Publié le 06 mars 2021

ÉNERGIE

L'explosion de ventes de vélo met la filière au bord de la rupture

Le vélo connaît un succès fou depuis le premier déconfinement. Les ventes explosent à tel point que la pénurie guette la chaîne d'approvisionnement. Les délais passent de quelques semaines à plusieurs mois. Si l'arrêt de certaines usines en Asie explique en partie le phénomène c'est le passage d'un marché de niche à celui d'un marché de masse qui se joue. Et certains fabricants, comme O2Feel mise sur la relocalisation en France pour mieux s'adapter à la demande. 

O2Feel velo
L'entreprise française O2Feel va rapatrier un tiers de sa production de vélo en France.
O2Feel

C’est avec le hashtag #vélotaf que les cyclistes néophytes partagent leurs bonnes pratiques. Une zone dangereuse, une marque de vélo électrique intéressante, une nouvelle piste cyclable à emprunter ou juste une photo pour se donner du courage… Depuis le premier déconfinement, le vélo connaît une "hausse vertigineuse", selon Joseph d’Halluin secrétaire générale de la Fédération française des usagers de la bicyclette (FUB). Il suffit de jeter un coup d’œil rapide aux garages à vélos surchargés en bas des bureaux pour s’en rendre compte. "Avec la crise sanitaire, il y a eu un désamour des transports en commun au profit du vélo en tant que mode de déplacement", explique-t-il. "On constatait déjà un petit boom du vélo en région parisienne notamment, là, il s’est généralisé", ajoute-t-il.

Si les chiffres pour 2020 n’ont pas encore été publiés, l’année dernière marquerait un record inouï de ventes pour la France, selon les spécialistes. La demande est telle que la production n’arrive pas à suivre. L’un des plus gros fournisseurs de vélo, le japonais Shimano, affiche des délais passés de trois à 12 mois pour certains produits. En cause, l’arrêt imposé de certaines usines en Asie au début de la pandémie mais surtout, une explosion de la demande. Du jamais vu en cent ans d’existence, atteste le groupe. 

Marché de niche à marché de masse

"Un vélo nécessite plus de 2000 pièces. Il faut de l’anticipation, on ne peut pas réapprovisionner les magasins en tant réel en fonction de la demande", explique Xavier Moleux, directeur marketing d’O2feel, PME qui conçoit et commercialise des vélos électriques haut de gamme. "La carence sur certaines lignes de production n’est pas liée à l’approvisionnement mais à la demande. On est passé d’un marché de niche à un marché de masse", analyse-t-il. Il faut dire que les conditions sont réunies pour donner envie aux Français d’enfourcher leur vélo : pistes cyclables temporaires, extension des primes à l’achat de vélo électriques, coup de pouce du gouvernement… "On espère que ce phénomène, très positif, ne va pas être freiné par les soucis de production", anticipe Joseph d’Halluin. 

Les ralentissements sur la chaîne d’approvisionnement ont mis en lumière, comme pour d’autres domaines, la très grande dépendance de la France à l’Asie. "Cela questionne notre souveraineté économique", estime le secrétaire général de la FUB. Et le Covid-19 pourrait avoir créé un déclic. La startup nordiste O2Feel a ainsi décidé de rapatrier un tiers de sa production dans l’Hexagone. Dès le printemps, l’entreprise va lancer une unité en France dans laquelle elle va produire 8 000 vélos.

Créer une Silicon Valley française du vélo 

"Mais sur les pneus, les selles, les cadres... c’est difficile d’avoir du 100 % Made in France", explique Xavier Moleux. "Il faudrait une réindustrialisation de tout l’écosystème. L’ensemble de la filière devrait en même temps décider de s’installer en France. Cela va plutôt se faire étape par étape : plus le marché va grossir, plus les fournisseurs vont produire en Europe pour être plus près de la demande", avance-t-il.

L’exemple du Portugal est suivi à la loupe. Le pays est devenu en quelques années le premier fournisseur de vélos d’Europe. Dans la région d’Agueda, un vrai hub industriel a été créé, composé notamment de la plus grande usine de bicyclette d’Europe. "C’est un exemple à suivre", indique Joseph d’Halluin qui rêve d’une Silicon Valley de la petite reine en France. 

Marina Fabre, @fabre_marina


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