Publié le 21 février 2018
ÉNERGIE
La future taxe à 10 % sur les "métaux stratégiques" en RDC va impacter la transition énergétique et numérique mondiale
La technologie de nos batteries automobiles, celle de nos téléphones portables ou de nos éoliennes est dépendante de nombreux rares dont le cobalt qui provient de République démocratique du Congo, qui fournit 50 % de la demande mondiale. Or le pays veut accroître les taxes sur les exportations de ses métaux stratégiques, ce qui va impacter l’industrie mondiale.

SamitTounsi AFP
Une nouvelle loi est en attente de promulgation par le président congolais Joseph Kabila et elle agite fortement le monde minier. Le taux de la redevance sur les “métaux stratégiques” devrait porté à 10 % dans la dernière version adoptée en commission mixte paritaire Assemblée-Sénat le 27 janvier, contre 5 % dans le projet de loi initial examiné en décembre à l’Assemblée, puis en janvier au Sénat.
Un décret du Premier ministre déterminera quels sont ces métaux stratégiques, ont indiqué à l’AFP des opérateurs miniers. Très demandé par les fabricants de smartphones et de voitures électriques, le cobalt en fera partie, disent-ils en citant “des experts du gouvernement”.
“Le taux actuel de la redevance sur les métaux non ferreux (cuivre et cobalt) est de 2 % de la valeur des ventes réalisées, diminuée de certains frais”, précise-t-on. La notion de “métaux stratégiques” n’existe pas dans l’actuel code minier.
Un prix qui flambe
Des actionnaires des grandes entreprises minières présentes en RDC (Molybdenum, Glencore, Rangold…) ont fait part de leurs inquiétudes dans une lettre au chef de l’État, indiquent les opérateurs miniers. Ils espèrent que la version actuelle du texte ne sera pas promulguée.
Le boom mondial des batteries de smartphones et de voitures électriques a provoqué une flambée des prix du cobalt de +127 % en un an. À la Bourse des métaux de Londres, son prix est passé de 75 000 à 81 250 dollars la tonne depuis mi-janvier et les premières informations sur une hausse de la redevance minière congolaise.
La République démocratique du Congo, qui regorge de matières premières, a entrepris une révision de son code minier car elle jugeait que le code de 2002 était trop favorable aux capitaux étrangers.
Le travail des enfants
Interrogés sur la dernière version du code minier, les officiels congolais gardent le silence. “Les journalistes me demandent si le président a promulgué le code. Je ne répondrai pas à cette question ici. Le code se trouve chez le président”, a déclaré le ministre des mines Martin Kwabelulu cette semaine lors de la conférence minière d’Indaba au Cap, dans des propos rapportés sur le site de la chaîne sud-africaine Sabcnews.
Reste que cette question de taxe ne règle pas le cas des mines de RDC exploitées à la main par des "creuseurs", qui sont parfois par des enfants. Cela représente 20 % du cobalt congolais. Le sujet est tellement sensible que, fin 2017, le London Metal Exchange (LME), première place mondiale pour l’échange des métaux non-ferreux, lance une enquête sur les sources d’approvisionnement des fournisseurs.
Quelques semaines plus tard, Amnesty international pointait du doigt des constructeurs automobiles, dont Renault, pour leur manque de transparence sur l’extraction du cobalt, destiné aux batteries.
Ludovic Dupin avec l’AFP