Publié le 03 janvier 2022
ÉCONOMIE
L'insolente santé des marchés financiers, un risque pour l'économie durable
Les grands indices boursiers du monde entier ont atteint des sommets en 2021, à commencer par le CAC40 qui enregistre une hausse spectaculaire de plus de 30 % en seulement un an. Cette euphorie des marchés financiers contraste avec une année plombée par les catastrophes climatiques et le Covid-19, révélant ainsi le fossé avec la réalité économique.

Istock / MicroStockHub
Les Bourses sont-elles immunisées face au Covid ? À voir les excellents résultats du CAC40 en 2021, on pourrait le penser. L’indice de la Bourse de Paris a connu sa meilleure année depuis près de 21 ans, gagnant près de 30 % et dépassant pour la première fois de son histoire la barre des 7 000 points. "En début d'année, peu de personnes imaginaient un tel scénario", explique à l’AFP Thierry Claudé, gérant de portefeuille chez Kiplink Finance, "valider une année à plus de 28% de hausse c'est historique", ajoute-t-il.
Si le CAC40 enregistre une hausse spectaculaire, les autres grands indices boursiers mondiaux ne sont pas en reste. Le new-yorkais S&P 500 enregistre un boom de plus de 27 % tout comme le Nasdaq 100. "2021 a été une année exceptionnelle pour les marchés boursiers américains", a déclaré Chris Haverland du Wells Fargo Investiment Institute dans une note. "Les marchés ont été soutenus par des politiques budgétaires et monétaires très accommodantes".
"Contraste avec la mauvaise santé des peuples et de la planète"
Les experts justifient en effet la très bonne santé des indices boursiers par l’abondance des liquidités apportées par les banques centrales. Une situation qui tranche avec une autre réalité, bien plus sombre, ternie par les catastrophes climatiques et les variants du Covid-19. "La santé insolente des marchés financiers contraste avec la mauvaise santé des peuples et de la planète", a réagi sur Twitter l’eurodéputée écologiste et fondatrice de Notre Affaire à Tous, Marie Toussaint. "Le CAC40 en tête en Europe sans investissements notables dans la transition ou les salaires. Factice : l’économie n’est pas au-dessus des lois de la nature", ajoute-t-elle.
Et de fait, le coût des catastrophes climatiques est en constante augmentation. En 2021, elles ont coûté plus de 170 milliards de dollars, contre 150 milliards en 2020. Tempête Ida en Louisiane et à New-York, inondations en Belgique et en Allemagne, dôme de chaleur dans l’ouest américain, vortex polaire au Texas, cyclone au Bangladesh, typhon en Chine… les catastrophes ont déferlé en 2021. Le changement climatique est clairement en cause. De même, les derniers jours de décembre ont été particulièrement chaud. En Alaska, région à l’avant-poste du changement climatique, le mercure est monté à 19,4°C le 29 décembre, un record.
Générer une croissance plus saine
Des perspectives à long terme qui ne semblent pas concerner les marchés financiers. Mais à court terme, la décorrélation des indices boursiers avec l’économie réelle commence déjà à craquer. Dans les grandes entreprises françaises, la colère gronde. Chez Leroy Merlin, Decathlon, Sephora… des salariés ont débrayé et réclament une augmentation de salaire. "Entre l’inflation et la hausse des prix de l’énergie, on ne s’en sort pas", témoignait le 26 novembre sur Novethic Jenny Urbina de la CGT. Au-delà de la menace sociale, c’est aussi celle de la création de krachs financiers qui pèse.
"Ce qui est important, c’est de reconnecter la réalité boursière, financière à l’économie réelle", explique à France Info l’économiste Marc Touati qui craint que les banques centrales alimentent des bulles financières. Pour "générer une croissance plus saine, plus propre, un des moyens est de développer des nouvelles technologies dans l’énergie, dans l’agroalimentaire", plaide-t-il.
Marina Fabre Soundron @fabre_marina