Publié le 05 décembre 2019
ÉNERGIE
Baisse historique du charbon dans la production électrique mondiale en 2019
C'est un premier signal positif de la mutation qu'est entrée d'opérer le secteur énergétique vers un monde bas-carbone. Le charbon est en passe de connaître un recul historique dans la production électrique mondiale en 2019, selon les premières estimations de Carbon Brief. L'Union européenne, les États-Unis et l'Inde participent à ce recul tandis que la Chine continue d'ouvrir de nouvelles centrales.

@CC0
Alors que les rapports d’alerte sur l’état de notre planète se suivent et se ressemblent, voici enfin une bonne nouvelle – à relativiser toutefois. La production électrique à partir de charbon, au niveau mondial, devrait connaître une baisse de 3 % (300 térawattheures), selon les estimations de Carbon Brief sur les sept à dix premiers mois de l’année. C’est la plus forte baisse jamais enregistrée, après deux premiers reculs en 2009 et 2015.
Les raisons de cette baisse varient en fonction des pays mais s’expliquent globalement par l’augmentation de la production électrique à partir d’autres sources d’énergie (renouvelables, gaz et nucléaire) et la stagnation voire la baisse de la demande énergétique dues au ralentissement économique. Le charbon reste toutefois la première source d’électricité au monde devant les renouvelables et contribue à 30 % des émissions du secteur énergétique.
Les États-Unis ont fermé 57 centrales depuis janvier
À contre-courant de la politique anti-environnementale de Trump et son soutien affiché au secteur, les États-Unis ont fermé cette année 57 centrales à charbon - la plus forte baisse en valeur absolue -, représentant 14 gigawatts et près de 6 % du parc charbon du pays. Cela s’explique en très grande partie par l’explosion du gaz qui a petit à petit remplacé le charbon. La baisse de la production électrique à partir de charbon pour les premiers mois de 2019 est ainsi estimée à 14 %.
Dans l’Union européenne, la situation est plus contrastée entre l’est et l’ouest du continent. Globalement, le charbon a chuté de 19 % dans la première moitié de l’année, et devrait chuter de 23 % sur l'année 2019, en raison de la croissance des renouvelables et du gaz et d'un prix carbone qui a atteint 20 euros la tonne. En Allemagne, la baisse est de 22 %. Elle est de 79 % en Irlande où le charbon est passé sous la barre des 2 % du mix électrique. C’est le cas aussi en France et au Royaume-Uni.
En revanche, la Pologne, la République tchèque, la Roumanie et la Bulgarie sont à la traîne en raison de la faible percée des renouvelables dans des territoires historiquement très charbonneux mais la production électrique à partir de charbon a quand même baissé de 6 % en Pologne. Dans le tableau des mauvais élèves, on trouve aussi les pays d’Asie du Sud-Est où la production à partir de charbon va augmenter de 10 % cette année, portée notamment par le Vietnam où les importations de charbon ont doublé. L’Inde sort du lot avec un premier recul du charbon en trente ans.
La Chine continue d’ouvrir des centrales à charbon
La situation la plus délicate reste celle de la Chine où on observe un ralentissement de la croissance de la demande énergétique. Celle-ci est passée de 6,7 % ces deux dernières années à 3 % en 2019. Le pays a néanmoins ouvert en moyenne une grosse centrale à charbon toutes les deux semaines. "C’est le talon d’Achille de la bataille pour le climat", souligne Fatih Birol, le directeur exécutif de l’Agence internationale de l’énergie (AIE).
Selon un rapport publié mi-novembre par le Global Energy Monitor, le pays a accru ses capacités charbon de 43 gigawatts en seulement un an et demi, annihilant les efforts du reste du monde. Le gouvernement prévoit en outre 148 gigawatts (GW) de nouvelles capacités d’ici 2030, soit l’équivalent de la production électrique à partir de charbon en Europe, et au-dessus même des nouvelles capacités en construction dans le reste du monde (105 GW).
"L'augmentation des capacités charbon ne signifie pas forcément une hausse équivalente de la production de charbon ou des émissions liées", explique le Dr Yann Robiou du Pont, chercheur climat à l'Iddri. "De fait, les centrales sont de moins en moins utilisées individuellement". Depuis quatre ans, les centrales à charbon chinoises tournent en effet à moins de 50 % de leurs capacités. "Il en reste que la Chine fait l'inverse de ce qu'elle devrait faire pour respecter l'Accord de Paris" poursuit le chercheur. Pour tenir les engagements pris dans l'Accord de Paris, il faudrait que la production de charbon baisse de 6 % par an, selon l'AIE.
Concepcion Alvarez @conce1