Publié le 12 mars 2023
ÉNERGIE
Railcoop annonce l’ouverture de la liaison Bordeaux-Lyon à l’été 2024, malgré des embûches
Relancer des liaisons ferroviaires abandonnées pour reconnecter les territoires et répondre aux besoins de transports écologiques, voilà la mission que s’est donnée Railcoop. Si l’objectif est attractif, le parcours est semé d’obstacles. Repoussée à plusieurs reprises, la coopérative annonce finalement l’ouverture de son premier service voyageurs entre Bordeaux et Lyon pour 2024. Un lancement conditionné à la finalisation de son financement et à la disponibilité du matériel rénové.

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Railcoop ne lâche rien. Après avoir repoussé son lancement à deux reprises, l’entreprise ferroviaire coopérative a annoncé l’ouverture de son premier service voyageurs sur l’axe Bordeaux-Lyon à l’été 2024. Un service plus "frugal" qu’envisagé à l’origine, avec dans un premier temps seulement un aller-retour sur deux jours desservant treize gares, dont Périgueux, Limoges et Montluçon. La décision a été validée par les sociétaires à plus de 86% des voix en assemblée générale, alors que la société lotoise fait face à plusieurs difficultés.
Car rien n’est gagné. Pour concrétiser le lancement de la ligne, Railcoop doit encore réunir 4,1 millions d’euros sur l’année 2023, au travers de deux levées de fonds en parts sociales et en titres participatifs. Un objectif loin d’être "irréaliste" selon Alexandra Debaisieux, directrice générale déléguée, qui souligne l’appui des 13 800 sociétaires de l’entreprise. "Cela équivaut à trois parts par sociétaire", résume-t-elle. Le projet sera donc financé sur fonds propres, tandis que le soutien des banques et des investisseurs institutionnels se fait attendre. "Rien que sur 2022, nous avons levé 4 millions d’euros et nous allons continuer d’investir pour aller vers le voyageur", ajoute Nicolas Debaisieux, directeur général.
"Il y a une réelle attente face à l’urgence climatique"
Autre obstacle, la disponibilité et la rénovation du matériel roulant, qui devrait démarrer dans le courant de l’année. Dans un objectif écologique, la société a choisi de réaménager des autorails utilisés précédemment par la région Auvergne-Rhône-Alpes. Si ces derniers sont thermiques, ils permettront de circuler sur des lignes non électrifiées. "Nous préférerions utiliser une autre énergie comme le biogaz", indique Philippe Bourguignon, président de l’entreprise coopérative. "Mais la priorité c’est la mise en service, nous n’avons pas les moyens de tout faire à la fois." La levée de fonds en cours permettra également l’achat d’une rame additionnelle, indispensable au lancement du service.
Pour autant, Nicolas Debaisieux se voit optimiste et affirme que le projet porté par Railcoop bénéficie de conditions favorables. "Il y a une réelle attente des citoyens et des sociétaires face à l’urgence climatique, mais aussi des territoires d’être reconnectés", observe le directeur général. Les collectivités locales jouent par ailleurs un rôle important dans le développement de l’entreprise, détenant aujourd’hui 14% de son capital. Le 23 janvier dernier, la métropole de Lyon investissait ainsi 80 000€ dans la coopérative. Pour répondre aux besoins appuyés des collectivités, Railcoop offrira donc une nouvelle alternative aux voyageurs souhaitant traverser la France d’est en ouest sans passer par Paris, cette liaison ayant été abandonnée depuis près de dix ans.
150 000 passagers par an
Avec ce premier service restreint, Railcoop espère transporter environ 150 000 passagers dans l’année, à raison de 350 voyageurs par rame en moyenne. La commercialisation des billets sera effectuée via des agences de voyage et à bord des trains dans le but de "réhumaniser la relation avec les passagers", explique Philippe Bourguignon. Le tarif de base, aligné sur les prix du covoiturage, se situera aux alentours de 40€ pour un trajet d’une durée de 7h. Le service devrait ensuite s’intensifier pour atteindre deux allers-retours par jour entre Bordeaux et Lyon, auxquels viendront s’ajouter deux aller-retours Limoges-Lyon, ainsi qu’un aller-retour entre Montluçon et Lyon. Cette offre complète devrait permettre de toucher un potentiel de 1,4 million de voyageurs selon la coopérative.
En attendant, Railcoop continue de développer son positionnement sur le territoire du sud-ouest en déployant un service de fret. Depuis mai 2022, un train par semaine assure le transport de bois entre les départements de l’Aveyron et de la Haute-Garonne. Mais là aussi, l’entreprise rencontre quelques obstacles avec un chiffre d’affaires 2022 en dessous des prévisions attendues. Faisant valoir des contraintes techniques, Alexandra Debaisieux assure toutefois des "perspectives prometteuses" pour 2023.