Publié le 15 janvier 2015
ÉNERGIE
En Allemagne, le tiers financement, ça fonctionne
Dès 1995, la ville de Stuttgart a mis en place un système de financement destiné à la rénovation thermique des bâtiments publics. Et tandis que le tiers financement peine à prendre son essor en France, ici, ça fonctionne : diminution de la consommation d’énergie, réduction de moitié des émissions de CO2 et abaissement de la facture d’électricité pour la ville. Un tiercé gagnant permis par un dispositif aux principes de fonctionnement simples. Et qui préserve l’autonomie de la ville.

© Thomas Kienzle / AFP
"Les restrictions budgétaires dans les communes entravent souvent la mise en œuvre de projets de rénovation thermique. La ville de Stuttgart a donc mis en place une structure financière innovante lui permettant de mener à bien ses projets. Nous l’appelons intracting, ou contracting interne", rapporte Jürgen Görres, à la tête de la Direction de l’énergie de la ville de Stuttgart.
Qu’est-ce que l’intracting, exactement ? C’est un mécanisme de financement qui se présente comme un fonds municipal à destination des services municipaux. Géré par la Direction de l’énergie, il accorde des crédits à taux zéro aux services de la ville qui souhaitent entamer des travaux de rénovation thermique. Clé de voûte du principe: ce fonds s’autofinance grâce aux économies d’énergie.
Il y a vingt ans, la ville de Stuttgart a joué les pionnières en décidant de consacrer une partie de son budget municipal à la création de ce fonds: c’était la rampe de lancement de l’intracting. Depuis, le mécanisme a eu largement le temps de faire ses preuves. Il commence même à servir de modèle, en Allemagne et ailleurs en Europe du Nord.
5 millions d’euros de bénéfice net chaque année
Comment ça fonctionne ? Un service de la Ville soumet à la Direction de l’énergie un projet de rénovation thermique, par exemple le service scolaire qui veut rénover ses écoles. La Direction calcule les économies potentielles du projet proposé et si la période d’amortissement se révèle intéressante et le projet rentable, un accord est conclu entre les deux parties.
En vingt ans, 317 projets ont pu voir le jour dans un parc immobilier qui compte 1310 bâtiments publics. Près de 13 millions d’euros au total ont été mobilisés. Jürgen Görres précise que la demande de financement peut aller de 5000 euros jusqu’à 1,4 million d’euros (renouvellement des systèmes d’éclairage, isolation de murs et plafonds, installation de centrales de cogénération, de panneaux solaires, système de récupération de chaleur, etc.). Il faut sept ans en moyenne pour que les projets s'amortissent. Et les bénéfices ? Chaque année, Stuttgart économise 17,8millions d’euros en énergie. Cette somme, calculée par rapport aux investissements de départ, dégage un bénéfice net annuel de... 5 millions d’euros ! Qui partent renflouer le fonds municipal, débloquant ainsi le financement d’autres projets en attente.
Les émissions de CO2 du parc immobilier réduites de moitié
Grâce à la rénovation thermique de ses bâtiments, le parc immobilier de la ville de Stuttgart a pu réduire ses émissions de moitié par rapport à 1990, valeur de référence (les émissions totales du parc immobilier s’élèvent actuellement à près de 98000 tonnes). Et si, en 1995, moins de 500 tonnes avaient pu être évitées, aujourd’hui les économies annuelles se montent à 11000 tonnes de CO2. Une performance significative, sachant que Stuttgart est l’une des régions les plus industrialisées d’Allemagne, qui abrite notamment les constructeurs automobiles Mercedes-Benz et Porsche.
Mais au-delà des intérêts économiques et environnementaux, Jürgen Görres insiste sur un bienfait important du système: ce fonds fonctionne indépendamment des banques. La ville est donc en mesure de garder son autonomie financière et décisionnelle. "Et au final, ce sont les habitants de Stuttgart qui en profitent."