nous sommes très volontaristes sur la sobriété, ainsi que sur la mobilisation autour du signal EcoWatt rouge lors des pics de consommation, de telle sorte que nous pourrions traverser un hiver, même froid, sans difficulté", assure ainsi le gestionnaire du réseau électrique.

"À partir de ces prévisions, nous pouvons tirer deux enseignements. Le premier, c’est que dans les scénarios les plus probables, si chacun prend ses responsabilités et fait preuve de la sobriété nécessaire, il n’y aura pas de coupure. Nous n’aurions alors pas besoin d’activer le dispositif de rationnement pour les entreprises qui consomment beaucoup de gaz. Le second enseignement, c’est que seules la sobriété et la solidarité européenne nous permettront d’éviter des coupures et des rationnements dans les cas de figure les plus pessimistes, comme un hiver particulièrement froid cumulé à des difficultés d’approvisionnement", a résumé Elisabeth Borne.

Concepcion Alvarez @conce1


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