Publié le 11 octobre 2022

ÉCONOMIE

Taxer les superprofits : le gouvernement fait volte-face

Le gouvernement a finalement fait ajouter un amendement au budget 2023 pour mettre en place la décision européenne de faire contribuer les géants énergétiques via une taxe exceptionnelle sur les superprofits. 

Assemblee nationale THOMAS SAMSON AFP
L'Etat veut faire contribuer les énergéticiens qui réalisent des superprofits.
THOMAS SAMSON / AFP

Alors que le conflit sur le partage de la valeur s’intensifie entre TotalEnergies et ses salariés, l’État a décidé de mettre les énergéticiens à contribution. En effet, longtemps opposé, au moins sur la forme, à la mise en place d’une "taxe" sur les superprofits, le gouvernement a finalement fait ajouter un amendement au budget 2023 qui va dans ce sens. Le texte indique ainsi que la "contribution temporaire de solidarité" validée par l'Union européenne, qui portera sur l'exercice 2022-2023, s'appliquera aux résultats des entreprises qui réalisent au moins 75% de leur chiffre d'affaires dans les "secteurs de l'extraction, de l'exploitation minière, du raffinage du pétrole ou de la fabrication de produits de cokerie".

S’il est validé, l’amendement prévoit un taux de contribution de 33% qui s’appliquera aux entreprises qui opèrent dans le secteur de l'énergie dont les résultats dépassent de 20% la moyenne des quatre dernières années. L’amendement ne "concerne que les producteurs de pétrole, de gaz, de charbon ou les raffineurs", a expliqué Bruno Le Maire, sur France Info, mardi 11 octobre 2022. En France, seuls les derniers seront concernés, et la contribution ne devrait rapporter "que" 200 millions d'euros aux caisses de l'État, soit "pas grand-chose", affirme le ministre de l'Économie et des Finances. Mais alors que le conflit se durcit dans les raffineries, le symbole est important.

Paris influencé par les Vingt-sept

Par ailleurs, le gouvernement justifie son virage à 180 degrés par la décision des Vingt-sept. En effet, les États membres de l’Union européenne ont fini par se mettre d’accord pour mettre à contribution les producteurs d’énergie qui bénéficient de l’inflation. Paris était ainsi de plus en plus isolé puisque même le Royaume-Uni a décidé récemment d’instaurer une taxe exceptionnelle de 25% sur les bénéfices des producteurs de gaz et de pétrole. Le dispositif devrait rapporter 5 milliards de livres à l’État et financera des aides aux ménages modestes touchés de plein fouet par une inflation galopante.

Le dispositif est par ailleurs défendu par de nombreux économistes, à commencer par Maxime Combes, qui rappelle qu’en "économie, à chaque objectif, il faut un dispositif dédié." En l’occurrence, "les groupes énergéticiens font des profits extravagants, directement liés à l’envolée des prix de l’énergie, et aux dépens des ménages. L’État peut bloquer les prix ou laisser les acteurs évoluer comme ils l’entendent puis ponctionner les super profits réalisés pour les redistribuer", ajoute le créateur de l’Observatoire des multinationales. "Ces deux approches ne sont pas antinomiques et peuvent se compléter", estime-t-il. C’est ce que le gouvernement compte faire. Ajouté au projet de budget 2023, l'amendement gouvernemental, devrait être discuté à l'Assemblée mercredi 12 octobre.

Mathilde Golla @Mathgolla


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