Publié le 13 septembre 2021

ÉCONOMIE

Le domaine de Grignon, campus des étudiants d'AgroParisTech, vendu à un promoteur immobilier

C'est un haut lieu de biodiversité et de recherche agronomique. L'État a choisi de céder l'ancien campus des étudiants d'AgroParisTech au promoteur Altarea Cogedim, malgré le blocage des élèves et les manifestations d'habitants et de militants portant un projet alternatif. Ces derniers dénoncent le "bétonnage" d'un magnifique domaine alors que le projet du nouveau propriétaire reste flou.

Nora Dollet AgroParisTech Grignon privatisation
En mars dernier les étudiants d'AgroParisTech ont manifesté contre la privatisation de leur campus.
Nora Dollet

C’est un domaine qui porte l’ADN de l’apprentissage agronomique. Le domaine de Grignon, à l’ouest de Paris, domine avec son château du XVIIe siècle et ses centaines d’hectares de forêts et de terres agricoles. Ancien siège de la Société anonyme de l’Institution Royale Agronomique en 1826, le domaine accueillait jusqu’ici l’école d’ingénieurs agronomes AgroParisTech et des chercheurs. Mais l'école doit déménager pour rejoindre le grand pôle scientifique Paris-Saclay en 2022. Et la bataille pour lui succéder sur le site vient enfin de se terminer.

L’État a retenu le projet d'Altarea Cogedim, qui était en concurrence notamment avec le projet alternatif "Grignon 2026", porté par une association d'anciens élèves de l'école soutenue par la communauté de communes Cœur d'Yvelines. Un choix très critiqué. "Je suis atterrée car l'État s'est comporté de façon inacceptable vis-à-vis des élus et des citoyens qui défendaient un projet respectant l'environnement et la recherche, tout a été fait en catimini cet été", a regretté Joséphine Kollmannsberger, vice-présidente et déléguée à l'environnement du conseil départemental des Yvelines. "Dans un déni absolu de démocratie, le gouvernement a choisi de détruire un patrimoine naturel et scientifique exceptionnel", a lui aussi déploré Yannick Jadot, candidat à la primaire EELV.

"Spéculation et plus-value immobilière"

Pour l’instant, le projet du promoteur immobilier semble flou. Selon les informations de Médiapart, l’affaire aurait été vendue pour 18 millions d’euros à Altarea-Cogedim. Le journal révèle qu’une centaine de logements et une résidence pour seniors vont être en partie construits et que le château pourrait à l’avenir abriter un campus de séminaire, un restaurant étoilé et un hôtel. "Nous sommes animés par un esprit de concertation avec toutes les parties prenantes du territoire, pour préparer la mise en œuvre de ce projet. Plus que jamais et au vu des enjeux associés au Domaine, nous serons à l’écoute de l’ensemble des acteurs du territoire yvelinois et du monde agricole, afin de recréer à Grignon un lieu d’exception aux multiples usages", promet le promoteur.

Mais les habitants et militants, eux, sont plutôt sceptiques. Le samedi 11 septembre, ils étaient environ 400 à manifester devant le domaine de Grignon. "Altarea laisse béton", lisait-on sur les pancartes. "Le projet, derrière des affichages de verdissement, est basé sur la spéculation et la plus-value immobilière par le logement", dénonce dans un communiqué la FNE, la CFDT Inrae ou encore le collectif Plaine de Versailles. "Nous nous opposons à la revente en lots, "à la découpe", ce qui ouvrirait la porte au démembrement de ce site unique. Depuis 5 ans nous maintenons nos revendications : nous voulons un projet d’intérêt général et territorial à Grignon", ajoutent-ils. 

Si le rachat de Grignon est si polémique c'est que tous les acteurs ont en tête l'offre du Paris-Saint-Germain. En 2016, les propriétaires qatariens ont en effet envisagé de reprendre Grignon pour y développer un centre d’entraînement dernier cri avec des dizaines de terrains de football, des parkings, des hôtels… Un projet "ravageur" qui avait généré des critiques. Si le PSG avait finalement préféré les terrasses de Poncy à Poissy pour son projet pharaonique, l’avenir de Grignon est donc toujours incertain. Les associations, et plusieurs élus, dont des candidats à la primaire écologiste, demandent à l’État de faire machine arrière. 

Marina Fabre, @fabre_marina avec AFP


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