Publié le 09 janvier 2019
ÉNERGIE
Grand débat national : les marges de manœuvre existent... mais elles sont limitées
Dans quelques jours, Emmanuel Macron définira dans une lettre adressée à tous les Français ses attentes sur le Grand débat national, promis suite à la crise des Gilets jaunes. Celui-ci sera officiellement lancé le 15 janvier pour trois mois et prévoit d'aborder quatre thèmes dont la transition écologique et la fiscalité. Sur le terrain, les manifestants redoutent un simple affichage. Les marges de manœuvre sont certes étroites mais elles ont le mérite d'exister.

@CNDP
[Mise à jour le 09/01/19 : Après la polémique sur son salaire, Chantal Jouanno a annoncé ce mardi soir son refus de piloter le grand débat national, les "conditions de sérénité nécessaires" n’étant pas assurées. "C’est une décision que j’ai prise parce que je crois en ce débat (...) plus que nécessaire". "Je maintiens ma présidence mais je remets dans les mains du président et du gouvernement, le niveau de rémunération de la présidente de la CNDP" précise l'ancienne sénatrice.]
Il doit répondre à la crise des Gilets jaunes et tenter de l'éteindre. Le Grand débat national qui va démarrer le 15 janvier prochain pour trois mois, portera sur quatre thèmes fixés par le gouvernement : transition écologique, fiscalité et dépenses publiques, démocratie et citoyenneté (dont immigration), organisation de l’État et des services publics. Mais "les organisateurs de débats locaux ont la liberté de choisir tout autre thème qui leur semble pertinent", précise d’emblée Matignon.
"Aucun thème ne sera interdit", confirme Chantal Jouanno, présidente de la Commission nationale du débat public (CNDP) en charge de l’organisation du Grand débat. Hormis "les insultes et attaques personnelles, toutes les positions auront une place dans notre synthèse. Y compris les fausses affirmations, les propositions qui existent déjà ou les paroles des extrêmes, sinon on ne serait pas crédibles". La synthèse du débat recensera toutes les opinions puis "ce sera au gouvernement de décider ce qu'il en fera ou pas", précise Chantal Jouanno.
Un référendum à questions multiples
Suite au débat, des mesures concrètes seront annoncées pour avril et pourraient se traduire dans la réforme constitutionnelle, la loi sur l’économie circulaire (qui comportera notamment une partie sur la fiscalité liée aux déchets) et dans la loi mobilité. L’examen de cette dernière par le Sénat a été reporté à dessein à mi-mars, après le Grand débat. Tout autant de fenêtres de tirs pour le gouvernement afin de traduire dans la loi les doléances des citoyens.
À l'issue des trois mois, des élus de la majorité évoquent par ailleurs la tenue d'un référendum à questions multiples sur le vote blanc, l’introduction de la proportionnelle, la réduction du nombre de parlementaires ou encore le cumul des mandats. Tout cela doit être précisé dans une lettre aux Français qui sera diffusée la semaine prochaine dans la presse et les réseaux sociaux par Emmanuel Macron.
Mais le Président a d'ores et déjà tracé des lignes rouges : pas question de détricoter les réformes décidées depuis 18 mois, comme la suppression de l'Impôt sur la fortune (ISF), ni de renoncer aux réformes prévues (retraites, fonctionnaires, minimas sociaux...).
Déjà une consultation du Cese
Sur la forme, la CNDP prévoit que "chacun puisse organiser un débat que ce soit à l’échelle du quartier, du village ou de la région" via un kit de méthodologie et la tenue de stands sur le terrain. En parallèle, d'autres manifestations seront organisées au niveau régional ou national. Des débats se tiendront également en ligne, sur une plateforme numérique dédiée qui permettra de déposer des contributions dès le 15 janvier. Enfin, des conférences de citoyens tirés au sort seront mises en place dans chaque région pour échanger sur les analyses et proposition issues des différents débats.
Mi-décembre, le Conseil économique social et environnemental (Cese) avait déjà lancé une consultation citoyenne de trois semaines pour répondre à la crise des Gilets jaunes. Parmi les propositions les plus plébiscitées, on trouve l’abrogation du mariage pour tous ou la fin des subventions dans l’éolien. Parallèlement, 5 000 communes ont lancé des cahiers de doléances dont la synthèse sera remise dans les prochains jours. La préoccupation du pouvoir d'achat arrive en tête, devant l'injustice fiscale et la diminution des services publics.
"Combien de débats, combien de réunions a-t-on eues par le passé… pour finalement déboucher sur des résultats qui ne sont toujours pas à la hauteur ?", lance prudemment Jean-François Julliard, directeur de Greenpeace France. Le dernier débat en date sur la transition écologique portait sur la Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) l’été dernier. Et le CNDP avait alors déjà prévenu l’État que "la fiscalité environnementale faisait en premier lieu l’objet de critiques acerbes, comme susceptibles d’aggraver les injustices sociales." Une prédiction qui s’est avérée juste.
Concepcion Alvarez, @conce1