Publié le 10 juillet 2019
ÉNERGIE
Objectifs de développement durable : où en est la France ?
Pendant deux semaines à partir du 9 juillet, le Forum politique de haut niveau sur les Objectifs de développement durable se tient à New York, sous les auspices du Conseil économique et social l’ONU. Il s’agit notamment d’évaluer les progrès de ces fameux ODD dans les différents pays. Le point sur la situation française grâce à deux rapports de référence qui viennent d’être publiés.

@ONU
Classée quatrième par le rapport du réseau des solutions pour le développement durable des Nations Unies (SDSN) en ce qui concerne la réalisation des Objectifs de Développement Durable (ODD) prévu par l’Agenda 2030, la France n'est estimée qu'en "position moyenne au sein de l’Union européenne" par l’INSEE, notre propre institut de la statistique. C’est ce qui ressort de leurs deux rapports – qui font référence - publiés en amont du Forum politique de haut niveau. Celui-ci doit permettre de faire un point sur l’état d’avancement des Objectifs de développement durable. Il se tient à New York du 9 au 18 juillet.
D’abord, il faut le souligner, "aucun pays, en Europe ou dans le monde, n’est en voie d’atteindre les 17 ODD" – qui regroupent des objectifs sociaux, environnementaux et économiques- d’ici 2030, "y compris la France", souligne le SDSN. Dans les grandes lignes, les deux organismes (Insee et SDSN) sont d’accord : si la France s’en sort plutôt bien en matière sociale, c’est sur l’environnement qu’elle pêche.
Tableau de bord de la France par ODD, SDSN 2019
Une pauvreté et des inégalités "contenues"
Selon le dossier publié par l’Insee le 28 juin , la "pauvreté et les inégalités monétaires sont relativement contenues". En effet, alors même que la France est classée 11ème de l’Union européenne, et dernière par rapport à l’Europe de l’Ouest, pour son PIB par habitant, sa politique de redistribution lui permet de mieux contenir la pauvreté et de corriger les inégalités que d’autres pays. Seuls la Finlande, le Danemark et les Pays-Bas présentent des taux de pauvreté monétaires inférieurs à celui de la France après transferts sociaux. Mais la proportion de personnes en situation de privation matérielle sévère décroit moins vite (-1 point) que dans la moyenne de l’Union (-3 pts) depuis 2013.
Selon le SDSN, l’ODD 1 concernant la lutte contre la pauvreté est d’ailleurs le seul avec lequel la France est en ligne pour atteindre les objectifs fixés pour 2030 (voir p 96-97 du rapport). Et si les inégalités (ODD 10) sont encore dans le "jaune", ce qui signifie que le défi de son atteinte reste entier, la tendance est plutôt positive.
Mais cela ne doit pas pour autant faire oublier les critiques qui se sont manifestées dans les mouvements sociaux des derniers mois, notamment les Gilets Jaunes. Dans les premiers éléments qui ont fuité de la feuille de route de la France, qui sera présentée fin septembre à l’ONU par Emmanuel Macron lors du SDG Summit, la lutte contre la pauvreté et les inégalités figurent cependant parmi les priorités affichées par le gouvernement.
Une bonne performance en matière de santé et d’éducation
Si les Français bénéficient de l’espérance de vie la plus élevée (82,7 ans) des pays d’Europe de l’Ouest et du Nord, comme les Allemands, ils ne se perçoivent pas pour autant en grande forme. En effet, la part de Français se percevant en bonne santé (67,4%) est inférieure à la moyenne européenne (69,7%). Par ailleurs les taux de décès dans les accidents de la route ou au travail sont supérieurs à ceux de l’Union.
En matière d’éducation, l’Insee estime que la France se situe au niveau des pays d’Europe de l’Ouest et du Nord, et au-dessus de la moyenne de l’UE. Problème : les résultats des Français concernant la réduction des faibles compétences chez les jeunes de moins de 15 ans ne sont pas bons. Comme le rappelle régulièrement l’OCDE, si les Français sont bien présents sur les bancs de l’école, ce sont les inégalités scolaires qui posent le plus problème…
Enfin, le taux d’emploi des diplômés récents (74,4%) est fortement inférieur à celui de la moyenne européenne (80,2%) et le taux de chômage longue durée sensiblement plus élevé (4,2% contre 3,4%).
Pour le SDSN, la performance globale sur la santé (ODD 3) et l’éducation (ODD 4) est plutôt positive, mais des "améliorations sont possibles sur les mesures d’égalité d’accès aux services publics et d’opportunité"
L’environnement : un bilan "contrasté"
En matière d’environnement, le SDSN est plus sévère que l’Insee. L’institut statistique dresse un "bilan contrasté" pour la France. Si sa consommation énergétique baisse (de 9% depuis 2005), le recours aux énergies renouvelables progresse moins vite qu’il ne le faudrait pas rapport à ses objectifs (16% du mix contre une cible de 23% en 2030) et par rapport aux autres pays européens. En cause notamment : le nucléaire qui lui assure de faibles émissions de gaz à effet de serre sans qu’il ne soit nécessaire d’appuyer sur l’accélérateur pour les renouvelables… Autre point noir : l’artificialisation des sols, plus élevée que pour la moyenne européenne.
Mais pour les SDSN "comme pour tous les autres pays de l’OCDE, les forts taux d’émissions de CO2, les niveaux de pollution élevés et les menaces sur la biodiversité vont nécessiter en France des transformations considérables en vue d’atteindre les objectifs d’ici la date limite de 2030". Résultat, la France est dans le rouge concernant la lutte contre le changement climatique (ODD 13) et le orange pour la biodiversité (ODD 14 et 15).
Par ailleurs, "la France génère d’importantes externalités négatives en matière d’environnement et de sécurité, notamment à travers ses activités commerciales incluant les exportations d’armes, qui compromettent la capacité d’autres pays à atteindre les ODD". On pense notamment à l'affaire des exportations d’armes françaises pouvant servir au conflit yeménite, révélée il y a quelques mois par le collectif Disclose.
Béatrice Héraud @beatriceheraud
Méthodologie
Le rapport du SDSN se base sur les données d’organisations internationales, notamment la Banque Mondiale, le Fonds monétaire international et l’OCDE. Le rapport utilise aussi les données de la société civile et de centres de recherche. Il compare aussi les différents pays en se basant sur les indicateurs ODD définis au niveau mondial par l'ONU. L’Insee s’appuie lui sur les indicateurs de développement durable définis pour la France et l’Union européenne (Eurostat) sur la base de ceux définis au niveau mondial. Ces indicateurs pays (ou zone européenne) sont destinés à mieux prendre en compte les spécificités nationales que les indicateurs ODD mondiaux.