Publié le 12 octobre 2022
ÉCONOMIE
Plus de doute : l'activité humaine est en grande partie responsable des sécheresses
La longue et intense sécheresse de l'été 2022 a touché l'ensemble de l'hémisphère nord. Une étude du World Weather Attribution estime que le changement climatique d'origine humaine a rendu l'intensité de cette sécheresse au moins 20 fois plus probable. Une nouvelle sonnette d'alarme au regard de la trajectoire climatique actuelle.

@Jean-Philippe Ksiazek / AFP
Feux de forêt en Bretagne, communes manquant d'eau potable, pierres de la faim révélées dans des cours d'eau à sec... La sécheresse de l'été 2022 a été exceptionnelle non seulement en France, mais aussi dans une grande partie de l'hémisphère nord, illustrant "la manière dont des événements causés par le changement climatique peuvent aussi se déployer sur de vastes régions et durant de longues périodes" note Friederike Otto, climatologue à l'Imperial College de Londres.
À ce titre, le World Weather Attribution (WWA) a publié lundi 5 octobre 2022 une étude qui estime la responsabilité du changement climatique, suspect numéro un de cet épisode extrême. D'après le groupement international de chercheurs, pionnier dans la science de l'attribution, la sécheresse de l'hémisphère nord hors tropiques a été rendue 20 fois plus probable à cause du réchauffement climatique d'origine humaine.
New @wxrisk study on 2022 summer droughts: Root-zone soil drying in N.Hemisphere extratropics was made >20x more likely due to human-ind. climate change. Footprint is also found in West-Central Europe.
Analyses led by D. Schumacher @ETH & @ZachariahMariamhttps://t.co/zrNkxsdXqz pic.twitter.com/Au9IHaygjt— Prof Sonia I. Seneviratne (@SISeneviratne) October 5, 2022
Des conséquences sur le long terme
Sans réchauffement climatique, une telle sécheresse des sols pourrait ne se produire "que" tous les 400 ans. Dans la situation actuelle, avec des températures qui ont augmenté de 1,2 degré depuis les années 1800, cet épisode risquerait de se produire environ tous les 20 ans.
"Cela nous donne un aperçu de ce qui se profile. Avec un réchauffement climatique qui continuerait de s'accroître, nous pouvons nous attendre à des sécheresses estivales plus intenses et plus fréquentes" explique Dominik Schumacher, chercheur à l'institut des sciences climatiques et atmosphériques de l'ETH Zürich en Suisse, qui a participé à l'étude.
L'étude s'est concentrée sur la sécheresse agricole, qui correspond au manque d'humidité dans le premier mètre du sol, où les plantes extraient de l'eau pour se nourrir. Résultat ? Un secteur agricole qui pâtit de récoltes en baisse et d'effets possibles d'une inflation déjà forte. Cette situation a également favorisé les feux de forêt et perturbé la production d'électricité, notamment hydraulique et nucléaire.
"La véritable influence des activités humaines est probablement plus élevée"
Les auteurs de l'étude, précautionneux, n'ont donné dans leurs conclusions que les limites basses des intervalles de probabilité calculés. "Les estimations de l'influence du changement climatique dans l'étude sont prudentes : la véritable influence des activités humaines est probablement plus élevée" précisent-ils.
Comme c'était déjà le cas lors de la publication d'études sur le rôle du changement climatique dans les inondations au Pakistan, les chercheurs rappellent que de nombreux paramètres influencent les événements climatiques pour expliquer leur choix. Par ailleurs, la sécheresse est difficile à mesurer, note le World Weather Attribution. D'autant plus qu'il existe différents types de sécheresses : la sécheresse agricole, qui est celle choisie par l'étude, mais aussi le manque de précipitations ou encore la baisse du niveau des cours d'eau.
Cette étude rappelle la nécessité de contenir le changement climatique dans la limite de 1,5 degré fixée par l'Accord de Paris. Une urgence qui dépasse la seule question des sécheresses dans l'hémisphère nord. Un rapport de l'Onu et de la Croix Rouge paru lundi 10 octobre alerte sur les conséquences meurtrières de l'augmentation des températures. Réunissant plusieurs études, il indique que des zones du Sahel, de l'Asie du Sud et de l'Asie du Sud-est deviendront invivables.
Fanny Breuneval, avec AFP